Les bombes explosives vont de 10 kg à 10 t ; les plus courantes sont celles de 150
à 500 kg.
Il existe bien d’autres types de bombes : incendiaires (depuis les plaquettes au phosphore jusqu’aux bombes spéciales de 1 t) ; au napalm (gel à base d’essence et de palmitate de sodium ou d’aluminium contenu dans un réservoir en alliage léger et dont l’allumage se fait à l’impact par une grenade incendiaire) ; toxiques (chargées de gaz de combat) ; bombes-mines (se posant au sol et n’éclatant qu’au passage d’un homme ou d’un véhicule) ; bombes éclairantes, fumigènes, d’exercice, etc.
Certaines bombes, dites « cluster » (ou
« en paquetage »), sont constituées par un assemblage de multiples bombettes ou grenades d’un kilo. Le paquetage est largué d’un seul coup et se défait au bout d’un certain temps de chute, dispersant les projectiles sur une grande surface.
1914-1918, la naissance
du bombardement
L’idée du bombardement par air est venue tout naturellement aux premiers équipages qui, en 1914, survolèrent impunément l’ennemi et imaginèrent de lancer par-dessus bord des obus d’artillerie, des grenades, voire des fléchettes. On perfectionna vite les armes, les méthodes, et on créa des avions spécialisés, surtout en 1917 (Breguet « XIV » français, « Gotha » allemand, « Handley Page » britannique).
Les objectifs visés sont généralement militaires et choisis sur le champ de bataille ou à proximité. Cependant, pour répondre aux bombardements
allemands d’intimidation sur les villes par « Zeppelin » puis « Gotha », des raids de représailles sont lancés sporadiquement. La guerre s’achève sans que le bombardement ait pu jouer un grand rôle ; mais on a compris partout que son efficacité dépend de son emploi en masse. Après la guerre, le général italien Giulio Douhet (1869-1930) consacrera sa vie à défendre la thèse que la guerre future doit se gagner par l’aviation de bombardement, en subordonnant à son action toutes les autres catégories de forces, y compris la chasse de défense du territoire. Cette théorie fit l’objet de vives polémiques entre 1922 et 1928 et influença beaucoup les doctrines d’emploi de tous les pays. (V. aviation.)
1939-1945,
le bombardement, élément indispensable de
la décision
Au début de cette guerre, l’aviation de bombardement n’est pour tous les états-majors qu’une composante du combat terrestre visant à prolonger ou remplacer (Stuka) l’action de l’artillerie. C’est ainsi qu’elle est largement employée par les Allemands, qui l’utilisent pendant la guerre éclair pour détruire au sol l’aviation polonaise, désorganiser les bases aériennes françaises, semer le désordre et la panique dans les colonnes de ravitaillement et de réfugiés.
Plus tard, à Malte, les bombardiers de la Luftwaffe arriveront presque à contraindre les Britanniques à abandonner l’île. Mais en 1944, durant la bataille de Normandie, 2 000 bombardiers alliés larguant 5 000 t de bombes sur un secteur de 1 600 m de large et 8 km de long ouvrent dans le front allemand de Saint-Lô la brèche où s’engouffre la Ire armée américaine ; trois semaines plus tard, la contre-of-downloadModeText.vue.download 523 sur 583
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 3
1620
fensive de la VIIe armée allemande sur Mortain est enrayée par l’aviation de bombardement.
Cependant, deux événements ré-
vèlent le rôle capital que peut jouer le bombardement aérien indépendamment des opérations terrestres : la bataille d’Angleterre de 1940, dont l’échec fut attribué par les Britanniques à l’insuffisance des moyens mis en oeuvre par la Luftwaffe ; l’attaque japonaise sur Pearl Harbor en 1941, qui démontra l’efficacité d’un raid massif de bombardiers.
