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val », malgré les tentatives d’apaisement de Letizia. Ulcéré, Lucien, sans céder, s’exile en Italie, cette Italie où Pauline, devenue veuve, va se remarier avec le richissime prince Bor-ghèse (1803). Napoléon ne soulève pas d’obstacle à ce dernier mariage. Il a d’autres soucis : juste avant de monter sur le trône, il apprend que Jérôme s’est, à dix-neuf ans, marié aux États-Unis avec une jeune beauté de Baltimore, Elisabeth Paterson. Sa fureur est sans bornes. Il somme le coupable de rentrer en France. Après quelques protestations, le cadet obéit : le Conseil d’État déclarera le mariage inexistant.

Jérôme n’a pas à se repentir de sa soumission : il est couvert d’or, nommé prince français et contre-amiral.

Rois d’Empire

« Je ne veux plus avoir de parents dans l’obscurité ; ceux qui ne s’élèveront pas avec moi ne seront plus de la famille », proclame le nouvel empereur.

Mais il ajoute : « Mes frères ne sont grands que par moi ; ils ne sont grands que parce que je les ai faits grands. »

Napoléon distribue les royaumes, mais entend rester le maître. Joseph a reçu le titre de prince et de Grand Électeur : l’épineuse question de la succession au trône de France préoccupe fort ce Corse susceptible et amène des heurts entre lui et l’Empereur. Il croit bon de refuser la couronne d’Italie, que lui offre son frère. Il accepte toutefois celle de Naples (1806). Charge honorifique ou véritable souveraineté ? Le roi s’attache les Napolitains par sa bienveillance et par sa simplicité — ce qui lui vaut souvent de vives remontrances

—, et entreprend des réformes sociales et politiques : suppression de la féodalité, fermeture de nombreux couvents, réorganisation administrative et financière.

Grand connétable de l’Empire,

Louis est nommé, en 1806, roi de Hollande. Le nouveau roi prend au sérieux sa tâche, mais entre vite en conflit avec Napoléon, dont il contrecarre la politique. Les sujets de litige sont nombreux : l’établissement du Code civil, le séjour des troupes d’occupation dans son royaume, et surtout l’application du Blocus continental en Hollande. Par

ailleurs, la mésintelligence qui règne entre lui et Hortense irrite l’Empereur.

Autre motif d’inquiétude : Jérôme. Napoléon l’a marié (1807) avec la princesse Catherine de Wurtemberg et l’a fait roi de Westphalie, royaume créé de toutes pièces. Dans sa capitale, Kassel, ce roi d’opérette mène une vie de plaisirs, accumule les dettes, dépense les revenus de l’État à tort et à travers.

Quant à Lucien, le « rebelle », dans son exil romain, il refuse d’abandonner sa « coquine » et de céder à son frère.

Leur entrevue à Mantoue (1807) ne les réconciliera pas. Trois ans plus tard, partant pour l’Amérique, il sera capturé par un navire britannique et traité en prisonnier de guerre.

En 1808, Joseph reçoit l’ordre

de quitter Naples pour monter sur le trône de Madrid : Murat, grand-duc de Berg depuis 1806, le remplace dans le royaume napolitain, et Caroline ceint avec joie cette couronne. Joseph, el rey intruso (« le roi intrus »), comprend rapidement dans quel guêpier l’Empereur s’engage en Espagne. « Personne n’a dit toute la vérité à Votre Majesté, lui écrit-il : il n’y a pas un Espagnol qui se montre pour moi. Non, sire, vous êtes dans l’erreur. Votre gloire échouera en Espagne. » Après la capitulation de Baylen, il s’enfuit de sa capitale et ne sera rétabli sur le trône madrilène que grâce à l’intervention de Napoléon.

Joseph essaie en conscience de faire son métier de roi dans une Espagne en feu. En Hollande, Louis est obligé de signer un traité qui enlève toute indé-

pendance à son pays. L’Empereur ne le ménage pas : « En dehors de moi, vous n’êtes rien... Votre gouvernement veut être paternel. Il n’est que faible. »

Louis tente en vain de réagir ; il finit par abdiquer (1810) et se réfugie en Bohême, puis en Autriche, d’où il proteste solennellement contre la réunion de la Hollande à l’Empire. Seule Elisa, downloadModeText.vue.download 534 sur 583

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 3

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grande-duchesse de Toscane depuis 1809, gouverne ses départements avec

sagesse au gré de Napoléon, mécontent des débordements amoureux de Pauline en Italie, tandis que Madame Mère s’efforce, comme toujours, de calmer les esprits et de rétablir la concorde.

