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qui résolut de mettre fin au schisme en recourant cette fois à une troisième voie, la « voie conciliaire ».

L’Église tricéphale du concile de Pise

La voie tricéphale fut facilitée par les désaccords des cardinaux avec leur pape respectif ; les cardinaux s’entendirent pour la convocation d’un concile* à Pise, qui le 5 juin 1409

déclara les deux papes hérétiques et déchus du trône et, le 26 juin, élut l’archevêque de Milan, Petros Filargès, Alexandre V, lequel mourut l’année suivante et fut remplacé par Jean XXIII (1410-1415).

Toutefois, cette élection ne fit pas l’unanimité, et, si les pontifes issus du concile de Pise rallièrent l’empereur, la France, l’Angleterre et le Portugal, Benoît XIII conserva l’Espagne et l’Écosse, et Grégoire XII une partie de l’Italie (Naples) et de l’Allemagne (Bavière) ainsi que la Pologne. Le plus clair résultat du concile était d’avoir établi trois papes au lieu de deux et de diviser un peu plus l’Occident chrétien.

Jean XXIII, voyant tous ses soutiens l’abandonner les uns après les autres, eut l’idée de s’en remettre à l’empereur Sigismond. Celui-ci désirait un pouvoir pontifical fort, capable de s’opposer efficacement à l’hérésie hussite. Aussi obligea-t-il Jean XXIII à convoquer un autre concile dans la ville allemande de Constance (1414). C’est là que triompha la doctrine qui achevait alors de s’élaborer et qui donnait au concile oecuménique des pouvoirs supérieurs à ceux des souverains pontifes.

Le concile de Constance

et l’élection de Martin V

La fuite de Jean XXIII, qui se réfugia à Schaffhouse, ne servit pas sa cause. Le concile proclama sa volonté de se faire obéir des papes et, le 29 mai 1415, il déposa Jean XXIII. Grégoire XII fit sa soumission le 4 juillet suivant ; quant à Benoît XIII, il demeurait irréductible, mais, abandonné de tous, il allait longtemps encore, enfermé dans une forteresse, lancer ses foudres contre le monde entier et prétendre représenter à

lui seul l’Église universelle. Le concile le déposa enfin le 26 juillet 1417.

Débarrassé des papes, le concile

essaya alors de procéder lui-même à la réforme de l’Église, qui s’avérait urgente. Mais les pères, divisés entre eux, s’entendaient mal : Anglais et Allemands voulaient corriger les abus avant d’élire un nouveau pontife, tandis que les Espagnols, les Italiens et les Français soutenaient la priorité de l’élection papale.

Le concile publia cependant le 9 octobre 1417 un certain nombre de décrets importants : obligation pour le pape de réunir un concile général tous les dix ans, réunion conciliaire de plein droit en cas de schisme, interdiction au pape de transférer les évêques d’un siège à un autre, définition des réformes que le futur élu devrait opérer de concert avec le concile. Ces réformes portaient essentiellement sur les abus du pouvoir pontifical, les privilèges des cardinaux, la collation des bénéfices, les appels en cour de Rome, la simonie, les indulgences, etc.

Le conclave s’ouvrit ensuite le 8 novembre 1417 et, le 11, il élut pape Od-done Colonna, qui prit le nom de Martin V (1417-1431). Pour la première fois depuis 1378, la chrétienté obéissait à un seul pape : le Grand Schisme était terminé.

La réforme impossible

Mais cette élection ne résolvait aucun des problèmes de fond. Le nouveau pape, comme ses successeurs, était bien résolu à ne pas accepter la supré-

matie du concile ; en outre, les pères de Constance s’étaient finalement montrés incapables durant ces trois années de réformer l’Église dans sa tête et dans ses membres. Martin V promulga bien quelques réformes, mais resta muet sur la question de la déposition du pape ; surtout, la réforme générale ne fut pas entreprise et, le 22 avril 1418, les pères du concile se séparèrent après une mise en garde prophétique de l’empereur Sigismond sur les lacunes de leur oeuvre.

