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Devenue l’habitude de toute une vie dans le décor romantique des « Borders » écossais, au prestigieux passé et aux paysages exaltants, cette lecture nourrit son imagination et berce son adolescence de récits merveilleux, et l’entraîne naturellement vers les lettres et le passé.

Aux premiers essais du jeune écrivain, ballades et romances médiévales, participent aussi bien le fantastique

allemand que le fantastique anglais.

Walter Scott adapte « Lenore » et

« Der wilde Jäger » dans The Chase, and William and Helen : Two Ballads from the German of Gottfried Augustus Bürger (1796). Il apporte quelques pièces aux Tales of Wonder (Contes de terreur, 1801) de « Monk » Lewis (1775-1818). D’ailleurs, il écrira, lui aussi, des romans « gothisants »

comme Black Dwarf (1816) et surtout The Bride of Lammermoor (la Fiancée de Lammermoor, 1819). Il retouche et édite Minstrelsy of the Scottish Border (Chants de la frontière écossaise), trois volumes de ballades (1802-03) et la « romance » de Sir Tristrem (1804) avant de se lancer dans la poésie. De The Lay of the Last Minstrel (le Chant du dernier ménestrel), qui le rend cé-

lèbre en 1805, à Harold the Dauntless (Harold l’Indomptable, 1817), il donne Ballads and Lyrical Pieces (1806), Marmion (1808), The Lady of the Lake (la Dame du lac, 1810), The Vision of Don Roderick (1811), Rokeby (1813), The Bridal of Triermain (la Fiancée du Triermain, 1813). Ses activités se multiplient. Finançant dès 1805 l’imprimeur James Ballantyne, auquel se joint en 1813 l’éditeur Archibald Constable, Scott publie l’oeuvre de Dryden* en 1808 et celle de Swift* en 1814, collabore à l’Edinburgh Review, à la Quarterly Review et rédige pour l’En-cyclopaedia Britannica des articles aussi caractéristiques que « Chiva-lry » (1818), « The Drama » (1819),

« Romance » (1824). En fait, on ne voit guère de domaine littéraire qu’il n’exploite : histoire (The Border Antiquities of England and Scotland, 1814-1817 ; Life of Napoleon, 1827), biographies littéraires (Lives of the Novelists, 1821-1824) et jusqu’à des Letters upon Demonology and Witchcraft (Lettres sur la démonologie et la sorcellerie, 1830).

Walter Scott touche même au théâtre

— sans grand succès — avec, après la traduction de la tragédie de Goethe*

en 1799, Götz von Berlichingen, Ha-lidon Hill (1822), Macduff’s Cross (1822), The Doom of Devergal (1830) et Auchidrane, or the Ayshire Tragedy (1830). De plus, il tient un intéressant et émouvant Journal à partir de 1825, début d’une tragique période. Devant la faillite, en 1826, de l’association Ballantyne-Constable, déjà en mau-

vaise posture depuis longtemps, et malgré ses énormes besoins personnels, il décide de rembourser une dette qui atteint 117 000 £. Cette noble entreprise, en le contraignant à accentuer encore sa prodigieuse activité, le fera littéralement mourir d’épuisement après un vain voyage en Italie et en Allemagne à la fin de 1831 pour recouvrer la santé.

« De telles légendes notre héros s’éloigna insensiblement pour s’adonner aux images qu’elles suscitaient

[...]. Il pratiquait des heures durant cette sorcellerie interne par laquelle les événements passés ou imaginaires sont présentés en action, pour ainsi dire, aux yeux du rêveur. » (Waverley, chap. IV.) De tant d’écrits et d’efforts, il resterait sans doute bien peu aujourd’hui. Mais

— heureusement pourrait-on dire —

son déclin dans le domaine poétique vers 1811, correspondant à la montée de Byron* au firmament des poètes, conduit Walter Scott, devenu shérif du Selkirkshire en 1799, à rechercher une voie nouvelle. L’écrivain rêve d’une action semblable à celle de Maria Edgeworth (1767-1849) pour l’Irlande, et déjà menée à bien en poésie au siècle précédent par Robert downloadModeText.vue.download 12 sur 627

