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tard les deux Turkestans. Dans ces ré-

gions bien plus qu’ailleurs, les hommes restent attachés à la vie de la steppe, incapables de se fixer et de promouvoir l’organisation d’un État. Le khānat de Djaghataï est donc une formation instable, dans laquelle l’élément mongol se perd rapidement dans la masse turco-iranienne. Le nom de Djaghataï lui-même finit par prendre une acception turque et sert à désigner non seulement le pays, mais aussi la langue turque

dominante qu’on y parle. Le khānat n’est d’ailleurs pas plus durable que les autres royaumes gengiskhānides et il s’effondre rapidement.

L’Empire tīmūride

Il est en pleine dégénérescence quand un Turc de la région de Samarkand, Tīmūr Lang* (Tamerlan), fait le rêve de reconstituer l’empire de Gengis khān. Soldat de génie, homme d’un

courage inouï et d’une cruauté presque sans pareille, Tīmūr affecte d’être un musulman convaincu, un héros de la guerre sainte, mais le résultat le plus évident des trente années de son activité est l’abaissement de toutes les grandes puissances musulmanes de son époque. Sans doute son orgueil ne lui permet-il pas d’accepter que d’autres hommes de sa race exercent un pouvoir comparable au sien. Tīmūr Lang détruit l’Empire ottoman (1402), qui se relèvera, l’Empire turc des Indes, la Horde d’Or. Le démantèlement des Qiptchaqs permet aux Russes de relever la tête et de commencer la constitution de la Russie moderne. Les khānats indépendants de la Russie — le khānat de Crimée, vassalisé par les Ottomans à la fin du XVe s., le khānat de Kazan (1445-1552) et le khānat d’Astrakhan (1466-1556) — seront en butte aux assauts des Russes, et, dès Ivan IV le Terrible, ces deux derniers disparaîtront.

Il était réservé cependant aux descendants de Tīmūr Lang d’effectuer une brillante carrière en Iran même.

Lettrés, humanistes, artistes, férus de science et en particulier d’astronomie (Uluğ Beg), ceux-ci furent les ouvriers inattendus de la grande renaissance à laquelle on a donné le nom de tīmūride.

Les monarchies

turkmènes

Après la disparition de l’Empire

gengiskhānide, deux confédérations de Turcs nomades, de Turkmènes,

s’étaient formées comme États souverains en Turquie orientale et en Iran occidental. Les Karakoyunlu (Gens

du « Mouton Noir », v. 1365) s’étaient installés dans le district arménien de Muş vers 1365, puis avaient pris Mossoul, Sindjār et enfin, en 1388, Tabriz.

Entraînés dans la tourmente tīmūride, ils y avaient survécu. Celle-ci calmée, ils rentrent en possession de Tabriz (1406) et s’emparent de la Perse occidentale et de Bagdad (1410). Quant aux Akkoyunlu (Gens du « Mouton

Blanc »), dont le champ d’action était l’Anatolie orientale à la fin du XIVe s., ils vainquent les Karakoyunlu en 1468

et leur succèdent sur le trône d’Iran.

Uzun Hasan, le prince le plus remarquable, lui donne des structures suffisamment solides pour lui permettre de se maintenir à Tabriz, à Bagdad, à Chirāz, à Soltāniyè, à Ispahan, à Rey (Rayy), dans le Kermān jusqu’en 1502, c’est-à-dire jusqu’à l’avènement des Séfévides*.

Ainsi, malgré des solutions de continuité, l’Iran est à peu près constamment dirigé par des dynasties turques du milieu du XIe s. au début du XVIe.

Pourtant, il ne faut pas s’y tromper : il n’est jamais une sorte de deuxième Turquie. Certes, des éléments ethniques turcs non négligeables se superposent à l’élément iranien. Mais cet élément étranger est à la fois marginal et minoritaire. Quant aux souverains, ils se mettent résolument au service de l’iranisme : chā Ismā‘īl, le fondateur de la dynastie séfévide (1502), en apporte une preuve éclatante. Lui-même turc (ou kurde), il s’appuye

sur les Turkmènes Kızıl Bach chī‘ites pour conquérir le pouvoir et édifier un Iran uni, national et chī‘ite, libéré des Arabes, des Turcs et des Mongols. Plus tard encore, Nādir Chāh (1736-1747), le dernier grand conquérant de l’Asie, appelé à exercer sa dictature sur l’Iran et à porter le fer jusqu’à Dehli, est un aventurier de la tribu des Afchārs, Turcs nomadisant entre le Khorāsān et le Fārs. Et c’est encore une tribu turkmène, celle des Qādjārs, qui fonde l’avant-dernière dynastie de l’Iran (1796-1925).