L’occasion perdue à Constance ne

se retrouvera pas. L’hétérédoxie, avec le hussisme d’abord, va s’installer au

coeur de la chrétienté et y recevoir droit de cité ; elle perturbera gravement l’unité chrétienne, déjà malmenée par le schisme.

Le scandale de trois papes se dispu-tant par la force la direction spirituelle de l’Occident allait affaiblir le prestige de la papauté. Celle-ci, rejetant ensuite toute suprématie du concile, sera ellemême incapable de mener à bien la réforme indispensable de l’Église.

Il ne faudra rien de moins que

l’avancée protestante, la perte de l’unité chrétienne, pour qu’un siècle plus tard l’Église entreprenne enfin, au concile de Trente*, la réforme de ses institutions.

P. R.

F Avignon / Concile / Église catholique ou romaine.

N. Valois, la France et le Grand Schisme d’Occident (Picard, 1896-1902, 4 vol. ; réimpr.

Olms, Hildesheim, 1965). / H. F. T. Blumenthal, Die Vorgeschichte des Constanzer Conzils bis zur Berufung (Halle, 1897). / L. Salembier, le Grand Schisme d’Occident (Lecoffre, 1900). /

E. Göller, König Sigismunds Kirchenpolitik vom Tode Bönifaz IX. bis zur Berufung des Konstan-zer Konzils, 1404-1413 (Fribourg-en-Brisgau, 1902). / F. Bliemetzrieder, Das General Konzil im grossen abendlandischen Schisma (Pader-born, 1904). / E. Delaruelle et E. R. Labande, l’Église au temps du Grand Schisme et de la crise conciliaire (Bloud et Gay, 1962-1964 ; 2 vol.).

Schisme d’Orient

Expression par laquelle on désigne souvent, assez arbitrairement, la rupture de communion ecclésiastique

entre l’Église catholique romaine et les Églises de la « communion orthodoxe », qui ont adopté la discipline et downloadModeText.vue.download 591 sur 621

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17

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les positions doctrinales du patriarcat oecuménique de Constantinople.

On a retenu, non moins arbitrai-

rement, pour dater le début de cette rupture, les excommunications réciproques des titulaires des sièges épiscopaux de Rome et de Constantinople, les 16 et 24 juillet 1054. C’est seulement le 7 décembre 1965 qu’un acte signé en commun par le pape Paul VI et le patriarche Athênagoras Ier de Constantinople devait déclarer « abolie » la mémoire de ces anathématismes.

Origines lointaines

du schisme

En fait, cette longue rupture — non encore complètement effacée — plonge ses racines dans de multiples malentendus et tensions politiques et culturels, disciplinaires et doctrinaux qui apparaissent dès les premiers siècles du christianisme et se renforcent avec la séparation définitive des deux parties occidentale (latine) et orientale (grecque) de l’Empire romain à la fin du IVe s. (395), bientôt suivie par les invasions germaniques et l’effondrement des institutions impériales en Occident. Déjà, dans le courant du IVe s., les controverses doctrinales nées de l’arianisme (v. Arius) et les fluctuations de la politique ecclésiastique qui les avaient accompagnées rendaient patentes les différences qui existaient dans l’expression de la foi chrétienne entre les régions de langue latine et celles de langue grecque ; elles accentuaient plus encore les divergences déjà profondes sur l’organisation de l’Église et le rôle du siège de Rome.

L’attitude prise par celui-ci durant la longue crise de l’Église d’Antioche dé-

chirée en plusieurs factions (362-414) devait provoquer les plaintes amères d’un saint Basile* de Césarée à l’égard du comportement du pape Damase et des évêques d’Italie.

Si le concile de Chalcédoine (451) acclame comme expression de la foi orthodoxe les formulations établies par saint Léon* en synode romain, ce même concile confirme (28e canon) l’égalité d’honneur entre les sièges de l’Ancienne Rome et de la Nouvelle (Constantinople), posée au concile constantinopolitain de 381. Rome refusera d’entériner cette décision au titre de la fidélité à la règle établie à Nicée (325) des trois sièges principaux : Rome, Alexandrie, Antioche.