Les exploitations, d’un seul tenant, sont louées (et non vendues) par l’État selon des baux à long terme, ce qui prévient leur fragmentation par mutation ou héritage et évite aux agriculteurs une immobilisation importante de capitaux. La demande étant très supé-
rieure à l’offre, les pouvoirs publics ont pu réaliser un choix parmi les postulants : des conditions d’âge, de compétence technique, d’assise financière assurent à l’exploitant un maximum de chances de réussite ; en outre, il béné-
ficie des conseils techniques, agronomiques et commerciaux d’organismes spécialisés.
Les labours occupent la plus grande partie de la surface cultivée, contrairement aux polders antérieurs au XIXe s., dont le drainage peu profond favorisait plutôt les herbages. Cela explique la place tenue dans la production agricole par les céréales (le blé surtout) et les cultures qui leur sont associées comme la betterave à sucre, le colza,
la pomme de terre, les plantes fourragères. Certaines fermes s’adonnent aussi à l’élevage (bovins et porcs) grâce aux cultures fourragères et à des prairies temporaires. La superficie horticole reste modeste malgré l’intérêt d’une utilisation très intensive d’un sol conquis à un coût aussi élevé : mais le marché de ces produits n’est downloadModeText.vue.download 610 sur 635
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 20
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pas indéfiniment extensible et l’on ne pouvait concurrencer trop sévèrement les régions fruitières et maraîchères du vieux pays. Enfin, quelques parcelles ont été boisées, notamment en bordure des lacs de ceinture, afin de rompre la monotonie du paysage et de créer des espaces de loisirs.
Les polders :
habitat et milieu de vie
L’histoire de la poldérisation aux Pays-Bas* montre que l’intérêt des « entrepreneurs » pour l’habitat et le milieu de vie date seulement du XXe s. ; au siècle dernier encore, l’implantation des villages de la « mer de Haarlem »
fut laissée à l’initiative des premiers colons. Avec le Wieringermeer débute la planification dans ce domaine ; outre les fermes construites sur les exploitations, on prévoit trois villages destinés à jouer le rôle de centres de services ; mais trop proches les uns des autres, construits de façon échelonnée pendant la période de mise en valeur, ils remplirent mal les fonctions qui leur avaient été dévolues. Deux conclusions se dégagèrent de cette première expé-
rience : il faut implanter les centres le plus tôt possible lors du processus de colonisation (le tracé des canaux et des routes en dépend d’ailleurs étroitement), et concevoir avec beaucoup de soin leur nombre, leur taille et leur localisation. On doit chercher à mettre le « tertiaire » à faible distance du consommateur : on ne peut se contenter d’assurer à des colons « mentalement urbanisés » le confort domestique auquel ils peuvent prétendre ; il faut encore leur éviter l’isolement dans un
milieu dépourvu de commerces et de services. Mais, par ailleurs, les centres doivent disposer d’une clientèle suffisante pour que la rentabilité des équipements soit assurée, ce qui est difficile dans le contexte d’une densité de population beaucoup plus faible que celle du vieux pays.
Après quelques hésitations, le
schéma adopté pour le polder du Nord-Est (1948) ordonne dix villages autour d’une petite ville centrale, Emmeloord.
En vingt-cinq ans, celle-ci s’est plus dé-
veloppée que prévu puisqu’elle atteint aujourd’hui 13 000 habitants et évite, pour la majeure partie des commerces et des services, le recours aux centres anciens plus éloignés. En revanche, les villages sont trop nombreux, trop petits pour la plupart et desservent une aire d’influence dont les habitants se sont raréfiés à la suite de la mécanisation croissante de l’agriculture. Compte tenu de cette situation et de la diffusion de l’automobile dans une population rurale à niveau de vie relativement élevé, on propose une organisation différente pour le Flevoland-Oriental : toujours une petite ville, Dronten, mais seulement quatre villages, dont le nombre est réduit à deux lors de l’amé-
nagement du polder. En outre, dans l’ouest de celui-ci s’implante la future capitale régionale du pays neuf, Lelystad (du nom de l’ingénieur Cornelis Lely, qui fut à l’origine de la conquête du Zuiderzee), qui compte déjà une dizaine de milliers d’habitants. Pour les polders du sud et de l’ouest, l’existence même de villages est mise en cause : un changement d’optique quant à la destination des terres conquises explique les nouvelles orientations de la politique d’aménagement.
