ce schéma simplifié de l’orientation de la recherche s’ajoutent d’autres techniques pour le recueil du renseignement et notamment pour tout ce qui a trait aux agents. On entre ici dans le domaine de la clandestinité des postes S. R. à l’étranger opérant sous une couverture aussi plausible que possible, que s’efforce évidemment de démasquer le contre-espionnage adverse.
Aussi, ces postes n’agissent-ils pas directement et se cantonnent-ils dans un rôle de documentation. Le maniement des agents appartient à des spé-
cialistes travaillant dans des antennes subordonnées aux postes pour des missions bien définies, et implantées dans le lieu le plus favorable à leur exécution. Le recrutement des agents reste la tâche la plus complexe et s’exécute en tenant compte du choix des meilleurs postes d’observation et du recensement des individus les mieux placés pour pénétrer un milieu déterminé et qui pourront être, suivant leurs qualités, des informateurs occasionnels, des correspondants à l’essai ou des agents immatriculés. Les grandes affaires d’espionnage qui passionnent l’opinion publique dissimulent toujours un enchaînement de manoeuvres patientes et laborieuses dont le mécanisme minutieux et quotidien n’offre initialement rien de sensationnel ; bien souvent, des mesures rigoureuses de protection du secret à tous les échelons auraient suffi à déjouer l’intrigue.
L’autre aspect du problème, d’ordre défensif, est la protection du territoire contre les recherches de l’étranger.
Elle appartient à des services spécialisés relevant des ministères de l’Inté-
rieur (tels la Surveillance du territoire en France ou le FBI [Federal Bureau
of Investigation] aux États-Unis). Une liaison étroite s’impose entre les services de renseignement et ces organismes, tant pour dépister les agents adverses que pour connaître leurs mé-
thodes et leurs objectifs.
On notera cependant que, si le rôle des agents demeure essentiel, les moyens de renseignement ont été profondément renouvelés dans les années 1960 par l’emploi systématique de la photo aérienne par avions à grande pé-
nétration (type « U-2 » ou « SR. 71 »
américains), mais aussi par celui des satellites* de surveillance. Ces derniers fournissent aux grandes puissances qui en disposent une couverture globale de la surface terrestre, permettant notamment aux Américains et aux
Soviétiques la mise en oeuvre d’un système de renseignements stratégiques à l’échelon intercontinental. Chacun de ces satellites (types « Cosmos »
soviétiques, « Samos », « Ferret »,
« Midas » américains) a une mission particulière (reconnaissance photo, reconnaissance électronique, lancement de missiles, etc.).
L’exploitation
du renseignement
Quand le renseignement, ou fourniture, revient à l’état brut à l’autorité qui l’a demandé, rien n’est pourtant terminé.
Il y a d’abord le travail de vérification downloadModeText.vue.download 16 sur 621
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17
9351
et de contrôle de l’organisme central du service (dit « la Centrale »), qui comprend un ensemble de spécialistes répartis en départements fonctionnels (documentation, méthode, contrôle, etc.). Reste enfin le problème, qui comporte un facteur psychologique essentiel, de la confiance accordée par l’autorité politique ou militaire au renseignement apporté. L’un des maîtres du renseignement politico-stratégique de la Seconde Guerre mondiale, l’amiral Canaris, ne fut souvent pas cru par Hitler ou vit ses renseignements mal interprétés, telle l’annonce plusieurs fois vérifiée de la conférence alliée de
Casablanca au début de 1943, que Hitler voulait situer à la Maison-Blanche à Washington.
Les services français :
le S. D. E. C. E.
Ainsi nommé depuis 1947, le Service de documentation extérieure et de contre-espionnage est l’héritier de la Direction générale des services spé-
ciaux, créée à Alger en 1943 et dont le chef était Jacques Soustelle. Celle-ci avait regroupé le Service de renseignements, ou S. R., organisme militaire relevant du chef d’état-major de l’armée et que dirigeait alors le général Rivet, et le Bureau central de renseignements et d’action (B. C. R. A.), formé à Londres en 1941 et confié au colonel André Dewavrin (dit Passy) pour coordonner l’action de la Résistance. Appelé de 1944 à 1947 Direction générale des études et recherches (placée sous l’autorité de Passy de 1945 à 1946), le S. D. E. C. E. relève alors directement du président du Conseil (ou du Premier ministre) et a pour mission de rechercher hors du territoire national tous les renseignements et la documentation susceptibles d’informer le gouvernement. Le service est commandé par un directeur général, poste occupé par l’ancien député Henri Ribière (de 1946
à 1950), le préfet Pierre Boursicot (de 1951 à 1957), les généraux Paul Gros-sin (de 1957 à 1961) et Paul Jacquier (de 1962 à 1966). En 1966, à la suite des remous provoqués par l’affaire Ben Barka, le S. D. E. C. E. est réorganisé ; il est placé sous l’autorité directe du ministre des Armées et reçoit pour directeur le général Eugène Guibaud (de 1966 à 1970), puis Alexandre de Marenches. Installé à Paris, caserne des Tourelles (surnommée « la piscine »), cet organisme comprend une direction des services administratifs et logistiques où figurent notamment un service des écoles pour la formation et le recyclage du personnel et une direction de la recherche. Cette dernière regroupe tout ce qui a trait au renseignement, réseaux, agents, service d’exploitation et de décrypte-ment, en fonction des missions prescrites par le plan de recherches fixé par le gouvernement. À cette direction est en outre attaché le service « action »,
qui dispose éventuellement de moyens militaires.
À cette mission d’ensemble
s’ajoute, pour le S. D. E. C. E., tout ce qui concerne le contre-espionnage à l’étranger, tandis que l’action correspondante en France appartient à la Direction de la surveillance du territoire (D. S. T.) du ministère de l’Inté-
rieur. Institution officielle de l’État, le S. D. E. C. E. recrute ses membres parmi les militaires et les fonctionnaires civils. En 1974, on estimait à environ 2 000 l’effectif de son personnel titulaire (non compris les agents).
L’Intelligence Service
britannique
C’est au XVIIe s. que les services secrets britanniques ont acquis l’importance considérable qu’ils ont conservée depuis lors en jouant un rôle aussi discret qu’essentiel dans la politique de la Grande-Bretagne. Chargé de recueillir tous les renseignements intéressant la conduite de l’action politique, diplomatique, économique et militaire du gouvernement, l’Intelligence Service, ou IS, constitue une organisation entiè-
rement autonome qui relève exclusivement du Premier ministre. Disposant d’un budget particulier alimenté tant par les crédits de l’État que par la gestion de biens qui lui appartiennent en propre, il est également chargé du contre-espionnage tant à l’étranger que sur les territoires britanniques.
Durant la Seconde Guerre mondiale, du fait de la situation exceptionnelle de la Grande-Bretagne, l’IS a joué un rôle considérable quoique encore mal connu. Ses principaux services (Military Intelligence) furent : le MI 5, service chargé de la sécurité en Angleterre ; le MI 6, service de renseignement à l’extérieur, qui fut particulièrement efficace ; le MI 9, créé en 1940 et spécialisé dans les évasions en Europe occupée ; le Special Operation Executive, ou SOE, qui employa plus de 10 000 personnes et prit en compte l’appui aux mouvements de résistance ; le Political Warfare Executive (ou PWE), dérivé du précédent en 1941
et chargé des problèmes politiques. Depuis 1945, l’IS a été particulièrement affectée du fait de la mise en place en