après 1918 (problème du Schleswig).
Les plans connus sous le nom de Programm Nord datent de 1953. Plus de 540 000 ha sont concernés. Remembrement, drainage, assainissement, endiguement, restructuration des exploitations agricoles, construction de voies, reboisement, tels sont quelques-uns des problèmes réglés dans un amé-
nagement global. Les opérations sont terminées à proximité de la frontière danoise.
La restructuration des exploitations vise à abaisser les prix de revient. Le problème est de lutter contre la concurrence néerlandaise, qui est moins handicapée à l’égard du marché de la Ruhr que ne l’est le Schleswig-Holstein, du fait des distances plus réduites. À
la suite de la tempête catastrophique qui a ravagé la région de Hambourg en 1962, les autorités ont établi un plan général de renforcement des digues et de protection des côtes (Küstenplan) ; 350 000 ha de terres basses doivent être protégés définitivement en 1978.
L’économie a subi d’importantes
transformations depuis quelques dé-
cennies. La population, qui n’était que de 865 000 habitants en 1871, était passée à 1,58 million en 1939. Mais le partage de l’Allemagne après 1945
a amené plus de 700 000 personnes ; sur une population de 2,5 millions d’habitants (1971), les réfugiés expulsés constituent une part importante.
Pour donner du travail à cette masse, l’industrialisation a été poussée. Jadis, l’industrie était principalement localisée dans les ports. Kiel (272 000 hab.), qui doit son importance à la création de son port militaire en 1871, a dû se reconvertir. Capitale du Land, la ville présente de nombreuses industries technologiquement avancées. Son port renferme un des chantiers navals les plus importants de la R. F. A. La « Kie-
ler Woche » continue la tradition des régates de l’époque où la marine était soutenue par le pouvoir politique et où l’empereur accordait son patronage aux régates. L’université permet à la ville de disposer d’un pouvoir d’attraction que ne possède pas Lübeck, devenu ville frontalière depuis 1945. Cette dernière, jadis reine des villes de la Hanse, essaie de renouer avec un passé prestigieux.
L’industrie, sans le bâtiment, emploie près de 40 p. 100 de la population active du Land. Ce pourcentage est en forte augmentation par rapport à l’avant-guerre. Cependant, le Land passe pour être encore profondément marqué par son passé rural.
F. R.
L’histoire du Schleswig
et du Holstein
La région intermédiaire — au-delà de l’Elbe — entre la grande plaine de l’Europe du Nord et le monde scandinave a été une zone d’interpénétration et d’affrontement. Peuplée de Frisons, de Danois, de Germains, elle entre dans l’histoire, à partir du XIe s., sous les vocables de Schleswig (ou, en danois
« Slesvig ») et de Holstein, deux unités politiques liées entre elles à partir du XIVe s. et au Danemark à partir du XVe s.
(1460). Après cette date, et durant cinq siècles, le roi de Danemark a gouverné
« les duchés » non pas en tant que roi, mais en tant que duc, avec l’obligation de respecter le fonctionnement de leurs institutions particulières, au centre desquelles la chevalerie (noblesse) jouait un grand rôle, dans les « états » et à côté d’eux. À ce stade, l’individualité du Slesvig n’apparaissait pas.
Mais une évolution s’est dessinée, lente aux XVIIe et XVIIIe s., accélérée ensuite. En effet, les états ont été progressivement réduits à une représentation de l’Église et de la noblesse, les droits traditionnels confirmés (du moins certains) à titre de privilèges, l’autorité du souverain accrue, selon un processus d’uniformisation devant beaucoup aux philosophes et à la Révolution française. Il en est résulté, aussi bien dans le sens des réformes impo-
sées qu’en réaction contre elles, une remise en question du statut historique des duchés.
Déjà en 1810 une ordonnance avait prévu l’emploi du danois dans les écoles, les églises et les tribunaux du Slesvig du Nord, dont la majorité des habitants parlaient cette langue. Inappliquée, elle eut la valeur d’un signe.
