d’un gouvernement provisoire (établi à Flensburg) — et d’une guerre. S’inti-tulant « lieutenant des duchés », le duc Christian-Auguste d’Augustenborg
(1798-1869) fait appel à la Prusse et à l’Allemagne — l’Allemagne de la Confédération expirante, celle de l’Assemblée nationale, celle des universitaires. L’affaire « concerne la nation allemande », déclare solennellement l’assemblée de Francfort, le 9 juin.
C’est la guerre germano-danoise de 1848-1850 : les armées prussiennes, commandées par Wrangel, puis par
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17
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Prittwitz, ne parviennent pas à briser la résistance des Danois, qui les tiennent en échec à Düppel (juin 1848 - avr.
1849) et à Fredericia (5 juill. 1849).
Mais les intérêts généraux des
grandes puissances (cette zone pé-
ninsulaire est par nature stratégique) comme le nationalisme exprimé à
Francfort déterminent l’intervention de l’Europe. Le protocole de Londres (1852) rétablit en somme le statu quo ante : si le Danemark ne peut incorporer le Slesvig, si les duchés conservent une chevalerie commune et une université commune, le dualisme est consacré par les « états » et les « ministères », et, depuis Flensburg, le nouveau centre politique du Slesvig, la « danisifica-tion » scolaire reprend. En 1861, une pétition couverte de 71 000 signatures exige de nouveau l’union constitutionnelle du Slesvig au Danemark.
La deuxième crise survient peu
après. Dans sa conjoncture internationale jugée favorable, Carl Christian Hall (1812-1888), le ministre des Affaires étrangères, obtient du souverain danois Frédéric VII, le 30 mars 1863, une patente qui réalise le programme de l’Eider tout en accordant une large autonomie aux deux autres duchés.
C’est alors une nouvelle contre-offensive de la Diète germanique, qui vote le 1er octobre une exécution fédérale contre le duc de Holstein, auquel elle oppose le duc Frédéric d’Augustenburg (1829-1880).
Tel est l’héritage redoutable qui échoit, le 15 novembre, à Christian IX
(succédant à Frédéric VII). La crise se déroule tout autrement qu’en 1848-1852 : l’abstention de la France, de la Grande-Bretagne et de la Russie permet l’initiative de Bismarck*, l’intervention austro-prussienne, c’est-à-dire une nouvelle guerre (« guerre des Du-chés ») contre le faible Danemark, et la spoliation de celui-ci, qui doit abandonner à ses adversaires, au traité de Vienne (30 oct. 1864), les trois duchés (Schleswig, Holstein et Lauenburg). Le 14 août 1865, la convention prussienne de Gastein règle le sort des duchés : l’administration du Holstein est confiée à l’Autriche, celle du Schleswig à la Prusse, qui se fait céder en outre le Lauenburg et Kiel, avec le droit de creuser un canal à travers le Holstein.
Un an plus tard, en conclusion de la guerre survenue entre les deux associés, le traité de Prague (23 août 1866) incorpore à la nouvelle Allemagne en gestation « ces perpétuellement indivisibles » qui, suivant le mot de Bismarck, devaient « un jour devenir prussiens ».
Depuis cette date, le Schleswig
appartient à l’Allemagne. Un certain article 5 du traité reconnaissait aux populations des districts du Nord « le droit de décider, par un vote librement émis, si elles veulent de nouveau être réunies au Danemark ». En fait, le gouvernement de Vienne renonce dès octobre 1878 à en réclamer l’application.
Dans ces conditions, la germanisation ne rencontre aucun obstacle d’ordre international. Poursuivie entre 1867
et 1918, elle comporte : une politique scolaire, d’abord modérée, puis alour-die en 1878 et qui s’achève en 1888
lorsque l’enseignement religieux lui-même doit se faire en allemand ; une politique économique, suscitant socié-
tés de colonisation et de crédit (1909) ; une politique bureaucratique enfin, particulièrement dure sous l’Ober-präsident Ernst Matthias von Köller (1841-1928), entre 1897 et 1901 (un millier d’expulsions).
