leur général. Après plusieurs semaines d’hésitation, Louis XVI cède aux pressions qui viennent de toutes parts ; le 12 mai, Marie-Antoinette obtient un brevet de duc pour de Guines ; le jour même, Turgot est prié de rendre son portefeuille et de s’éloigner de Versailles ; il quitte la cour sans avoir revu le roi. Son oeuvre économique et financière est rapidement abandonnée par ses successeurs au cours des mois suivants : les corvées et les corporations sont, par exemple, rétablies dès le mois d’août 1776.
Pendant les cinq dernières années
de sa vie, Turgot, aigri ou usé par son échec, ne réalise pas la synthèse ou la mise au point de ses théories économiques ; il consacre son temps à d’autres activités intellectuelles : en particulier, la traduction de poèmes latins. Atteint par la maladie (des calculs au foie), il meurt le 20 mars 1781.
J.-Y. M.
F Limousin / Louis XVI.
F. Alenguy, Turgot, homme privé, homme d’État (Charles-Lavauzelle, 1942). / C. J. Gignoux, Turgot (Fayard, 1945). / E. Faure, la Disgrâce de Turgot, 12 mai 1776 (Gallimard, 1961).
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 19
11196
/ J. Papon, Turgot et le droit au travail dans la première moitié du XIXe s. (thèse, Paris, 1961).
Turin
En ital. TORINO, v. d’Italie, capit. du Piémont* ; 1 200 000 hab. (Turinois).
La géographie
Son rôle important et précoce s’explique par sa position géographique.
Son site primitif sur une basse terrasse proche du confluent du Pô* et de la Doire Ripaire (Dora Riparia) correspond à une situation de carrefour. La plaine piémontaise se réduit ici à un couloir de 12 km de large entre le front des Alpes, les collines morainiques de Rivoli et les collines de Turin, pointe avancée du Montferrat (Monferrato).
Dans le cadre de l’Italie, Turin se trouve pourtant quelque peu excentrée, mais elle a su pallier cet inconvénient par la construction de liaisons commodes, ferroviaires, autoroutières (vers Gênes, Milan, les tunnels du Grand-Saint-Bernard, du Mont-Blanc) et aériennes (aérodrome de Caselle).
Sa vocation industrielle est récente.
Des siècles durant, sa fonction fut d’abord politique et militaire. La politique obstinée des souverains piémontais devait aboutir à faire de Turin la capitale du nouvel État italien (1861).
Pendant cette longue période, la ville se donna les activités d’une capitale politique. La perte de cette fonction, en 1865, fut un coup très rude porté à sa prospérité. Mais, bien vite, l’essor de l’industrie électrique assurait à Turin une énergie abondante et à bas prix, facteur de renouveau. Pardessus tout, la fondation de la Fiat (1899) et sa réussite éclatante dans le domaine automobile allaient redonner à la ville sa richesse.
Les fonctions actuelles sont variées.
Le rôle tertiaire est bien développé grâce à l’administration provinciale et régionale, à l’université, aux banques
(Istituto San Paolo di Torino) et au mouvement touristique. Mais l’industrie l’emporte de loin. Le secteur mécanique est essentiel, avec la construction automobile (plus de 90 p. 100 de la production italienne). La Fiat, qui, en 1969, a absorbé Lancia et pris une participation chez Ferrari, est un énorme organisme produisant des voitures particulières, des véhicules industriels, du matériel ferroviaire, de gros moteurs, des avions. Sa puissance imprègne
toute la vie de la cité, car ses réalisations dans le domaine social et ses nombreuses participations (par exemple, le journal turinois La Stampa lui appartient) rythment le développement urbain. Son chiffre d’affaires pour le seul secteur automobile dépasse 1 500 milliards de lires. Une foule d’industries gravite autour de la Fiat. La fabrication d’accessoires (roulements à billes, de la RIV-SKF), de machines-outils, la carrosserie (Pininfarina et Viberti), le matériel électrique (Philips, Savi-gliano) sont directement dépendants de l’automobile, comme les productions de pneus (Michelin, CEAT, Pirelli), de matières plastiques, de vernis et peintures. Mais les vieilles industries traditionnelles ont été régénérées par ce succès. Si le travail textile est en crise, la confection est florissante, de même que la haute couture, dont Turin est un centre essentiel. Il en va de même pour la fabrication des machines graphiques (Nebiolo), pour l’imprimerie et l’édition (ILTE, UTET), pour la parfumerie (L’Oréal), pour la chocolaterie et la fabrication d’apéritifs (Cinzano).
