et de Bunchō Ippitsusai (1725-1794), dont le réalisme reste cependant superficiel, constituent deux sommets de cet art. L’influence de Shunshō
semble s’exercer sur Sharaku*, dont la période d’activité est éphémère (1794-95). On constate chez lui un parti pris d’appuyer les effets avec un réalisme extrême, que désapprouvent les acteurs eux-mêmes, habitués à être plus idéalisés.
Un autre thème majeur traité par les artistes de l’ukiyo-e est le paysage, qui n’atteindra sa perfection qu’au XIXe s.
Hokusai* Katsushika (1760-1849)
rénove l’ukiyo-e en y introduisant le paysage comme genre indépendant, dé-
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 20
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laissant ainsi le monde du théâtre et des quartiers réservés. Les Cent Vues du mont Fuji, chefs-d’oeuvre de la conception de l’espace, où Hokusai restitue avec intensité le dynamisme des élé-
ments naturels, paraissent en 1834-35, au moment où l’artiste paysagiste par excellence, Hiroshige* (1797-1858), évoque dans une vision plus calme, à la fois réaliste et pleine de lyrisme, les Cinquante-Trois Étapes de la route du Tokaido.
Au-delà de ces thèmes essentiels, l’école de l’ukiyo-e s’attache à la représentation de la nature (fleurs, oiseaux, poissons) et à celle de scènes populaires dont les lutteurs sumō et les héros guerriers sont les principaux
sujets.
L’estampe ukiyo-e
Pour répondre à une demande de plus en plus grande de la part d’une clientèle bourgeoise en pleine expansion, les peintres de l’ukiyo-e ont recours à la technique de la xylographie. La peinture, plus intellectuelle, reste attachée à la tradition classique et jouit à l’époque d’Édo d’une considération plus grande que l’estampe. Les mérites esthétiques de l’une et de l’autre se situent dans des domaines différents. Une peinture est une oeuvre unique réalisée par l’artiste seul, alors que l’estampe résulte d’une collaboration entre l’artiste, le graveur, l’imprimeur et l’éditeur.
Le développement de l’estampe
ukiyo-e a connu trois périodes successives. C’est vers 1670 que Moronobu utilise la xylographie pour la diffusion de ses oeuvres. Ce sont d’abord des impressions monochromes à l’encre de Chine (sumi-e), aux contours vigoureux, qu’éclipse encore, pourtant, la richesse de coloris des oeuvres peintes.
Mais, dès le début du XVIIIe s., une nouvelle technique intervient, consistant à rehausser les estampes de couleurs appliquées au pinceau. Peu après, ces estampes, nommées tan-e, donnent naissance aux urushi-e, estampes la-quées où le tan (vermillon) est remplacé par le rose clair, beni, utilisé avec du jaune, du vert, du marron, du violet et additionné parfois de limaille de cuivre. Vers 1740, la technique de la xylographie connaît de nouveaux raffinements avec les premières estampes benizuri-e, tirées en deux couleurs, rose-pourpre et vert bleuté.
À partir de 1765, la découverte de la technique du repérage, qui permet d’imprimer successivement et avec une grande netteté plusieurs couleurs sur une même gravure, ouvre l’âge d’or de l’estampe ukiyo-e. On obtient des oeuvres d’une telle richesse qu’elles sont appelées nishiki-e, « estampes de brocart ». La collaboration entre l’artiste, l’imprimeur et l’éditeur atteint alors une perfection dont on trouve un parfait exemple dans les Huit Scènes de salon d’Harunobu. Au début du XIXe s.,
la technique de l’estampe n’évolue plus en dehors de perfectionnements secondaires, tel le gaufrage.
La révélation de l’art japonais en France, dans la seconde moitié du XIXe s., et l’influence de l’estampe ukiyo-e sur l’art pictural occidental, notamment sur l’école impressionniste*, sont l’un des phénomènes les plus caractéristiques des échanges artistiques entre l’Orient et l’Occident.
L. P.
& C. Vignier et Inada, Estampes japonaises (Bibliothèque d’art et d’archéologie, 1909-1914 ; 5 vol.). / R. D. Lane, Masters of the Japanese Print (Garden City, N. Y., 1962 ; trad. fr. l’Estampe japonaise, Somogy, 1962). / J. R. Hillier, Japanese Colour Print (Londres, 1966).