Aussi les Alliés révisèrent-ils leur doctrine et se lancèrent-ils fiévreusement dans la fabrication accélérée de quadrimoteurs lourds et la mise au point — qui durera deux ans — de
bombes adaptées, de systèmes de navigation, de procédés de bombardement et de tactiques d’emploi. La priorité fut donnée à l’action stratégique, comme le voulait Douhet, sans cependant
négliger l’aspect tactique. En 1943, à Casablanca, les Alliés optent pour des actions de bombardement visant systé-
matiquement les villes allemandes en y paralysant les industries de guerre ; seront attaqués sans répit : les chantiers de construction de sous-marins, l’industrie aéronautique et des transports, les fabriques et entrepôts d’essence, les usines d’armement.
Ces divers objectifs ne sont plus désormais la cible de petits groupes d’avions de bombardement, mais celle de formations de plus en plus importantes qui iront jusqu’à représenter des flottes entières de plus de 1 000 bombardiers formés en vagues successives s’étirant sur 400 km. De jour — ce sera la tactique préférée des Américains —
les avions volent groupés en « flight »
de six appareils, qui, conjuguant leurs feux (10 mitrailleuses lourdes chacun), se défendent mieux et peuvent appuyer l’unité voisine. Les raids de nuit, pratiqués surtout par les Britanniques volant en flot serré, sont plus sûrs mais moins précis, malgré les destroyers marqueurs d’objectifs (« Mosquito » le plus souvent). Pour parfaire la tactique et augmenter la sécurité, des itinéraires sont empruntés à des altitudes diffé-
rentes pour converger vers l’objectif.
La défense antiaérienne intervient cependant avec une efficacité certaine, et les Alliés perdront plus de 9 000 avions dans les opérations de bombardement sur le Reich.
Si les effets sont loin d’être immé-
diats, ils n’en sont pas moins positifs, affaiblissant le soutien logistique au point de paralyser temporairement des unités combattantes de toutes sortes et absorbant pour la défense aérienne des effectifs hors de proportions avec ceux des attaquants.
Le cas du Japon est plus significatif encore, puisque le bombardement aérien (le 9 mars 1945, Tōkyō recevait 1 670 t de bombes provoquant la mort de plus de 80 000 personnes) apporte la décision : le 16 août 1945, le Japon, avant qu’aucun débarquement ne soit tenté, accepte la capitulation. Sans doute l’a-t-on attribuée aux deux bombes nucléaires lancées sur Hiroshima et Nagasaki. En réalité,
elles semblent plutôt avoir permis à l’empereur de sauver la face, car, dès septembre 1944, son gouvernement
avait jugé la guerre perdue et cherché à négocier un armistice par le canal des Soviétiques.
L’avion bombardier
L’efficacité d’un bombardier dépend de quatre facteurs : sa capacité d’emport de bombes, son rayon d’action, son système de navigation et de visée, enfin ses moyens de défense autonome contre les chasseurs, la D. C. A. et, plus récemment, les missiles sol-air.
De quelques dizaines de kilos enle-vés en 1914, la capacité d’emport passe à une tonne en 1918. En 1939-1945 plusieurs catégories de bombardiers opèrent en même temps : les bimoteurs légers et moyens (Lioré « 45 », Amiot « 370 » fran-
çais ; Dornier « 17 », Junkers « 88 » allemands ; « Blenheim », « Mosquito » anglais ; Mitchell « B-26 », « Marauder » américains) emportent de 500 kg à 2 t ; les quadrimoteurs lourds (« B-17 » et « Liberator » amé-
ricains ; « Halifax » et « Lancaster » anglais) sont chargés de 4 à 6 t de bombes. En 1944, la « Superforteresse B-29 » détient le record avec 8 t, et, après la guerre, le « B-52 » atteint 30 t. Malgré les possibilités offertes par l’aéronautique (v. transport [aviation militaire de]), la capacité d’emport unitaire, devenue moins importante depuis la mise en service des bombes nucléaires, ne sera plus recherchée en priorité.
Le rayon d’action est la distance maximale à laquelle un avion peut lancer un chargement de bombes tout en étant assuré de son retour. C’est une caracté-
ristique fondamentale des appareils de bombardement. Les bombardiers moyens ont un rayon d’action de 1 000 à 2 000 km, celui des bombardiers lourds s’est amé-