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en 37 ; Antoine fournit des navires à Octave ; ce dernier laisse 20 000 soldats pour la guerre d’Orient. Ils en profitent pour renouveler pour cinq ans le triumvirat, qui était légalement arrivé à expiration le 1er janvier 37.

Le 3 septembre 36, à Nauloque,

dans un combat naval, Sextus Pom-pée est battu ; venu d’Afrique, Lépide débarque en Sicile et en prend possession. Cette mainmise est un danger pour les buts qu’Octave s’est assignés.

Quand Lépide veut garder la Sicile, il la lui refuse et passe avec ses troupes dans l’île ; Lépide est abandonné par ses légions et doit s’incliner ; il perd le titre de triumvir et toutes ses possessions. Octave tient désormais l’Occident tout entier. Le 13 novembre 36, il fait une entrée triomphale dans Rome.

Avec une habileté politique consommée, il réalise alors l’unité morale de cette moitié du monde romain autour de sa personne. Il se présente déjà en conciliateur et en homme respectueux de la tradition. Il fait brûler les actes concernant la guerre civile, il abolit le tribut et supprime le banditisme en Italie par des mesures rigoureuses, il distribue des terres vacantes en Campanie à ses vétérans, il fait reprendre les grands travaux à Rome. Il entreprend enfin quelques expéditions destinées à stabiliser la situation dans certaines provinces frontières comme l’Illyrie et la Dalmatie, où il fonde des colonies.

Très rapidement, l’opinion lui fournit l’appui dont il a besoin ; de plus, les assemblées populaires et le sénat sont sous son contrôle et lui accordent toujours ce qu’il demande. C’est ainsi qu’il reçoit la puissance tribunicienne à vie et le droit comme César, de porter la couronne de laurier des triompha-teurs. La lutte peut s’engager.

Dès 35, Octave réclame le renvoi de Cléopâtre, qui, auprès d’Antoine, a supplanté Octavie ; Antoine refuse. En réplique, ce dernier demande le rétablissement de l’ancienne Constitution ; la manoeuvre est habile, car elle peut détacher d’Octave les nostalgiques de la république. Mais l’opinion, en Occident, soutient Octave ; c’est la rupture, qui est marquée par un échange de pamphlets violents. Chacun prépare déjà la guerre. En 32, Octave brusque

les choses ; sous la menace de ses soldats, il oblige les consuls et les sénateurs partisans d’Antoine à s’enfuir. Il ordonne au sénat de sommer Antoine de rentrer à Rome et d’y déposer son imperium à l’expiration du triumvirat (probablement le 31 déc. 32). Alors Antoine répudie Octavie ; le geste est symbolique, puisque Octavie est à Rome ; il n’en est pas moins significatif. Pour franchir le pas décisif et s’allier totalement l’Occident, Octave fait ouvrir le testament d’Antoine, conservé chez les Vestales ; sa lecture prouve qu’Antoine fait de Césarion le downloadModeText.vue.download 548 sur 561

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 2

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véritable héritier de César, confirme les concessions territoriales faites à Cléopâtre et demande à être enterré à Alexandrie. La colère est générale dans Rome ; Octave se présente, dès lors, comme le garant des traditions et des vertus du passé face au représentant de l’Orient, qui semble vouloir abandonner Rome et transférer le centre de l’Empire en Égypte. Le sénat abroge les pouvoirs triumviraux d’Antoine (ce qu’il ne reconnaît pas) et lui enlève le consulat, dont il doit être chargé en 31. Il n’y a plus qu’un triumvir ; en effet, Octave n’a pas abdiqué ses pouvoirs discrétionnaires ; le délai de cinq ans est passé, mais les pouvoirs ne peuvent pas expirer avant une renonciation officielle et avant que la mission d’organiser les pouvoirs publics ne soit atteinte ; durant toute la période 31-28, c’est avec ses pouvoirs de triumvir qu’Octave agit (bien qu’il ne se serve plus du titre dans ses titulatures par affectation « républicaine »).

Alors qu’il en a la possibilité maté-

rielle, Antoine ne veut pas débarquer en Italie. Il laisse passer l’hiver, qu’Octave met à profit pour parfaire sa pré-

paration. Au printemps 31, ce dernier prend l’offensive depuis Brindes ; il s’empare des îles de Corcyre (auj. Corfou) et de Leucade, puis des villes de Patras et de Corinthe. Cléopâtre pousse Antoine à livrer combat sur mer ; la flotte d’Octave, commandée par Agrippa, lui semblait moins puissante.

