Les résultats, encore contradictoires, méritent plus ample confirmation.
D’autres recherches portent sur les psychoses expérimentales par les hallucinogènes, dont les signes se rapprochent parfois de ceux des schizophrénies à forme aiguë, sur les troubles de la fonc-
tion onirique (activité du rêve pendant le sommeil) étudiés par les méthodes neurophysiologiques modernes (électro-encéphalogramme). Cependant, les causes héréditaires, génétiques et biochimiques ainsi que les dérèglements du fonctionnement cérébral ne sont pas toujours suffisants pour expliquer la survenue des troubles.
Parmi les facteurs psychologiques et sociaux, on a d’abord souligné le rôle d’une « constitution schizoïde », qui prédisposerait électivement à la schizophrénie. Mais il s’agit d’une donnée fort inconstante, qui, de plus, n’explique guère le mécanisme des troubles. Le niveau intellectuel anté-
rieur à la maladie ne joue pas un rôle déterminant : on observe tous les niveaux, depuis l’intelligence supérieure ou brillante jusqu’à la débilité mentale.
Selon les travaux psychanalytiques, ce n’est pas à l’âge où elle se manifeste qu’il faut rechercher les causes de l’affection, mais durant les premières années de la vie infantile. Des perturbations affectives intenses et précoces dans les relations du nourrisson et du jeune enfant avec la mère surtout, mais aussi avec le père, auraient un pouvoir pathogène sur le développement de la personnalité. On peut retrouver chez certains schizophrènes la trace de ces perturbations dans des anomalies discrètes, mais significatives, de leur comportement pendant l’enfance et dans une certaine manière d’être de la mère à l’égard de son fils ou de sa fille.
Il se produirait, au stade oral surtout et dans l’élaboration de la « relation d’objet », une faille dans la maturation psychique du nourrisson qui entraîne ensuite une fragilisation de la personnalité tout entière. On a décrit ainsi plusieurs types de « mères de schizophrènes », souvent mariées à un homme faible, mais coléreux, parfois absent ou dévalorisé aux yeux de l’enfant par son épouse. Pourtant, les parents de schizophrènes sont souvent peu pathologiques en apparence : ils ne semblent pas souffrir d’une maladie mentale précise. Mais une analyse plus fine de leur comportement indique chez eux une appréciation peu solide de la réalité, des capacités réduites d’échange affectif — verbal et physique — avec leur enfant ou une anxiété intense et envahissante, des réactions agressives
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17
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soudaines et violentes. Néanmoins, il faut se garder d’exagérer le rôle nocif (d’ailleurs parfaitement inconscient) des parents, dont le comportement peut, dans nombre de cas, avoir été normal.
De plus, l’effondrement schizophré-
nique dépend aussi du terrain physique et nerveux. Tous les enfants placés dans les mêmes conditions d’élevage ne deviennent pas nécessairement schizophrènes. On a incriminé d’autres facteurs psychosociaux dits « d’environnement » : la transplantation, l’isolement moral dans un milieu nouveau ou rejetant, le célibat prolongé qui semble plus exposé que l’état conjugal, les difficultés d’adaptation aux études (fréquence de l’affection chez les étudiants), à un milieu professionnel, vécus comme peu sécurisants ou source de conflits avec les parents. On a invoqué aussi les conditions sociales défavorables, notamment le manque de cohésion, d’intimité du groupe social avec insuffisance d’échanges entre l’individu et son milieu, l’aliénation de la personne humaine dans une civilisation moderne écrasante par sa technicité sans chaleur, etc. Toutefois, l’ensemble des facteurs psychologiques et sociaux ne rend pas compte de l’origine de la schizophrénie, qui résulte en fait de la convergence à un moment donné d’une série de conditions : congénitales et acquises, anciennes et récentes dans l’histoire personnelle du patient, physiques, constitutionnelles internes aussi bien que psychologiques venues du milieu extérieur. Parfois, un évé-
nement récent et pénible, comme un échec sentimental ou scolaire, semble responsable de l’affection. Il n’en est rien, car à lui seul il ne peut expliquer l’intensité des troubles. En fait, il n’est que l’impact qui révèle le processus morbide, complexe et profond.
Le traitement
Le traitement que l’on oppose à la schizophrénie ne saurait être univoque, en raison de la grande diversité des formes et des causes possibles de la
maladie. On associe en général plusieurs thérapeutiques.
1. Les thérapeutiques biologiques comprennent l’électrochoc*, qui n’est utile que dans les poussées aiguës ou dans les formes catatoniques, au demeurant rarement appliqué seul, car de résultats peu durables, la cure d’insuline, ou cure de comas (dite de Sakel), qui, après avoir été pendant vingt ans la méthode de choix, semble de plus en plus abandonnée et réservée à des cas qui ont résisté à d’autres traitements.
Néanmoins, cette cure permet encore au malade d’être l’objet de soins psychologiques intensifs avec un « mater-nage » bienfaisant à chaque réveil de coma (de 50 à 100 comas environ) de la part d’infirmières spécialisées.
2. La psychochirurgie est pratiquement exclue. Elle consistait dans une section des fibres nerveuses issues du cortex préfrontal bilatéralement ou dans une ablation des lobes frontaux.
3. La chimiothérapie par les psycho-tropes* représente en fait l’un des grands progrès dans le traitement de la schizophrénie. Les médicaments utilisés sont surtout les neuroleptiques, dont les plus connus sont la chlorpro-mazine, la lévomépromazine, l’halopé-
ridol, le tripéridol, la thiopropérazine, la thioridazine, la fluphénazine, la tri-fluopérazine, etc. Plus accessoirement sont administrés des tranquillisants (diazépam, méprobamate), des antidé-
presseurs à doses faibles, etc. Souvent, les associations de ces médicaments entre eux, selon des schémas divers, renforcent leur action. Les doses prescrites, toujours très élevées pendant les phases aiguës, diminuent ensuite après l’hospitalisation. Le traitement ne doit jamais être interrompu sans avis médical. Il peut durer des années, afin d’éviter la moindre rechute qui obli-gerait à une nouvelle hospitalisation du malade. Sa durée très prolongée se justifie aussi par la lenteur du processus d’amélioration de certaines tonnes.
Le choix et les doses de neuroleptiques sont guidés par l’importance respective des symptômes positifs et négatifs de la maladie. Les effets extra-pyrami-daux des médicaments (raideur, hy-persalivation, tremblement, lassitude,
aspect figé, impatience des jambes, mouvements anormaux, contracture, etc.) doivent être corrigés par des anti-parkinsoniens ; ils n’ont aucune gravité, mais sont gênants en l’absence de médicament correcteur.
4. Ces chimiothérapies ne vont jamais sans une psychothérapie* de soutien, de compréhension et sans un bon
contact entre le médecin et son malade.
La qualité confiante de cette relation affective, sa régularité sont un élément fondamental de la bonne évolution de la maladie. Il faut que le malade accepte bien ses médicaments et ne les considère pas « comme des poisons »
ou comme une entrave majeure à sa vie. L’attitude de l’entourage familial, professionnel, conjugal est déterminante dans le pronostic. Tout sujet isolé moralement, rejeté par sa famille et la société, non accepté en tant que malade mental voit ses chances de guérison s’amenuiser. Il faut essayer de considé-