Ces activités ont suscité de forts mouvements migratoires, dont le
rayon s’étend à toute l’Italie. La ville est passée de 173 000 habitants en 1861 à 720 000 en 1951. Puis, en vingt ans, elle a fait un bond de près de 500 000 personnes, dû, pour plus de la moitié, aux apports migratoires.
Tout cela transforme totalement son visage. L’ancien castrum romain, dans l’immédiate proximité du palais Royal, déroulait son plan quadrangulaire. Les agrandissements ultérieurs se sont faits en conservant ce plan. Le centre actuel, austère et élégant, tend à rassembler les fonctions tertiaires, même si, dans ses immeubles les plus anciens, les immigrés méridionaux s’entassent. Vers
l’est, au-delà du Pô, l’urbanisation de la colline est lente, car les terrains sont chers : c’est un quartier de villas.
Par contre, dans les autres directions, habitations et usines s’étendent. Les industries se sont d’abord installées au nord, le long de la Doire (textiles).
Elles se sont par la suite étendues vers la Stura di Lanzo (mécanique, chimie) et aux abords de l’autoroute de Milan.
L’ouest et le sud de la ville ont fixé nombres d’usines Fiat (notamment les usines Lingotto et Mirafiori). Parallè-
lement, les quartiers d’habitation prolifèrent, vers le sud surtout. Du reste, le mouvement investit toutes les communes alentour (Settimo, Chivasso, Collegno, Rivoli, Grugliasco, Niche-lino, etc.). Une « ceinture » industrielle et urbaine tend à entourer Turin (sauf à l’est), et elle s’épaissit. Cela pose de sérieux problèmes de circulation dans la ville, de transport dans la région à cause des migrations alternantes. Des réalisations hardies se font jour (rocade autoroutière), et l’on essaie de mettre en place des structures nouvelles de gestion (plan intercommunal). Mais, pour l’heure, en dépit de ces problèmes, cette grande cité industrielle a su conserver beaucoup de charme.
E. D.
L’histoire
C’est sur le site, sans doute, de l’ancienne Taurasia, cité du peuple celto-ligure des Taurini, détruite en 218
av. J.-C. par Hannibal, qu’Octave
(Auguste) fonde la colonie romaine Augusta Taurinorum.
Après la chute de l’Empire romain, la cité traverse une période obscure, dont l’histoire retient cependant la personnalité de l’évêque saint Maxime (Ve s.). Capitale d’un duché lombard au VIe s., sous l’occupation carolingienne, elle est confiée à un comte.
Érigée en marche par Bérenger (milieu du Xe s.), elle échoit par mariage, avec ses dépendances de Suse, d’Ivrée et de Pignerol, à la maison de Savoie (1048).
Après le démembrement de la marche, elle lutte pour acquérir une certaine indépendance politique, mais doit définitivement se soumettre à la maison de Savoie en 1280. Inlassablement, celle-
ci va lutter pour consolider son État, l’accroître aux dépens des potentats voisins, puis oeuvrer pour l’unification du Piémont et finalement de l’Italie.
En 1418, sous Amédée VIII, Turin
devient la capitale de la Savoie devenue duché. Ce n’est encore qu’une petite ville, peu différente de l’ancienne cité romaine, mais dont la population va rapidement s’accroître au cours du XVIe s. De grands travaux de fortifications sont terminés en 1566 sous Emmanuel-Philibert Ier (duc de 1553
à 1580) ; la ville se couvre de superbes édifices, qui constituent un très bel ensemble baroque. Victor-Amédée Ier (1630-1637), Charles-Emmanuel II