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Dans ce travail de « récupération », les syndicats font preuve de plus ou moins d’autorité. Les dirigeants des syndicats allemands et scandinaves sont peu disposés à pactiser avec l’indiscipline ; les riches caisses de grève dont ils disposent leur fournissent d’ailleurs un moyen de pression. En France, la tendance est tout autre. La Belgique et la Grande-Bretagne sont à mi-chemin. La diversité est telle qu’il est difficile de conclure à l’existence de deux grands types : un syndicalisme d’intégration (Allemagne) et un syndicalisme conflictuel (France).

Une des nouveautés sociales de ce dernier quart de siècle a été la mise en cause du syndicalisme dans les

« pays socialistes », tout au moins dans diverses démocraties populaires : à Berlin-Est en 1953 ; à Poznań et à Budapest en 1956 ; dans les chantiers navals de Pologne en 1970-71. Dans ces divers cas, les travailleurs de la base ont fait grève malgré les syndicats et ont protesté contre la tutelle exercée sur eux par le parti ; certaines revendications tendaient vers l’autogestion.

Mais soit par la répression, comme en Hongrie, soit par une tactique de lente

reprise en main, les syndicats et le parti sont parvenus à rétablir leur autorité au prix de changement d’hommes et de concessions qui n’ont été parfois que passagères.

Autogestion,

nationalisation,

cogestion ?

Comme le syndicalisme de l’Ame-

rican Federation of Labor aux États-Unis, le syndicalisme français de la C. G. T.-F. O., celui de la C. F. T. C.

et celui de la C. G. C. se contentent de travailler dans le régime, sans le combattre ; ces trois organisations se gardent, en général, de prendre des positions politiques, en particulier lors des consultations électorales. Au contraire, la C. G. T. et la C. F. D. T. se proclament, aujourd’hui, ouvertement socialistes. Mais elles ne conçoivent pas ce socialisme de la même manière.

Pour la C. G. T., la socialisation des moyens de production et d’échange doit aboutir à la gestion de l’ensemble de l’économie par l’ensemble des travailleurs. Pour la C. F. D. T., cette socialisation doit comporter à la fois une planification démocratique et l’autogestion. Syndicalistes de la C. G. T.

et syndicalistes de la C. F. D. T. se retrouvent d’accord pour juger insuffisantes les formules de cogestion, dont les syndicalistes allemands ont fait depuis vingt ans leur principale revendication et qui est appliquée dans les mines et les aciéries de la Ruhr.

G. L.

F Conflit collectif du travail / Ouvrière (question) / Professionnelles (organisations) / Syndicat

/ Trade-Unions.

E. Dolléans, Histoire du mouvement ouvrier (A. Colin, 1936-1953 ; 3 vol.). / R. Marjolin, l’Évolution du syndicalisme aux États-Unis, de Washington à Roosevelt (Alcan, 1936). / G. Lefranc, le Syndicalisme dans le monde (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1949 ; 8e éd., 1971) ; les Ex-périences syndicales en France de 1939 à 1950

(Montaigne, 1950) ; les Expériences syndicales internationales des origines à nos jours (Montaigne, 1953) ; le Mouvement syndicat sous la IIIe République de 1871 à 1940 (Payot, 1967) ; le Mouvement syndical de la Libération aux événements de mai-juin 1968 (Payot, 1969) ; Essais sur les problèmes socialistes et syndicaux

(Payot, 1970). / G. Levard, Chances et périls du syndicalisme chrétien (Fayard, 1955). / P. Monatte, Trois Scissions syndicales (Éd. ouvrières, 1958). / L. Rioux, le Syndicalisme (Buchet-Chastel, 1960). / J. Meynaud et A. Salah-Bey, le Syndicalisme africain (Payot, 1963). / G. Adam, la C. F. T. C, 1940-1958 (A. Colin, 1964) ; la C. G. T.-F. O. (Fondation nat. des sciences politiques, 1965). / A. Prost, la C. G. T. à l’époque du Front populaire 1934-1939 (A. Colin, 1964). /

J. D. Reynaud, les Syndicats en France (A. Colin, coll. « U », 1964). / R. Talmy, le Syndicalisme chrétien en France, 1871-1930 (Bloud et Gay, 1966). / J. Bruhat et M. Piolot, Esquisse d’une histoire de la C. G. T. (C. G. T., 1967). / B. Frachon, Au rythme du temps, 1944-1954 (Éd. sociales, 1967) ; Au rythme des jours. Rétrospective sur vingt années de lutte de la C. G. T., 1955-1968

(Éd. sociales, 1968). / A. Barjonet, la C. G. T. Histoire, structure, doctrine (Éd. du Seuil, 1968).