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 18

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Burns (1759-1796), « le laboureur inspiré des dieux » de l’Ayrshire : faire surgir, vivante de l’histoire, sa patrie aux yeux des Écossais. Ainsi naissent les trente-deux « Waverley novels », du Waverley de 1814 à Count Robert of Paris (le Comte Robert de Paris) et Castle Dangerous (le Château périlleux) de 1832, pratiquement à la veille de sa mort. Et ainsi commence aussi le succès du roman historique, auquel, mis à part quelques exceptions célèbres (Ivanhoe, 1820 ; Kenilworth, 1821 ; Quentin Durward, 1823), l’Écosse —

en partie ou en totalité — sert toujours de cadre (Guy Mannering, 1815 ; Rob Roy, 1818 ; The Fair Maid of Perth [la Jolie Fille de Perth], 1828). Baronet depuis 1820 et suivant l’exemple de Horace Walpole (1717-1797) — père du célèbre Castle of Otranto (1764), première ébauche du roman histo-

rique, mais surtout introducteur à la campagne de la mode du style gothique vers 1750 avec sa propriété de

« Strawberry Hill » —, Walter Scott vit dans une ancienne ferme achetée en 1811 sur la Tweed et transformée en château gothique.

Désormais, seigneur de « Ab-

botsford », il sort de la nuit des temps grands seigneurs, nobles dames et petites gens du passé, et, malgré souvent ses négligences de composition, il les ressuscite pour les yeux émerveillés du public. Au plan national, le lecteur découvre costumes, traditions, moeurs, vie locale, esprit de clan et ces paysages, ces lieux dont Walter Scott possède l’intime connaissance. La langue s’épanouit à travers des oeuvres parmi lesquelles « Wandering Willie’s Tale », conte inclus dans le cours de Redgauntlet (1824), constitue sans doute à cet égard l’exemple le plus réussi. L’épopée souvent tragique de l’Écosse se dévoile au fil des romans, du conflit entre royalistes et covenan-ters, au XVIIe s. (Old Mortality [les Puritains d’Écosse], 1816), aux émeutes essentiellement anti-Union, les « Porteous Riots » du XVIIIe s. (The Heart of Midlothian [la Prison d’Édimbourg], 1818). Walter Scott ne saurait oublier, bien sûr, cette cause perdue, mais souvenir exaltant aux yeux des Écossais : la lutte jacobite pour restaurer les Stuarts. Celle-ci se cristallise autour du prince Charles Édouard (Waverley), petit-fils de l’exilé Jacques II, et jette ses derniers feux avec Redgauntlet.

Enfin s’imposent des personnages, tels Flora Mac Ivor, passionnée pour la cause des Stuarts (Waverley), la jeune fille du peuple Jeanie Deans (The Heart of Midlothian), le fameux héros populaire Rob Roy, le marchand de Glasgow Bailie Nicol Jarvie (Rob Roy) et toute l’Écosse anonyme, pittoresque et pleine de ce sens de l’humour que Walter Scott exprime si bien. Au plan des événements historiques, le roman de Walter Scott apporte un véritable renouveau, en ne se cantonnant plus dans l’exposition de faits sèchement présentés et doctement expliqués. L’histoire elle-même ne se sent pas contrainte à une constante rigueur. La création d’un certain contexte historique se substitue

à la stricte réalité. Ainsi, Ivanhoé restitue le Moyen Âge anglais, Quentin Durward le Moyen Âge français, Tales of the Crusaders (1825) celui des croisés, Anne of Geierstein (1829) la Suisse du XVIIe s. Kenilworth plonge dans le XVIe s., Old Mortality et Waverley dans le XVIIe s., tandis que St. Ronan’s Well (le Puits de Saint-Ronan, 1824) s’attache à l’époque contemporaine.

De la même manière, si le personnage historique authentique n’occupe pas la première place, on trouve un certain nombre d’excellents portraits : Louis XI (Quentin Durward), Élisabeth (Kenilworth), Jacques Ier (The Fortunes of Nigel [la Fortune de Nigel], 1822) ou Cromwell (Woodstock, 1826).