Dans l’ensemble, le « danisme »
fléchit d’abord, par le jeu des optants
et par celui du départ des conscrits (l’exemple le plus frappant étant celui de l’île Föhr). Si les élections au Reichstag constituant de 1867 envoient deux députés danois à Berlin, il n’y en a plus qu’un à la consultation suivante.
Le nombre des votes danois au nord d’une ligne passant à Flensburg tombe de 27 488 (1867) à 11 616 (1886).
Une reprise se manifeste ensuite, grâce à des associations linguistiques, politiques (Hans Peter Hanssen [1862-1936]) et économiques. En restituant leurs droits de citoyens allemands aux fils des optants, le traité de 1907 favorise peut-être ce mouvement. La fièvre remonte en 1909-10, et les expulsions reprennent. En tout cas, le niveau des voix danoises remonte au-delà de
16 000 en 1912, et la question du Slesvig du Nord reste ouverte.
La défaite allemande de 1918 fournit l’opportunité de l’examiner de nouveau. Député au Reichstag (depuis 1906), Hanssen demande solennellement, le 23 octobre 1918, l’application de l’article 5 du traité de Prague.
Le gouvernement provisoire de Berlin fait une déclaration dans ce sens, le 14 novembre, mais tandis qu’une campagne se déclenche dans le pays, le ministère danois préfère se tourner vers les vainqueurs, partenaires plus solides (28 nov.). Finalement, les habitants du Slesvig du Nord seront effectivement consultés, les 10 février et 14 mars 1920. Dans la zone contiguë au Danemark, le rattachement au Danemark est voté par 75 431 voix contre 25 329 ; dans la zone « intérieure », plus méridionale, la supériorité globale des Allemands (51 724 contre 12 800) n’entraîne qu’une rectification mineure. À
Flensburg, ville symbole, l’élément allemand l’emporte (à trois contre un).
Dès lors, le Slesvig présente les deux aspects complémentaires du problème des minorités : celui des droits de la minorité allemande dans le Slesvig du Nord, réuni au Danemark, celui des droits de la minorité danoise dans le Schleswig central, maintenu sous la souveraineté allemande. Dans la pratique, les deux éléments se fortifient.
Ainsi, dans le Nord, le « Deutscher Schulverein » permet de multiplier les écoles allemandes, et une association de crédit (1926) facilite l’installation
d’une centaine de fermiers. Dans le Sud, des organisations danoises « travaillent » tout le pays de Flensburg, où une presse danoise renaît. La dictature nationale-socialiste introduit une activité économique nouvelle, liée surtout au réarmement, en même temps qu’une refonte administrative accroissant le poids des districts proprement allemands dans le Schleswig-Holstein. La principale association danoise du Schleswig résiste — elle compte encore 2 728 membres en 1945 —,
mais les effectifs des écoles danoises diminuent.
Depuis 1945, le pays a été submergé par un flot de réfugiés et expulsés de Prusse-Orientale et de Poméranie.
Dans le cadre du Land de Schleswig-Holstein, reconstitué par les Britanniques, on eut la surprise de constater la présence d’un élément danois notable jusque dans le sud du Schleswig.
À la première élection au Bundestag (1949), 75 000 voix « danoises » envoyèrent un député à Bonn. Sans doute, ce vote comportait-il un élément d’op-portunisme : en 1953, il n’y avait plus que 43 000 voix. Mais ce noyau s’est ensuite maintenu. Au Danemark, l’élé-
ment allemand représente à peu près le dixième de la population du Slesvig.
On constate le même phénomène que de l’autre côté de la frontière : il y a eu une représentation éphémère des Allemands au Folketing (1953-1964), mais l’accord entre les deux populations est garanti par l’existence d’une