Les rapports entre les deux peuples se développèrent, les Grecs étant avides de blé, les Scythes bons acheteurs d’objets d’art. Darios Ier* tenta de les battre, pour priver les Grecs de leurs fournitures (512). Il n’aboutit qu’au resserre-ment de leurs liens. Paysannerie scythe et Grecs raffinés s’interpénétrèrent. À
dater de l’époque hellénistique, l’élé-
ment grec devait reculer et les Scythes devaient s’organiser en un État (IIIe s.).
Ils avaient continué à se répandre vers l’Occident. Dans les Balkans, ils furent arrêtés par les vertus guerrières de Philippe II* de Macédoine.
Hérodote* a parlé des Scythes, de
leurs coutumes éminemment barbares : on n’a pas toujours osé le croire. Il a fallu attendre les fouilles — précédées par des pillages — de tombes de chefs, riches en orfèvrerie, pour que soit attirée, à partir du XVIIe s., l’attention sur cette civilisation. Hérodote distinguait déjà des tribus d’agriculteurs, qui étaient sédentaires, des nomades dépendant des Scythes royaux des rives du Don. Les Scythes agriculteurs contribuaient au ravitaillement d’Athènes en blé et, en échange, achetaient du vin et divers produits fabriqués où l’on reconnaît la main de l’artiste grec. La civilisation scythe garda le plus souvent ses traits originaux, marqués par le genre de vie, mais sur lesquels se plaquèrent les témoignages de l’art grec, vases et bijoux. La limite entre le travail scythe et l’oeuvre grecque n’est pas toujours évidente, car les Scythes étaient bons métallurgistes, capables d’un fin travail, et les Grecs savaient faire sur commande des oeuvres adaptées au goût scythe, c’est-à-dire un art décoratif animalier qui s’insère dans le cadre plus général de l’art des steppes*. Ces oeuvres ont été retrouvées dans les tombeaux. Le peuple scythe était riche en or, ses chefs accumulaient les objets précieux et se faisaient enterrer avec leurs richesses.
Les conditions de conservation ont été favorables : un tombeau souterrain préserve assez bien son contenu. Mais dans l’Altaï, c’est mieux encore : le sol, gelé en hiver, le demeure en été, en raison de la protection thermique qu’assure le recouvrement de pierre du tumulus. C’est ce qui fait l’intérêt des trouvailles de Katanda, où, déjà, au siècle dernier, on avait retrouvé des vêtements intacts. Plus récemment, les fouilles de Pazyryk, pratiquées avec des méthodes modernes, nous ont
fait connaître le détail de la vie des nomades. Moins riches que celles de Russie méridionale, dont l’orfèvrerie fait la fierté des musées soviétiques, ces tombes ont conservé le mobilier, le matériel et le cheptel du défunt et nous révèlent une civilisation presque exactement semblable à celle des Scythes de Russie méridionale telle qu’on la connaît par l’archéologie et par Hérodote, une civilisation de tribus apparentées, mais où l’influence grecque ne parvient guère, mais cède ici la place à
des objets d’origine iranienne et même chinoise (Ve - IIIe s. av. J.-C.). On trouve les restes du char de bois, demeure itinérante utilisée seule ou conjointement avec une tente de feutre, les tapis de laine, ou d’un feutre incrusté de motifs décoratifs aux couleurs vives, qui égayaient ces intérieurs, les ustensiles domestiques (poterie, petits meubles de bois, matériel de cuisine), les bijoux et les harnachements décorés, les chevaux du mort, dont les cadavres étaient soigneusement rangés, les armes, qui sont celles des cavaliers : bouclier, lance, arc et flèches, goryte (carquois typique). Athènes recrutait des archers scythes au VIe s. À Pazyryk, des corps embaumés, très peu vêtus d’ailleurs, downloadModeText.vue.download 21 sur 627
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 18
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étaient couverts de tatouages très décoratifs, et très compliqués, représentant des animaux stylisés. Ces tatouages, qui n’étaient pas de règle chez les Scythes, pourraient avoir eu une signification hiérarchique. Les corps étaient de grande stature. Ceux des chevaux sacrifiés témoignaient d’une excellente condition physique. Les harnachements étaient l’objet de vraies folies : des plaques d’or les enjolivaient, concurremment avec le bronze, le feutre brodé, la fourrure. Les Scythes, sans être les premiers cavaliers de l’histoire, apprirent aux peuples de l’Orient l’utilisation guerrière de la cavalerie et firent du cheval le compagnon permanent du nomade. Ils étaient experts dans l’art du lasso.
En Russie du Sud, les Scythes sé-
dentaires habitaient des villages ou des villes. Les vestiges de diverses vastes agglomérations ont été explorés. Le village de Kamenskoïe (auj.
Dnieprodzerjinsk), près de Nikopol, sur le Dniepr, comportait surtout, derrière un rempart de terre, des maisons ovales de bois et d’argile. Neapolis (près de Simferopol, Crimée), capitale des Scythes royaux (IIIe s.), comportait des édifices publics de pierre, et on y pratiquait l’artisanat : les témoignages de l’adoption d’une partie de la civilisation grecque coexistent avec l’atta-
chement traditionnel à la chasse et à la nourriture carnée. Les viandes étaient cuites en ragoût dans des chaudrons.
Le koumiss était déjà très apprécié.
À Pazyryk, le costume était com-
posé de pantalons et de tuniques de cuir, dont la coupe pratique supportait de somptueuses broderies. Les bottes étaient de rigueur. Ainsi, ces peuples, que leur nomadisme ou leurs traditions nomades incitaient à s’encombrer le moins possible, plaçaient leur richesse dans leurs atours et leurs équipements.
Primitifs, ils étaient très superstitieux. Leurs sorciers pratiquaient la magie, leurs devins, probablement eunuques, prédisaient l’avenir. La principale divinité figurée sur les objets d’art
— Tabiti, déesse du feu et peut-être des animaux — était déjà honorée en Russie du Sud avant leur venue. La Grande Déesse était également adorée. Il n’y avait ni autels, ni temples, ni lieux de culte consacrés, mais les sacrifices humains n’étaient pas rares. Les manifestations religieuses proprement dites semblent éclipsées par les honneurs rendus aux morts : les enterrements de chefs, décrits par Hérodote, étaient des cérémonies impressionnantes et sanglantes. À la fin de la cérémonie, les participants se droguaient au chanvre indien.
Les Scythes disparurent brutale-
ment de l’histoire ; ils furent remplacés principalement par les Sarmates (IIIe - IIe s.), qui, meilleurs cavaliers (utilisant l’étrier), menacèrent souvent les frontières romaines. Leur art, très voisin de celui des Scythes, s’est attaché à la technique plus clinquante des émaux champlevés. Plus tard encore (Xe s.), l’avènement du christianisme en Russie ne réussit pas à déraciner les traditions païennes qui remontaient à l’époque scythe et qui, comme le style animalier, se sont conservées longtemps chez les paysans russes.
R. H.
A. L. Mongait, l’Archéologie en U. R. S. S. (en russe, Moscou, 1955 ; trad. fr., Moscou, 1959). /
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séborrhée
Exsudation excessive du sébum par hyperactivité des glandes sébacées.
Par extension ce terme est attribué à divers types morbides dont cette sécré-
tion s’accompagne.