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Après l’expressive monodie de

l’Histoire de la résurrection du Christ, Schütz revient à une écriture contra-puntique très élaborée, en publiant en 1625 les Cantiones sacrae, recueil de motets latins à quatre voix et continue.

Mais cet ample contrepoint, qui s’apparente à l’ancienne forme, laisse une large place aux éléments concertants et madrigalesques. L’utilisation d’intervalles inhabituels, du chromatisme ou de mouvements mélodiques créant une tension harmonique montre à quel point Schütz veut faire partager l’émotion ressentie à la méditation des textes qu’il traite, dont, entre autres, certains écrits de saint Augustin.

Au cours du second séjour qu’il fit à Venise, en 1628-29, Schütz fit paraître la première partie des Symphoniae sacrae, consistant en vingt concerts spirituels latins de trois à six voix et instruments obligés. Le style concertato quasi monteverdien se manifeste au

premier plan dans ce recueil, comme dans les deux suivants, sur texte allemand cette fois, qui allaient voir le jour en 1647 et en 1650.

OEuvre de commande d’Heinrich

Posthumus von Reuss, les Musika-

lische Exequien de 1636 sont la première tentative d’un requiem allemand. Ces « obsèques musicales »

tiennent à la fois, par la grande fresque à deux choeurs de la seconde partie, des Psaumes de 1619 et, par la totale liberté d’expression des voix solistes, des Petits Concerts spirituels (Kleine geistliche Konzerte), dont le premier volume parut en cette même année

1636 (2e vol., 1639).

La guerre de Trente Ans ayant com-plètement désorganisé la chapelle de l’Électeur de Saxe, Schütz se trouve désormais à la tête d’un ensemble vocal et instrumental fort réduit ; il imagine alors ces Petits Concerts, pages brèves, mais audacieuses dans l’écriture comme dans la pulsion dynamique qui les anime et dans la richesse du coloris instrumental.

Si l’influence de C. Monteverdi

est encore sensible dans les Sept Paroles de Jésus en croix (Sieben Worte Christi), dont la composition date probablement de 1645, c’est surtout avec austérité et archaïsme que Schütz se penche sur les paroles du Rédempteur.

Deux choeurs introductif et conclusif à cinq voix, nobles et douloureuses méditations, enserrent une succession de récitatifs. Ceux de l’évangéliste sont soutenus par la seule basse continue, tandis que deux dessus instrumentaux accompagnent ceux de Jésus. Des

« sinfonia » viennent prolonger ou annoncer le climat de certaines paroles.

Cet archaïsme s’accentue davantage encore avec la Passion selon saint Luc (1653), la Passion selon saint Jean (1665) et la Passion selon saint Mat-thieu (1666). Volontairement, le compositeur abandonne l’accompagnement ou le commentaire instrumental pour retrouver et donner libre cours à une déclamation dépouillée, quasi gré-

gorienne, en une écriture résolument modale qui oppose aux choeurs de foule les principaux acteurs de ce drame.

Deux années avant les dernières Passions, Schütz avait fait paraître un nouvel oratorio, l’Histoire de la Nativité (Weihnachtshistorie). Les principes d’écritures les plus nouveaux, principalement ceux de l’opéra italien, y sont employés. La symphonie, haute en couleurs par une sélection minutieuse des timbres ou, au contraire, par des associations délicates et savoureuses, vient renforcer l’atmosphère et le sens expressif ou symbolique des principaux passages.

En conclusion de cette étonnante

production, le Magnificat allemand à double choeur est l’ultime composition du maître. Âgé de quatre-vingt-six ans, Schütz a, en cette année 1671, perdu en partie la vue et l’ouïe. Comme pour marquer l’achèvement d’un cycle, il retrouve le récitatif déclamatoire des Psaumes de David dans cette page

grandiose, oecuménique, en dehors du temps. Avec une oeuvre aussi abondante et géniale, l’imposante stature de Schütz domine incontestablement le XVIIe s. allemand.

P. G.

A. Pirro, Schütz (Alcan, 1913). / H. J. Moser, Heinrich Schütz, sein Leben und Werk (Kassel 1936 ; 2e éd., 1954). / W. Bittinger, Schütz.

