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(1638-1675) et Victor-Amédée II

(1675-1730), qui prend en 1720 le titre de roi de Piémont-Sardaigne, contribuent à son embellissement. Mais c’est surtout le roi Charles-Emmanuel III (1730-1773) qui y fera preuve de sa magnificence : Montesquieu pourra

glorifier l’oeuvre de ce roi philosophe, qui, selon lui, a fait de Turin « le plus beau village du monde ».

Au cours des conflits qui opposent la Savoie à la France, les princes sa-voyards jouent le plus souvent la carte autrichienne ou espagnole ; son rôle de « portier des Alpes » vaut à la ville nombre de vicissitudes. Les Français occupent Turin de 1536 à 1562 et l’as-siègent à deux reprises, en 1640 puis, au cours de la guerre de la Succession d’Espagne, en 1706. Encerclée de mai à septembre et soumise à un bombardement intense, la ville n’est délivrée qu’après la victoire du Prince Eugène sur Philippe d’Orléans (7 sept. 1706).

Elle est conquise de nouveau en 1798 ; elle est annexée à la France par Bonaparte qui en fait, de 1802 à 1814, le chef-lieu du département français du Pô. En 1814, elle revient à la maison de Savoie et, durant toute la première moitié du XIXe s., elle joue un rôle important dans le mouvement du Risorgi-mento*, qui contribue à la réalisation de l’unité italienne ; en 1861, elle devient la capitale du nouveau royaume d’Italie.

Mais elle ne le reste pas longtemps et, en 1865, elle perd son rang de capitale au profit de Florence, où réside-

ront les rois d’Italie avant la prise de Rome. Les 26 et 28 janvier 1859 et le 24 mars 1860, deux importants traités sont signés à Turin entre Victor-Emmanuel II et Napoléon III, promettant puis cédant à la France, en échange de son aide militaire contre l’Autriche, la Savoie et Nice.

Si la capitale du Piémont voit son rôle politique décliner, son importance économique, par contre, ne cesse de s’affirmer. Turin devient le deuxième centre industriel de l’Italie, ce qui explique l’intensité des bombardements alliés durant la Seconde Guerre mondiale, bombardements qui occasionnent de terribles destructions.

Turin est aussi une capitale culturelle et idéologique. À la fin du XIXe s., le mouvement socialiste italien s’y développe ; quant au jeune parti communiste, il aura comme fondateurs

deux intellectuels sardes, anciens étudiants à l’université de Turin, Antonio Gramsci* et Palmiro Togliatti.

P. R. et M. V.

F Piémont / Savoie.

L. Cibrario, Storia di Torino (Turin, 1845-46 ; 2 vol.). / C. Promis, Storia dell’antica Torino (Turin, 1869). / D. Gribaudi, Piemonte e Val d’Aosta (Turin, 1960 ; 2e éd., 1966). / P. Gabert, Turin, ville industrielle (P. U. F., 1964).

L’art à Turin et dans le

Piémont

Au coeur d’une région dont le riche patrimoine artistique est le legs de toutes les époques, Turin a mis longtemps à affirmer sa suprématie. La porte Palatine, porte fortifiée de l’enceinte d’Auguste, y témoigne downloadModeText.vue.download 616 sur 631

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 19

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du passé romain, comme l’arc de triomphe de Suse et celui d’Aoste. Constituant aujourd’hui la partie orientale du palazzo Madama, l’ancienne maison forte des marquis de Montferrat, du XIIIe s., agrandie au XVe par la maison de Savoie, est à Turin

le seul exemple notable d’un art médié-

val dont le Piémont atteste au contraire la fécondité. La période préromane est représentée par les baptistères de Biella et d’Asti ; l’art roman, d’inspiration lombarde, par la cathédrale d’Ivrée (Ivrea), la Sacra di San Michele sur son piton alpestre, près de Sant’ Ambrogio di Torino, Sant’ Evasio de Casale Monferrato, l’abbaye Santa Maria di Vezzolano, dans la province d’Asti, etc.

