(Bakounine).
Des essais nombreux furent tentés, que ce soit par Paul Robin à Cempuis de 1880 à 1894, par Francisco Ferrer Guardia (1859-1909) avec son essai d’École moderne à Barcelone, par Sé-
bastien Faure à La Ruche près de Ram-bouillet, de 1904 à 1917.
L’anarchisme et l’école
y Appel de Francisco Ferrer Guardia, signé
« La Escuela Moderna, Barcelone » et publié dans les Temps nouveaux, 26 janvier 1902 :
« ... L’arithmétique est un des plus puissants moyens d’inculquer aux enfants les idées fausses du système capitaliste [...]
L’École Moderne de Barcelone fait appel à ceux des amis de l’enseignement rationnel et scientifique qui s’occupent spécialement de mathématiques pour la composition d’un recueil de problèmes faciles, vraiment pratiques, dans lesquels il ne serait absolument pas question d’argent, ni d’épargne, ni de bénéfices. Les exercices devraient porter sur la production agricole et manufacturière, sur la bonne répartition des matières premières et des objets fabriqués, sur les moyens de communication et de transport des marchandises, sur le travail humain comparé au travail mécanique et les avantages des machines, sur les travaux publics, etc. »
y Travaux demandés à des élèves de l’enseignement primaire par l’instituteur Émile Caffin (1858-1936), qui exerça — non sans incidents — dans l’Oise et dans la Seine : Samedi 25 juin 1921
Copie
Ce n’est pas encore l’heure.
Tant que le peuple ne verra pas clairement, aussi clairement qu’il voit que 2 bâ-
tons posés à côté de 3 bâtons font 5 bâ-
tons, tant qu’il ne verra pas, dis-je, cette
vérité que les journaux qu’il lit le plus, Petit Parisien, Petit Journal, n’ont qu’un but : le tromper, l’amuser niaisement pour l’exploiter, le Capital n’aura rien à craindre.
Il faut qu’une révolution, c’est-à-dire une transformation, soit mûre dans les esprits pour qu’elle puisse devenir une réalité.
Écriture
La paix ne se fera que par la vérité.
On peut être un héros sans ravager la terre.
L’histoire enseigne qu’autrefois on mettait les voleurs en croix. Aujourd’hui, les temps sont meilleurs : on met les croix sur les voleurs.
Conjugaison
Je débarque le monarque.
L’action antimilitariste :
l’Association internationale
antimilitariste
Les anarchistes se refusent à la guerre, qui, pour eux, n’a pour objet que de défendre non le patrimoine commun des hommes d’une même nation, mais les privilèges de la minorité qui détient le pouvoir.
Les anarchistes sont donc antimilitaristes, et c’est ainsi que se constitua, à l’issue du congrès anarchiste international d’Amsterdam (août 1907), l’Association internationale antimilitariste. Déposée par Malatesta, signée avec lui par C. Cornelissen, F. Domela Nieuwenhuis, R. de Marmande, Ramus, Thonar, la motion suivante y fut votée le 30 août : « Les anarchistes
[...] engagent leurs camarades — et en général tous les hommes aspirant à la liberté — à lutter selon les circonstances et leur tempérament, et par tous les moyens, à la révolte individuelle, au refus du service isolé ou collectif, à la désobéissance passive et active et à la grève militaire — pour la destruction radicale des instruments de domination.
« Ils expriment l’espoir que les peuples intéressés répondront à toute déclaration de guerre par l’insurrection.
