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Yūsuf Khass Hadjib. L’histoire politique des Karakhānides est marquée : par l’entrée victorieuse d’Arslān Ilek Nāṣar à Boukhara en 999 et la fin subséquente de la dynastie sāmānide ; par les bonnes relations entretenues avec les Rhaznévides, puis par la rupture avec eux ; enfin par le conflit qui éclate entre eux et les Seldjoukides, leur fait perdre la Transoxiane en 1089 et les refoule sur l’Ili et la Kachgarie, où ils se maintiennent jusqu’à l’arrivée de Mongols non musulmans, les Khitans (fondation de l’empire des Khitay noirs

[Kara Kitay] vers 1140).

La poussée turque vers la

Méditerranée

La vaste confédération des Oghouz, d’où est issue la majeure partie des grandes monarchies turques, apparaît tout d’abord au nord de l’actuelle Mongolie sous forme de neuf tribus réunies (les neuf Oghouz ou Tokuz Oğuz).

Au Xe s., le Ḥudūd al-‘ālam, géographie persane anonyme, situe ces tribus au nord du lac Balkhach. Au cours

du XIe s., alors qu’elles semblent déjà être au nombre de douze tribus confé-

dérées, on assiste à plusieurs de leurs mouvements migrateurs, d’ailleurs

assez désordonnés. Nous avons déjà dit comment certains Oghouz, poussés par les Qiptchaqs ou les devançant, se dirigèrent vers les Balkans, où ils se firent massacrer en 1065. D’autres eurent une fortune autrement plus heureuse. Le clan oghouz des Qiniq (Kınık), dirigé par la famille des Seldjoukides*, était venu s’établir avant 985 sur les rives du Syr-Daria, où il avait mené des opérations plus ou moins obscures. Engagés dans les intrigues politico-religieuses du monde musulman, les Seldjoukides optent pour l’orthodoxie (sunnisme), s’allient avec le calife, dont ils se font un protecteur. En 1040, ils se heurtent aux Rhaznévides à Dandānqān (Danda-nakan), près de Merv (auj. Mary), les défont, s’emparent de l’Iran, de l’Iraq, de la Syrie et, en 1071, ils écrasent les Byzantins à la bataille de Mantzikert (auj. Malazgirt), ce qui leur permet d’occuper la majeure partie de l’Asie mineure. Derrière eux, une masse de tribus turques se ruent sur les frontières de l’islām. Les Grands Seldjoukides, peu soucieux de ces arrivées répétées

de peuples peu civilisés, les envoient s’entasser dans le véritable cul-de-sac qu’est l’Anatolie, encore fortement verrouillée par Byzance : ainsi, peu à peu se constitue le pays qui portera et porte encore le nom de Turquie.

Ce n’est pas aux Seldjoukides, mais à leurs successeurs dans l’ouest de la Turquie, les Ottomans*, Oghouz de

la tribu Kayı, qu’est réservé le destin de prendre Constantinople (1453).

L’Empire ottoman, la principale puissance européenne et orientale aux XVe et XVIe s., englobe, au temps de sa plus grande extension, tout le bassin de la mer Noire, les Balkans, l’Europe centrale jusqu’à Buda, le Proche-Orient arabe, l’Égypte et les côtes du Maghreb jusqu’aux frontières marocaines. Les Turcs des Balkans (qu’il ne faut pas confondre avec des autochtones islamisés tels que les Bosniaques ou les Albanais) sont le résidu des colons installés par les Ottomans en Europe. Par suite des échanges de population qui eurent lieu au XXe s. entre la Grèce et la Turquie* ainsi que du rapatriement de nombreux Turcs de Bulgarie, leur nombre n’a pas cessé de décroître.

La domination ottomane, établie sur la vallée du Nil au XVIe s., ne met pas en contact pour la première fois Turcs et Égyptiens. Nous avons vu que, dès le IXe s., ibn Ṭūlūn, un Turc de Sāmarrā, avait fondé sa propre dynastie au

Caire. Plus tard, les Ayyūbides*, formés en Syrie par le célèbre Saladin*, s’étaient emparés de l’Égypte, où ils avaient amené leurs mercenaires, Turcs et Circassiens. En 1249, tandis que les croisés ont débarqué en Égypte, ceux-ci se révoltent, assassinent leur maître et s’installent à sa place (dynasties mameloukes). Malgré leur arabisation partielle, les Mamelouks* montrent, ne serait-ce que par leurs noms, qui sont souvent de type totémique (noms d’animaux), qu’ils ont conservé bien des traditions des plaines qiptchaqs, dont ils sont en majorité originaires.