Expérimentée au XIIIe s. à l’abbaye cister-cienne de Staffarda, l’architecture gothique triomphe ensuite dans une version régionale, que caractérisent les portails à gables aigus, les motifs ornementaux en brique et dont les principaux exemples sont les cathédrales d’Asti, de Chieri et l’abbaye Sant’ Antonio di Ranverso à But-tigliera Alta. C’est aussi l’époque de nombreux châteaux puissamment fortifiés (Verres, Verzuolo), mais ornés souvent de peintures dont les sujets et le style élégant sont ceux du gothique « courtois » (Fenis, la Manta, près de Saluzzo) ; les fresques d’Issogne (XVe s.), comme celles qui ont été peintes par Giacomo Jaquerio (v. 1375-1453) à Sant’ Antonio di Ranverso (1430), mêlent un réalisme savoureux au langage traditionnel.

La Renaissance apparaît à Turin vers 1495 avec la cathédrale, dont la façade sobre et les portails délicatement sculptés sont d’inspiration toscane. Mais la fin du XVe s. et la première moitié du XVIe ont vu surtout le développement de l’école piémontaise de peinture, ouverte à des influences nordiques et peu prompte à assimiler les nouveautés de l’Italie centrale et de la Lombardie. Les principaux maîtres de cette école sont Macrino d’Alba (v. 1470-1528), Giovanni Martino Spanzotti (v. 1455-1528), Defendente Ferrari (attesté de 1501 à 1535), aux couleurs intenses, à l’écriture apparentée à celle de Dürer*, puis Gaudenzio Ferrari (v. 1475-1546), plus moderne, auteur habile et séduisant de la Madonna degli Aranci, tableau d’autel de San Cristoforo de Verceil (Vercelli), et de fresques dans la même église ainsi qu’à Varallo, dans les chapelles du Sacro Monte.

C’est à partir de la fin du XVIe s. et pendant toute la période baroque*, avec l’essor de la maison de Savoie, que Turin joue vraiment son rôle de capitale artistique.

L’architecture et l’urbanisme ont la primauté. Ascanio Vittozzi (ou Vitozzi, 1539-1615), à qui revient la conception du vaste sanctuaire à plan central de Vicoforte, près

de Mondovi, puis Carlo di Castellamonte (1560-1641) dessinent rues et places monumentales, et ordonnent la ville selon un plan en damier. La régente Christine de France fait élever à partir de 1633 le châ-

teau du Valentino, d’influence française ; Amedeo di Castellamonte (1610-1683), fils de Carlo, commence en 1646 le palais Ducal, devenu palais Royal, d’architecture sobre, et construit plusieurs des nombreux palais privés qui contribuent à la magnificence baroque de Turin. Puis Guarino Guarini* (1624-1683) apporte un style original et mouvementé : San Lorenzo, son chef-d’oeuvre (1668-1679), exprime un jeu savant de volumes et de lignes courbes qui culmine avec la coupole aux arcs entrecroisés, analogue à celle de la chapelle du Saint-Suaire à la cathédrale. Au dynamisme des courbes, le palais Carignano associe l’utilisation décorative de la brique. Le collège des Nobles, plus sévère, abrite aujourd’hui le musée des Antiquités, dont la section égyptienne est remarquable, et la Galleria Sabauda, où l’école piémontaise voisine avec de beaux tableaux d’autres écoles italiennes et européennes.

Au début du XVIIIe s., l’essor architectural est conduit par Filippo Juvara* (1678-1736), dont le baroque tempéré allie à la grandeur le mouvement et l’élégance. On doit à cet artiste plusieurs églises, notamment celle de Superga, au-dessus de la ville, la rénovation du palazzo Madama, et aussi la conception originale du château de chasse de Stupinigi. Le grand continuateur de Juvara est Benedetto Alfieri (1700-1767), qui achève Stupinigi, remanie le palais Royal et la place en rotonde de Venaria Reale, élève à Alexandrie (Alessandria) le palais occupé aujourd’hui par la préfecture (1730).

Après le Lombard Andrea Pozzo (1642-1709), qui décore en 1679 les voûtes de la chiesa della Missione, à Mondovi, avec sa science habituelle de la perspective, d’habiles peintres travailleront au XVIIIe s. dans les palais : à Stupinigi, les frères Domenico († v. 1771) et Giuseppe († 1761) Valeriani, de Bologne, le Vénitien Giambattista Cro-sato (1685-1758), le Français Carle Van Loo* ; au palais Royal et à l’Armeria Reale, Claude François Beaumont (1694-1766).