Bābur (Bāber)

Peu de personnalités au monde font preuve de telles qualités et s’imposent plus vivement par leurs talents que Bābur (1483-1530), le plus grand

écrivain de langue turque djaghataï, le fondateur de l’empire des Grands Moghols* en Inde. Exceptionnellement

doué pour tout, cet homme est né en 1483 d’une famille doublement noble, puisque issue en droite ligne de Tīmūr Lang et comptant Gengis khān dans

ses ancêtres par les femmes. Orphelin à onze ans, il a une jeunesse difficile et épuise une partie de ses premières années à essayer en vain de s’installer à Samarkand, qu’il considère comme son patrimoine et que les Ouzbeks lui disputent. En 1504, il se résout à aller chercher fortune ailleurs et s’installe à Kaboul. En 1522, il réussit à s’emparer de Kandahar. En 1525, il s’avance profondément dans l’Inde. En 1526, il fait son entrée dans Delhi. Ainsi se trouve constitué l’empire des Indes, empire dit « des Grands Moghols », car Bābur, comme son ancêtre Tīmūr Lang, rêve de reconstituer l’oeuvre gengiskhānide, mais Empire turc, instauré par des Turcs et dans lequel l’élément mongol est rigoureusement absent. Empire aussi que les successeurs de Bābur agrandiront jusqu’aux limites de l’Inde et que la reine Victoria recueillera.

Le Turkestan après

Tamerlan

Un petit-fils de Gengis khān, Chaybān (Cheïban), avait reçu en apanage les territoires situés à l’ouest et au sud-ouest de l’Oural. Quand, vers 1380, Tugtamich, khān de la Horde Blanche, restaure l’autorité du khān de Qiptchaq sur la Russie méridionale, les Chaybānides occupent les territoires situés entre le lac Balkhach et la Caspienne. Ces hordes prennent alors le nom d’Ouzbeks (Özbeks). Au début du XVIe s., Muḥammad Chaybānī († 1510), roi d’Ouzbékistan, par la conquête de la Transoxiane, du Khārezm, du

Khorāsān, du Fergana, reconstitue

un véritable empire, dont les limites sont, d’un côté, l’Iran et, de l’autre, le pays des Kirghiz. L’éternelle histoire de la ruée des peuples d’Asie centrale sur le plateau iranien va-t-elle recommencer ? Près de Merv, le 2 décembre 1510, le Chaybānide se heurte au Séfé-

vide et se fait battre par lui. L’affaire a un retentissement énorme : l’Iranien vainc le Turc ! le sédentaire a raison du nomade ! Les temps ont définitivement changé.

L’Empire ouzbek commence à

décliner. Sa ruine est consommée en 1599. Le Turkestan est partagé en plusieurs khānats, comme l’a été auparavant la Horde d’Or, et le destin de chacun d’eux va être le même. Le khānat de Khiva dure de 1512 à 1920, mais doit reconnaître en 1873 la domination russe. Celui de Kokand est annexé par les tsars en 1876. Celui de Boukhara l’est en 1868. Il survit comme un protectorat jusqu’à l’avènement du régime soviétique en 1920.

Bien avant ces dates, les Turco-Mongols de Sibérie avaient eu, eux aussi, affaire aux Russes. Dès 1556, Ivan le Terrible intervient contre le khānat de Sibérie, qui survivra jusqu’en

1598. Les Russes fondent en 1586

et en 1587 respectivement Tioumen

et Tobolsk, en 1604 Tomsk, en 1628

Krasnoïarsk et en 1652 Irkoutsk. Les lignes de fortification édifiées contre les nomades (« les Tartars ») se déplacent au fur et à mesure de leur avance.

Depuis la fin du XVIe s., les Kazakhs sont organisés en trois hordes qui se downloadModeText.vue.download 612 sur 631

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 19

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reconnaissent vassales de la Russie en 1731, en 1740 et en 1846.

Dans le Turkestan oriental, la maison de Djaghataï se maintint plus