annonce la confection prochaine du cocon et les métamorphoses.
Ayant choisi un endroit favorable, le ver émet un fil de soie par un orifice situé sur sa lèvre inférieure, en fait une sorte de treillis lâche fixé aux rameaux, élimine les derniers déchets intestinaux, puis commence à tisser autour de lui le cocon régulier et dense dans lequel s’accomplira la nymphose. Le travail dure trois à quatre jours et est exécuté à l’aide d’un seul fil qui, dé-
roulé, atteint de 300 à 1 500 m de long (800 m en moyenne). Si l’on veut ré-
colter la soie, on passe les cocons dans l’air chaud pour tuer les animaux, puis on dévide les fils dans l’eau bouillante.
Sinon, la larve poursuit son évolution et, après une mue nymphale, donne une chrysalide ; quinze à vingt jours plus tard, la mue imaginale libère le Papillon, qui ramollit le cocon à l’un des bouts, en écarte les fils et façonne un goulot par lequel il s’échappe, les ailes encore molles et fripées.
Intérêt scientifique
Élevé depuis des millénaires, source d’une industrie jadis florissante, le Bombyx du Mûrier est un des Insectes les mieux connus ; son anatomie et sa biologie ont fait l’objet d’innombrables travaux. Citons, parmi eux, ceux qui ont permis d’élucider le déterminisme de la mue et de la métamorphose : les glandes prothoraciques sécrètent des hormones de mue, ou ecdysones, que l’on a pu extraire (il a fallu traiter 500 kg de chrysalides pour obtenir 25 mg de substance active pure cristallisée) ; les corpora allata, agissant sous le contrôle des cellules neurosé-
crétrices du cerveau, produisent une hormone juvénile qui, chez la chenille jeune, empêche la métamorphose de se produire.
Le Bombyx du Mûrier a été utilisé aussi dans des recherches sur la parthénogenèse artificielle : en traitant des oeufs non fécondés par la chaleur ou par l’acide chlorhydrique, on en a provoqué le développement jusqu’à son terme, c’est-à-dire jusqu’aux adultes sexués. D’autre part, en soumettant les oeufs récemment fécondés à un traitement approprié, on a pu ne détruire que
le noyau de l’ovule ; la cellule ne comportant qu’un noyau mâle s’est développée, et l’évolution a pu être menée jusqu’à l’adulte (androgenèse).
Espèces pouvant être
appelées Bombyx
On désigne parfois sous le nom de Bombyx divers Papillons appartenant à des familles voisines des Bombycidés (Attacidés et Lasiocampidés) et même, quelquefois, de manière abusive, à certains Liparidés, qui sont éloignés des vrais Bombyx.
Le Bombyx de l’Ailante (Samia
cynthia, Attacidés), originaire d’Asie orientale, établit son cocon dans une foliole enroulée d’Ailante ; la chenille prend soin de relier cet étui au rameau par quelques fils de soie, si bien que, lorsque la foliole tombe en automne, le cocon reste suspendu à l’arbre. Ce Papillon grand et magnifique doit sa célé-
brité au fait que, échappé d’un élevage, il s’est acclimaté en France, et qu’on en trouve dans la région parisienne.
La famille des Lasiocampidés ren-
ferme : le Bombyx à livrée (Mala-
cosoma neustria), qui pond ses oeufs autour des branches des arbres forestiers et fruitiers, et dont la chenille porte des raies longitudinales multicolores ; le Bombyx du Chêne (Lasiocampa quercus) ; le Bombyx du Trèfle (Lasiocampa trifolii) ; le Bombyx de la Ronce (Macrothylacea rubi), dont la chenille réagit au moindre contact en s’enroulant sur elle-même ; le Bombyx du Pin (Dendrolimus pini), dont la larve éclôt en août, passe l’hiver dans le sol et commet des ravages dans les Pins au printemps, avant de se métamorphoser ; le Bombyx feuille-morte (Gastropacha quercifolia).