Werke Verzeichnis (Kassel, 1960).

Jalons

biographiques

1585 Naissance à Köstritz, près de Gera.

1599 Choriste à la chapelle du landgrave Maurice de Hesse-Cassel.

1608 Études de droit à l’université de Marburg.

1609 Sur l’insistance du landgrave, Schütz se rend à Venise pour travailler sous la direction de G. Gabrieli ; il y demeura jusqu’à la mort du grand maître vénitien, en 1612.

1613 Organiste à la cour de Kassel, tout en reprenant ses études juridiques.

1617 Maître de chapelle du prince-électeur de Saxe à Dresde, poste dont il restera titulaire jusqu’à sa mort.

1618-1648 Guerre de Trente Ans : en rui-nant principalement l’Allemagne, elle dé-

mantèlera presque totalement la musique de la chapelle électorale de Dresde.

1619 Mariage avec Magdalena Wildeck.

Celle-ci mourra en 1625, peu après la naissance de sa seconde fille.

1628-29 Retour à Venise, où C. Monteverdi est maître de chapelle de la basilique Saint-Marc, jusqu’en 1629.

1633-1635-1636-1638 Comme directeur de la musique à la cour de Christian IV de Danemark, Schütz fait deux séjours à Copenhague, séparés par un retour à Dresde.

Dès lors, ses fonctions seront partagées entre Wolfenbüttel, Copenhague, Leipzig et Weissenfels.

1672 Mort à Dresde.

Schwitters (Kurt)

Peintre, sculpteur et écrivain allemand (Hanovre 1887 - Ambleside, Westmo-rland, 1948).

Il fait des études à l’académie de Dresde, puis à celle de Berlin, où il entre en contact avec le milieu de la galerie « Der Sturm ». Il peint des natures mortes et des paysages, d’un style d’abord traditionnel, puis influencé par le cubisme et l’expressionnisme* (Kirchhof de 1919, Guggenheim Museum, New York). Cette oeuvre figurative, qui devait d’ailleurs se poursuivre, n’aurait fait de lui qu’un bon peintre parmi tant d’autres si, à partir de 1919 (année, par ailleurs, de son premier recueil de poèmes, Anna Blume), il n’avait élaboré simultanément des créations d’une originalité telle qu’il faudra plus d’un quart de siècle pour qu’elles apparaissent dans toute leur importance, comme l’une des clés de l’art du XXe s.

En contact avec les dadaïstes (surtout Hans Arp*, Tristan Tzara*, Raoul

Hausmann), les surréalistes, les néo-plasticistes (il collabore aux revues De Stijl* et Mecano en 1922, à la revue Cercle et Carré en 1930), Schwitters ne s’identifie à l’esprit d’aucun de ces courants. Historiquement, il est considéré comme l’un des « fondateurs » de dada*, dont il représente l’implantation dans sa ville natale ; mais, si le nihi-

lisme, le terrorisme intellectuel, la volonté de faire table rase de tout apport culturel du passé qui caractérisent dada sont bien à l’origine de sa démarche, il développe à partir de là une oeuvre positive et cohérente, fascinante par ses qualités esthétiques, qui bouleverse totalement le champ des techniques traditionnelles.

Les poèmes phonétiques d’Arp, de

Hausmann, lui inspirent sa Ursonate publiée en 1932. Dans le domaine de la peinture, Schwitters refuse la limitation des couleurs fournies dans le commerce et de leur application concertée sur la toile : « Au fond, dit-il en 1928, je ne comprenais pas pourquoi on ne downloadModeText.vue.download 610 sur 621

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17

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pouvait pas utiliser dans un tableau, au même titre que les couleurs fabriquées par les marchands, des matériaux tels que vieux billets de train, bouts de ficelle, rayons de vélo, bref tout le vieux bric-à-brac qui traîne dans les débarras et sur les tas d’ordures. » Ceci implique la généralisation de la technique du collage*, employée épisodiquement par les cubistes, les futuristes, les da-daïstes ; c’est surtout l’utilisation à des fins esthétiques du rebut, du déchet, pratique qui devait se généraliser au début des années 60 (Robert Rauschen-berg*, le nouveau réalisme*...).