Le combat a lieu le 2 septembre 31 au sortir du golfe d’Ambracie (auj. golfe d’Árta), sous le promontoire d’Actium.

Au milieu de la lutte, de nombreux navires d’Antoine font défection et rejoignent les lignes des partisans d’Octave. Cléopâtre s’enfuit et Antoine la suit. Les restes de leurs flottes rentrent dans le golfe et capitulent avec les lé-

gions. La victoire est décisive, un seul combat a suffi. Sans attendre, Octave réorganise l’Orient ; dans l’été 30, il se trouve devant Alexandrie, où Antoine et Cléopâtre préfèrent la mort à l’humiliation. L’Égypte devient province romaine. Octave ne revient à Rome que dans l’été 29 ; il y célèbre trois triomphes éclatants. Le sort du monde romain est entre ses mains.

Les pouvoirs d’Auguste

L’habileté d’Octave sera de conserver sa position prééminente en assurant un retour aux formes régulières. Durant l’année 28, il décide que les pouvoirs d’exception viendront à expiration à la fin de l’année. Le 13 janvier 27, lors d’une séance solennelle du sénat, Octave vient rendre compte de son action et abdiquer de tous les pouvoirs judiciaires qu’il détient. Il a lui-même déclaré avoir rendu « à la décision du sénat et du peuple romain l’État qui était en son pouvoir ». Les apparences présentent désormais Octave comme un homme à qui des pouvoirs ont été légalement donnés ; c’est le retour à la norme. Mais ces pouvoirs sont bien différents de ceux des anciens magistrats de la République. En effet, dès 28, Octave avait été proclamé princeps senatus, c’est-à-dire le premier des sénateurs ; en 27, il est seulement princeps. Ce n’est pas à proprement parler un titre, mais un qualificatif assez répandu pour désigner les personnages politiquement importants ; de plus, le mot a été mis à l’honneur par Cicéron. La notion est floue, mais elle jouit d’un grand prestige populaire (le peuple a appelé Octave princeps dès son retour d’Actium). Par la magie de ce nom, Octave est moralement au-dessus des autres Romains, et est le garant du respect des droits de chacun de ses concitoyens.

Mais ce ne peut être suffisant ; le

sénat lui décerne le surnom d’Augustus, qui entoure celui qui le porte de ferveur religieuse ; c’est lui donner la primauté dans la possession des auspices et rappeler qu’il est un nouveau fondateur de Rome à l’exemple de Romulus, premier augure de la ville.

Auguste est ainsi enveloppé de tout le prestige sacré d’un fondateur. Il reçoit le droit d’orner sa maison de lauriers et de porter, de façon permanente, la couronne civique, qui souligne l’idée que Rome lui doit sa liberté retrouvée.

C’est cet aspect qui lui donne son auc-toritas (Auguste emploie lui-même le mot dans ses Res gestae, son « testament », résumé de son oeuvre qu’il a légué à la postérité), qui se présente comme une autorité morale supérieure à celle de tous les autres Romains.

Mais cette « autorité » ne reste pas sur le plan moral ; elle peut avoir des effets juridiques et elle permet d’exercer un contrôle sur les affaires publiques. Elle est d’autant plus forte que ses contours sont impossibles à tracer avec précision. Par elle, Auguste a la possibilité d’intervenir dans les domaines les plus divers et de trancher souverainement.

Parallèlement à cette notion impalpable, Auguste peut proclamer qu’il n’a pas de compétence légale (potestas) supérieure à celle de ses collègues magistrats. C’est exact, puisque Auguste reste consul (avec un collègue chaque année) de 31 à 23 ; il reçoit aussi du sénat un imperium proconsulaire sur les provinces frontières, ou qui ne sont pas encore pacifiées ; il possède ainsi la haute main sur les armées stationnées dans ces provinces, appelées maintenant « impériales », et qui sont gouvernées par des sénateurs dépendant directement de lui, les légats. Les autres provinces (les plus anciennes) sont dites « sénatoriales », et leurs gouverneurs ne dépendent, théoriquement, que du sénat.