/ H. Dubief, le Syndicalisme révolutionnaire (A. Colin, 1969). / M. Chariot, le Syndicalisme en Grande-Bretagne (A. Colin, 1970). / A. Bergeron, Confédération Force ouvrière (l’Épi, 1971) ; Lettre ouverte à un syndiqué (A. Michel, 1975).

/ G. Caire, les Syndicats ouvriers (P. U. F., 1971).

/ E. Descamps, Militer. Une vie pour un engagement collectif (Fayard, 1971). / T. Lowit, le Syndicalisme de type soviétique (A. Colin, 1971). /

La C. F. D. T. (Éd. du Seuil, 1971). / M. Schiffes, la C. F. D. T. des militants (Stock, 1971). / G. Séguy, le Mai de la C. G. T. (Julliard, 1972). / E. Maire et J. Julliard, la C. F. D. T. aujourd’hui (Éd. du Seuil, 1975). / J. D. Raynaud, les Syndicats en France (Éd. du Seuil, 1975 ; 2 vol.).

Le syndicalisme patronal

jusqu’en 1919

L’histoire du syndicalisme patronal français se situe sur une trajectoire sensiblement différente de celle du syndicalisme ouvrier.

L’édifice constitué par le droit du travail*

se révèle en effet, pendant presque tout le XIXe s., une construction dissymétrique, avantageant les employeurs au détriment des salariés. Les pouvoirs publics couvrent de leur accord tacite les organisations patronales pourtant prohibées en droit par la législation révolutionnaire (v. professionnelles [organisations]), et, s’il faut attendre 1884 pourvoir le premier syndicalisme ouvrier officiel, le « syndicalisme » patronal voit le jour, lui, à une période bien anté-

rieure et pour des mobiles d’ailleurs diffé-

rents, même s’il se dissimule derrière une étiquette semblable.

Le syndicalisme patronal apparaît une nécessité du jour où les employeurs prennent conscience que seul leur groupement permet logiquement d’atteindre un certain nombre d’objectifs : la protection douanière et les questions fiscales, notamment, postulent un regroupement des chefs d’entreprise pour dialoguer avec l’Administration dans de meilleures conditions. Le syndicalisme patronal tend, avant tout, à constituer un groupe* de pression en vue d’atteindre des objectifs globaux de politique économique.

D’assez nombreuses associations patronales se forment ainsi dès la première révolution industrielle, notamment dans trois secteurs, la métallurgie, le textile et les mines, pour lutter contre certains agissements des pouvoirs publics jugés dangereux par les manufacturiers : le Comité des filateurs de Lille, formé en 1824 (une sorte de cartel, d’ailleurs, plus qu’un syndicat), qui tend à imposer ses conditions au marché et également au monde des travailleurs ; le Comité des industriels de l’Est, formé à Mulhouse en 1835, qui réunit des industriels du textile ayant un objectif précis : le maintien des droits de douane sur les fils et les tissus de coton ; un Comité des intérêts métallurgiques, formé en 1840, qui comprend cinq membres, parmi lesquels Schneider (du Creusot), Jules Hochet (de Fourchambault), Denis Benoist d’Azy (d’Alais), tous trois représentants des grandes entreprises ; une Union des constructeurs de machines (1840), où l’on trouve Schneider au côté de Cail, tous deux constructeurs des premières locomotives françaises ; le Comité des houillères françaises, formé également vers 1840 ; l’Association pour la défense du travail national (1846), qui tend essentiellement à s’opposer à l’irruption des marchandises étrangères sur notre territoire.

En 1864, le grand patronat crée le Comité des Forges, dont l’existence est déclarée le 15 février. Il comprend dix membres, représentant l’industrie lourde : notamment Benoist d’Azy pour le Gard, Hamoir pour la Sambre, Hochet pour le Berry, Schneider pour le Creusot et Wendel pour la sidérurgie de l’Est.