Les nouvelles
utilisations
des polders
Depuis une dizaine d’années, l’idée d’une utilisation purement agricole des polders a été abandonnée ; il est apparu absurde en effet de maintenir un semi-désert humain au coeur du territoire néerlandais surpeuplé, alors que les villes des polders ne pouvaient se développer par leur seule fonction de centres de services en milieu rural, et
que le manque d’espace pour la résidence, les loisirs et l’industrie se faisait durement sentir dans les provinces limitrophes d’Utrecht et de Hollande-Septentrionale. Ce changement d’optique a eu deux conséquences. Dans le polder du Nord-Est, le plus éloigné des régions vitales du pays, il n’a déterminé que des retouches à la situation existante par la création d’emplois industriels et tertiaires à Emmeloord. Dans les Flevoland et le futur Markerwaard, il a conduit au contraire à l’affectation d’espaces considérables à des utilisations non agricoles : forêts et plages le long des lacs de bordure, zone industrielle le long de l’Oostvaardersdiep (chenal d’Amsterdam à Lelystad, entre le Flevoland-Méridional et le Markerwaard), aéroport international dans le Markerwaard, villes nouvelles avec une extension de Lelystad beaucoup plus considérable qu’il n’était prévu (plus de 100 000 hab.), création d’un centre urbain face à Harderwijk et surtout fondation d’une ville de 125 000
à 250 000 habitants, Almere, dans le coin sud-ouest du Flevoland-Méridional. Des modifications peuvent encore être apportées à ces projets, mais il est certain que, pour les deux polders les plus récents, l’accueil du trop-plein de population et d’activités du Randstad Holland* l’emportera sur la fonction purement agricole.
Un des problèmes qui se posent au planificateur est l’aménagement de voies de communication suffisantes pour permettre à la fois un trafic de transit entre l’ouest et le nord des Pays-Bas et les relations quotidiennes entre le Randstad et les nouveaux centres urbains. En attendant une possible desserte ferroviaire, l’autoroute Amsterdam-Groningue (140 km au lieu de plus de 200 par les routes actuelles), via Almere, Lelystad et Emmeloord, constituera la pièce maîtresse de cette infrastructure ; il n’en existe pour l’instant qu’une ébauche avec le tron-
çon Lelystad-Emmeloord et, au sud, le pont de Muiderberg, qui permet, depuis 1969, des relations directes entre la Hollande et les polders en évitant le détour par Harderwijk, Elburg ou Kampen.
J.-C. B.
Zurbarán
(Francisco de)
Peintre espagnol (Fuente de Cantos, Badajoz, 1598 - Madrid 1664).
Célèbre au seuil de la maturité, dé-
modé et presque oublié à la fin de sa vie, étiqueté par les critiques du XVIIIe s.
comme un « Caravage* espagnol » robuste et prosaïque, découvert — grâce à la Galerie espagnole de Louis-Philippe
— par les romantiques français, mais durci et déformé en peintre antithétique de moines farouches et d’éblouissantes jeunes saintes, Zurbarán connaît aujourd’hui la vogue internationale. Mais cette ascension au premier rang des maîtres espagnols, presque au niveau de Vélasquez*, ne date guère que d’un demi-siècle : c’est depuis lors seulement que sa vie et son oeuvre, jusque-là très mal connues, ont attiré des chercheurs nombreux. En 1964, la grande exposition du tricentenaire, à Madrid, downloadModeText.vue.download 611 sur 635