CATALOGUE D’EXPOSITION. Images du temps qui passe, peintures et estampes d’Ukiyo-e (musée des Arts décoratifs, Paris, 1966).
Ukraine
En russe OUKRAINA, république fédérée de l’U. R. S. S. (Oukrainskaïa S. S. R.).
Capit. Kiev*.
C’est la deuxième république fédé-
rée de l’U. R. S. S. par l’importance économique et la population : 47,1 millions d’habitants (sur une superficie de 604 000 km 2, soit une densité kilomé-
trique de 78). Elle est divisée en trois
« grandes régions économiques » : Donets-Dniepr, Sud-Ouest et Sud.
La géographie
Le pays des terres noires
L’Ukraine est, avant tout, le pays des terres noires (tchernoziom). Ces terres noires recouvrent un socle varié, entaillé par de larges vallées. Elles pré-
sentent un haut coefficient d’humus (80 p. 100) qui diminue vers l’est. Les terres noires correspondent à une zone de climat à étés plus chauds qu’en Bié-
lorussie et en Russie, mais dont le total des précipitations (moins de 800 mm au nord, 500 mm par endroits dans le sud) ne permet pas le développement d’une belle forêt dense. Au nord, l’Ukraine est couverte par la steppe boisée, au sud et dans sa majeure partie par la steppe (step en russe), en fait une
prairie dont les espèces, pour la plupart des graminées, se dressent à la hauteur d’un homme, parfois davantage (artemisia, stipe à plumet, fétuque...). Leurs fleurs au printemps éclosent rapidement, transformant la steppe en une mer, ondulante sous le vent, de couleurs variées. Elles se dessèchent rapidement en été, fournissant ainsi, à l’automne et en hiver, l’humus. Ces terres de couleur sombre comptent théoriquement parmi les plus fertiles du monde : c’est pourquoi elles furent défrichées aux XVIIIe et XIXe s., l’Ukraine devenant l’un des greniers à blé de l’Europe.
Il ne reste guère de steppe à l’état naturel en raison de l’intense colonisation de la région, mais les Ukrainiens conservent, sous la forme d’un parc national, la réserve d’Askania-Nova, où les végétaux et les animaux ont la possibilité de se reproduire. D’autres lambeaux de steppe apparaissent sur les sables sublittoraux et en direction du Don, où le climat devient plus sec.
L’Ukraine n’est cependant pas
qu’une région steppique. Même peu prononcé, le relief apporte un élément de diversité. Une vaste plaine s’étend des bords de la mer Noire au parallèle de Nikopol. Au nord s’élève un plateau (les « hauteurs du Dniepr ») dont l’altitude varie de 200 m à plus de 300 m. La large vallée du Dniepr forme un beau ruban alluvial, parfois marécageux.
Tout au nord, les affluents de la rive droite du Pripiat (Pripet), les marais et la forêt qui leur est liée annoncent les plaines de la Biélorussie.
On distingue de plus des régions bien délimitées. À l’est de la plaine steppique, le bombement du Donets ou du Donbass* correspond à la zone houillère, où les mines sont creusées dans le substratum primaire à peine voilé de dépôts récents : les altitudes dépassent 350 m. Tout au sud, la presqu’île de Crimée, rattachée avant la guerre à la république de Russie, et après à celle d’Ukraine, se compose de deux parties : au nord, une plaine steppique très sèche, parfois marécageuse, reliée au continent par l’isthme de Perekop ; au sud, dominant la mer Noire, les montagnes des iaïla (pâturages d’été) dé-
passent 1 500 m, présentant leur pente
douce vers la steppe, leur pente abrupte au-dessus du littoral.
À l’ouest, les éléments du relief sont plus variés encore. Le Dniestr creuse une vallée profondément encaissée dans les plateaux et collines de Podolie et de Volhynie, qui n’atteignent pas l’altitude de 500 m. Le plateau de Podolie est un fragment de massif ancien recouvert d’une table crayeuse, entaillée par de nombreuses vallées et dominant les marais du nord de l’Ukraine et le bassin de Lvov d’une belle côte (ou cuesta) : les Gologory. La Volhynie est, à ses pieds, une plaine partiellement recouverte de loess où s’est développée la grande culture. La Ruthénie subcarpatique (l’ex-Ruthénie, qui faisait partie de la République tchécoslovaque avant la guerre), seul pays sovié-