Les changements politiques de 1815
exercèrent une action plus forte : le Holstein entra dans la nouvelle Confé-
dération germanique (il avait appartenu au Saint Empire), et le Lauenburg devint danois, compensation dérisoire à la perte de la Norvège. Il en résulta une influence de l’élément allemand dans l’État danois, et, par voie de consé-
quence, une méfiance nouvelle, une réaction de défense perceptible dans les projets visant à doter le Holstein d’une constitution à part, notamment l’affaire des Göttinger Sielen, le premier mouvement national allemand du Hols-
tein, sous l’inspiration de Friedrich Christoph Dahlmann, alors professeur à l’université de Kiel. Toutefois, les polémiques et les querelles n’agitèrent vraiment « la question des duchés », ne révélèrent un nationalisme danois et un nationalisme allemand affrontés qu’à partir de 1840.
Copenhague publie alors un « édit des langues » qui reprend celui, mort-né, de 1810 et amorce une progression de la langue danoise dans la partie septentrionale du Slesvig. À l’assemblée des états (dédoublés depuis 1834 entre Holstein et Slesvig tout en continuant à ne former qu’un corps), Christian Flor, professeur à l’université de Kiel, déclare (1842) qu’il ne prendra plus désormais la parole qu’en danois ; il en résulte quelques séances agitées et bien des protestations, dont celle de Johann Gustav Droysen (1808-1884), collègue de Flor (1843).
Kiel, la ville universitaire, et
Schleswig, la ville politique, deviennent les deux principaux théâtres de lutte. Christian Flor mène le combat d’accord avec son collègue Christian Paulsen, historien du droit. Le poète et théologien Nikolai Frederik Grundtvig (1783-1872) et à Copenhague le national-libéral Orla Lehmann (1810-1870) apportent leur caution à un mouve-
ment dit « des Danois de l’Eider », qui demande le « Danemark jusqu’à l’Eider » ! Conscients de la résistance du Holstein et d’une Allemagne qui se réveille, ces « Danois de l’Eider »
tournent leurs regards non seulement vers Copenhague, mais aussi vers Stockholm : c’est, en 1843-1845, le début du « scandinavisme ». Le Slesvig
s’anime : des journaux et des revues en danois paraissent, des bibliothèques
— où pénètrent les romans historiques de Bernhard Severin Ingemann (1789-1862) — et des « écoles populaires »
se créent à partir de celle de Rødding (1844).
Une association de caractère plus spécialement politique provoque, le 18 mai 1843, le grand rassemblement de Skamlingsbanken, près de Kolding, qui est renouvelé l’année suivante.
Pour comprendre la passion soulevée, on peut rappeler ce qu’écrit alors Dahlmann : « Ce que les Danois veulent en vérité, c’est la fusion, le duché du Schleswig tout entier devant redevenir
[...] un pays parlant danois et se sentant danois. Mais la grande majorité des habitants du Schleswig a depuis des siècles détourné son regard du peuple danois et s’est tournée vers le peuple allemand ; toute sa culture vient de ce dernier... » Et de mettre au défi les « songe-creux » d’adopter les seuls moyens d’implanter le « danisme » : interdire aux gens du pays les universités allemandes, transférer la résidence royale à Schleswig (1844).
Ainsi se préparent les crises du
XIXe s.
D’abord celle de 1848, survenue
dans l’atmosphère révolutionnaire de l’Europe. En mars, des « Danois de l’Eider » demandent au roi Frédé-
ric VII l’incorporation du Slesvig au Danemark, et le roi les encourage en faisant entrer Lehmann au ministère, tandis que, en sens contraire, la réunion de Rendsburg, issue des deux assemblées territoriales, réclame une constitution commune aux duchés et l’entrée du pays dans la Confédération allemande ! Pour empêcher qu’un pays allemand ne soit abandonné « et ne devienne la proie des Danois », les Holsteinois prennent la responsabilité