Les Khārezmchāh

La mort du dernier Grand Seldjou-

kide, Sandjar (1157), décédé sans successeurs, laisse la place vacante dans l’Iran oriental. Celle-ci est prise par

une dynastie turque connue sous le nom de Khārezmchāh. De leur capitale, Khiva, les Khārezmchāh parviennent vite à diriger de vastes territoires : entre 1181 et 1194, ils occupent tout le Khorāsān, puis Rey (Rayy), Hamadhān et l’Iraq ‘adjamī. Sous le règne de

‘Alā’ al-Dīn Muḥammad (1200-1220), la conquête de l’actuel Afghānistān et de la Transoxiane fait atteindre à l’Empire son apogée. Le simple titre de chāh porté par les souverains montre à quel point cet Empire turc, comme tous ceux de l’Iran, fut iranisé.

Les Turcs à l’époque de

l’hégémonie mongole

Le début du XIIIe s. voit l’installation dans toute l’Asie du gigantesque empire mongol de Gengis khān*. Bien

que les tribus et les royaumes turcs, modestes ou puissants, soient parmi les premières victimes du grand conqué-

rant, le turquisme, en définitive, se trouve renforcé par son action. Non seulement les Mongols illettrés et sans haut niveau de culture se mettent à l’école des Ouïgours, non seulement des masses de soldats turcs viennent renforcer leurs rangs, mais encore les vieilles traditions des steppes, qu’une islamisation sans cesse plus poussée conduisait à l’oubli, se trouvent pour un temps renforcées. Certes, en Chine, les Gengiskhānides se siniseront et, en Iran, ils s’iraniseront. Par contre, dans le khānat de Djaghataï et dans celui de Qiptchaq, ils se turquiseront. C’est à cette époque que commence la coutume de nommer Tatars (ou Tartares) tous les nomades et en particulier tous les Turcs qui ne relèvent pas de l’Empire ottoman.

La Horde d’Or

En 1222, les généraux de Gengis khān, après avoir taillé en pièces les Géorgiens, descendent dans les steppes du nord du Caucase. Ils dispersent la coalition conduite par les Alains et se jettent à la poursuite des Qiptchaqs, downloadModeText.vue.download 611 sur 631

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 19

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sans doute alors en voie de se christianiser. Ceux-ci font appel aux Russes : les princes de Kiev, de Smolensk, de Galitch, de Tchernigov descendent le Dniepr, mais sont repoussés près de la Kalka. Djūtchī (Djötchi), fils aîné de Gengis khān, reçoit en apanage

les territoires, conquis ou non, situés à l’ouest de l’Irtych. En 1236, son fils Bātū khān détruit le royaume des Bulgares de la Kama, puis soumet définitivement les Qiptchaqs : une partie de ceux-ci (40 000 familles) émigré en Hongrie et se christianise. Entre 1237

et 1241, il se tourne contre les Russes, alors divisés en petits États indépendants les uns des autres. Riazan, Ko-lomna, Moscou, Souzdal, Vladimir

sont prises et dévastées. Bātū attaque l’Ukraine : Tchernigov et Kiev. Il entre en Pologne, en Silésie, en Hongrie et en Roumanie. Certes, les Mongols ne gardent pas tous les territoires qu’ils ravagent, mais ils sont les maîtres de la steppe de l’Europe sud-orientale, les suzerains, pour deux cents ans, des princes de Russie. Les Mongols ? En fait, non. Les successeurs de Bātū, les chefs d’armée, se turquisent au contact de leurs soldats, en grande majorité de langue turque, et se posent en successeurs des Qiptchaqs. Ils seront dési-gnés comme khāns du Qiptchaq ou de la Horde d’Or. Plus à l’est, sur la rive droite du Syr-Daria, un frère de Bātū

fonde en même temps que celui-ci un khānat de moindre conséquence, la

Horde Blanche, tout aussi turque que la Horde d’Or.

Le khānat de Djaghataï

Le deuxième fils de Gengis khān, Djaghataï, empereur de 1227 à 1242, avait reçu en héritage l’Issyk-Koul, le Talas, la Kachgarie et la Transoxiane, en somme ce que nous nommerons plus