« Ils déclarent penser que les anarchistes donneront l’exemple et seront suivis. »
Propagande
antimilitariste
Le IVe congrès de la Federación Obrera Régional Argentina (1904) décide la création d’un « Fonds du soldat » destiné à aider les déserteurs et à assurer la défense de ceux qui sont condamnés pour propagande antimilitariste. Le congrès adopte la motion : « Considérant que le militarisme est le fléau de la classe travailleuse et le défenseur du capital et donc la cause de tout l’échec des grèves, les participants décident la formation d’une commission chargée d’entrer en contact et de nouer des accords avec toutes les ligues antimilitaristes du monde. »
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 2
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L’action syndicale
y En France. Dans la plupart des pays, les anarchistes ont privilégié l’action syndicale. La France en fournit un bon exemple. En effet, après avoir considéré le mouvement syndical avec méfiance, parfois même avec hostilité, les anarchistes y ont déployé une grande activité au lendemain de la flambée terroriste des années 1892-1894, marquée par les attentats de Ravachol, Vaillant, Henry, Caserio.
On retiendra tout particulièrement les noms de Fernand Pelloutier, secré-
taire de la Fédération des Bourses du travail de 1895 à sa mort (1901), et d’Émile Pouget, secrétaire adjoint de la C. G. T. et responsable de son journal la Voix du peuple de 1900 à 1909.
Cependant ce n’est pas sans inquié-
tude, parfois, que certains militants et théoriciens libertaires virent les compagnons consacrer toutes leurs forces à un mouvement qui n’était à leurs yeux qu’un moyen, et non une fin. Et c’est ainsi qu’au congrès anarchiste international, tenu à Amsterdam en août 1907, on vit E. Malatesta, s’opposant à Pierre Monatte, fixer avec fermeté les limites
qui, selon lui, étaient celles du mouvement syndical :
« [...] Encore une fois, l’organisation ouvrière, la grève, la grève générale, l’action directe, le boycottage, le sabotage et l’insurrection armée ellemême, ce ne sont là que des moyens.
L’anarchie est le but. La révolution anarchiste que nous voulons dépasse de beaucoup les intérêts d’une classe : elle se propose la libération complète de l’humanité actuellement asservie, au triple point de vue économique, politique et moral. Gardons-nous donc de tout moyen d’action unilatéral et simpliste. Le syndicalisme, moyen d’action excellent à raison des forces ouvrières qu’il met à notre disposition, ne peut pas être notre unique moyen.
Encore moins doit-il nous faire perdre de vue le seul but qui vaille un effort : l’anarchie ! »
y En Italie. L’Italie du début du siècle voit refleurir l’anarchisme à travers le syndicalisme révolutionnaire. Réaction au réformisme en vigueur dans le parti socialiste, influence de Georges Sorel sur Arturo Labriola, Enrico Leone, E. C. Lon-gobardi, apparition surtout de nouvelles couches de travailleurs en sont les principales causes. La grève générale des 16-20 septembre 1904, avec occupations d’usines et création de conseils ouvriers, révèle les vertus de l’action directe. À l’inté-
rieur de la C. G. T., créée en 1906, Alceste De Ambris constitue la fraction « l’Action directe », qui compte 200 000 adhérents (1907). Mais la grève insurrectionnelle de Parme de juin 1908, nullement soutenue par la C. G. T., est écrasée par les forces de l’ordre. Au congrès de Bologne (1910), « l’Action directe » compte encore 150 000 adhérents. Tandis que certains intellectuels comme Arturo Labriola se rallient à la conquête coloniale, « l’Action directe » mène campagne contre la guerre de Libye (1911) et se transforme en 1912
en « Union syndicale italienne » :
« Le prolétariat n’obtiendra que ce qu’il saura conquérir », proclame Alceste De Ambris. Au congrès de Milan (1913), où sont représentés
100 000 adhérents, Armando Borghi fait adopter une motion en faveur de la grève générale, qui sera mise en oeuvre, dès l’année suivante, à l’occasion de la « semaine rouge » d’An-cône. Mais le mouvement se divise sur la question de la guerre : tandis que les partisans de l’intervention font scission, avec De Ambris, pour fonder l’Union italienne du travail, les internationalistes, groupés autour d’Armando Borghi, feront campagne contre la guerre, souvent au prix de leur liberté.