Enfin, chez les Liparidés, on désigne parfois Lymantria dispar sous le nom de Bombyx disparate ; Orgyia antiqua sous celui de Bombyx étoilé ; Euproctis phaeorrhea sous celui de Bombyx cul-brun ; Stilnoptia salicis sous celui de Bombyx du Saule.
M. D.
G. Portevin, Ce qu’il faut savoir des vers à
soie, leur élevage (Lechevalier, 1943). / J. Rostand, la Vie des vers à soie (Gallimard, 1943).
Bonald (Louis,
vicomte de)
Écrivain et philosophe français (châ-
teau du Monna, près de Millau, 1754 -
id. 1840).
Le jeune Bonald bénéficie au collège de Juilly, chez les Oratoriens, d’une solide formation classique, et, par son
« directeur spirituel », le P. Mandar, ami de Rousseau, il s’initie aux idées nouvelles. Après un bref service dans le corps des mousquetaires, il retourne à Millau, se marie, s’applique au soin de ses propriétés et contribue aux activités culturelles.
Il est nommé maire de Millau en
juin 1785. Au début de la Révolution française, il accueille favorablement les idées libérales tout en modérant l’enthousiasme de ses compatriotes.
Cela lui vaut d’être élu maire selon le nouveau système, décoré de la couronne civique et enfin élu président de l’assemblée départementale. Mais la Constitution civile du clergé provoque sa démission.
En octobre 1791, Bonald prend la
route de l’exil. Après quelques mois dans la malheureuse « armée des
princes », il se fixe à Heidelberg. En 1795, il rédige son premier livre, la Théorie du pouvoir politique et religieux, ouvrage fondamental (publié en 1796), creuset de tous les autres, qui aura entre autres (rares) lecteurs Bonaparte. En 1797, il rentre en France, mais s’en va vivre deux ans à Paris dans une relative clandestinité, où il prépare sa trilogie : l’Essai analytique sur les lois naturelles de l’ordre social (1800), Du divorce (1801), la Législation primitive (1802).
À partir de 1802, il se fixe pour de longues années au Monna, près de
Millau, à l’écart du nouveau régime consulaire, puis impérial. Sur les sollicitations de son ami Fontanes, il accepte néanmoins de collaborer au Mercure de France, puis au Journal des débats. Plus tard, il refusera sèchement de devenir précepteur du roi de Rome,
mais devra accepter les fonctions de conseiller de l’Université.
La Restauration le comble de joie sans susciter la moindre servilité. Elle lui vaudra plus d’honneurs que de pouvoirs. Il entre, par faveur royale, à l’Académie française (1816), est élu député, nommé ministre d’État et enfin pair de France. Il siège dans les rangs des ultras, dont il est considéré comme l’oracle le plus rigoureux. En 1817, il est nommé président de la censure, fonction trop bien faite pour son intransigeance.
Ces activités politiques ne l’em-
pêchent pas d’écrire : en 1818, les Recherches philosophiques ; en 1827, la Démonstration philosophique du principe constitutif de la société. Il collabore au journal le Conservateur, puis, en 1820-21, figure parmi les principaux rédacteurs du Défenseur. Il ne peut s’entendre avec Chateaubriand, mais se lie avec Lamartine, Karl Ludwig von Haller (1768-1854), homme politique suisse converti au catholi-downloadModeText.vue.download 531 sur 583
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 3
1628
cisme, et La Mennais. Ce dernier et ses disciples subissent d’abord l’influence de Bonald, lui vouent une admiration déférente, et le font collaborer à partir de 1824 au Mémorial catholique.
Bonald se retire définitivement au Monna. Il boude la monarchie de Juillet et refuse toute pension. Dans ce contexte, il ne parvient pas à publier ses ouvrages, dont l’un représente sa
« somme » personnelle (Du pouvoir et des devoirs dans la société), tandis qu’un autre demeure une originale tentative de philosophie religieuse (Ré-
flexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison).
L’écriture de Bonald est celle d’un autodidacte aux prises avec un vocabulaire plutôt limité. Aussi les notions forgées ou remaniées par l’auteur font-elles l’objet d’un labeur acharné de type artisanal. La pensée souffre à son