Défections et abandons

À l’heure des revers, Napoléon s’aper-

çoit de la fragilité de l’édifice impérial : les siens le trahissent ou se montrent incapables. Pendant la retraite de Russie, Murat, chargé du commandement des débris de la Grande Armée, déserte et regagne ses États. Après Leipzig (1813), poussé par Caroline, il entre en tractation avec les Alliés. « La conduite du roi de Naples est infâme et celle de la reine n’a pas de nom », s’écrie l’Empereur. Jérôme, appelé lui aussi à un commandement en Russie, ne commet que des erreurs ; il quittera sans aucune gloire son royaume pour aller à Trieste (1813). La même année, la défaite de Vitoria chasse d’Espagne Joseph, qui refuse de renoncer à son trône perdu, malgré les ordres de Napoléon. Nommé lieutenant général (1814), il abandonnera Paris devant l’avance alliée et, après l’abdication de l’Empereur, se retirera en Suisse, où le rejoindra son frère Louis.

La famille Bonaparte

« Il est sûr, du reste, que j’ai été peu secondé des miens, et qu’ils ont fait bien du mal à moi et à la grande cause. On a souvent vanté la force de mon caractère ; je n’ai été qu’une poule mouillée, surtout pour les miens ; et ils le savaient bien : la première bourrade passée, leur persévé-

rance, leur obstination l’emportaient toujours ; et, de guerre lasse, ils ont fait de moi ce qu’ils ont voulu [...] Moi, nommais-je un roi, il se le croyait tout aussitôt par la grâce de Dieu, tant le mot est épidémique.

Ce n’était plus un lieutenant sur lequel je devais me reposer, c’était un ennemi de plus dont je devais m’occuper. » (24 septembre 1816.)

« L’Empereur est revenu encore sur tous les siens ; le peu de secours qu’il en avait reçus, les embarras, le mal, qu’ils lui avaient causés. Il s’arrêtait surtout sur cette fausse idée de leur part, qu’une fois à la tête d’un peuple, ils avaient dû s’identifier

avec lui de manière à préférer ses intérêts à celui de la patrie commune [...] méconnaissant qu’ils ne faisaient partie que d’un tout au mouvement duquel ils devaient aider, au lieu de le contrarier. Mais après tout, concluait-il, ils étaient bien neufs, bien jeunes, entourés de pièges et de flatteurs, d’intrigants de toute espèce, de vues se-crètes et malintentionnées. » (4 novembre 1816.)

D’après le Mémorial.

Les Cent-Jours

Lorsque, s’échappant de l’île d’Elbe, où l’avaient rejoint Madame Mère et Pauline, Napoléon revient en France, Joseph, fasciné par le retour de l’aigle, offre ses services. Lucien et Jérôme le rejoignent, soucieux de partager sa gloire ou son infortune. L’ex-roi d’Espagne est chargé de la présidence du Conseil des ministres en l’absence de son frère. Lucien est traité comme un prince français, Lucien qui « ennoblit son opposition et ses différends, en venant, au retour de l’île d’Elbe, se jeter dans les bras de Napoléon dans un moment où il était loin de regarder ses affaires comme assurées ». Ce dévouement trop tardif n’empêche pas la chute de l’Empereur. Du moins, à Waterloo, Jérôme se battra avec courage.

Les exilés

Que deviennent les Bonaparte après la chute de l’Empire ? Tous, sauf Joseph, qui passe aux États-Unis et y vit sous le nom de « comte de Survilliers », se regroupent en Italie. Madame Mère se réfugie à Rome, où, pendant des années, elle tâche de plaider auprès des puissances la cause de l’exilé de Sainte-Hélène, cherchant à obtenir des adoucissements à sa captivité. Murat fusillé, Caroline, « comtesse de Li-pona » (anagramme de Napoli), réside en Toscane ; Elisa, « comtesse de Com-pignano », à Trieste ; Pauline se sépare de son mari et habite au palais Borghèse. Jérôme, « prince de Montfort », voyage dans la Péninsule en compagnie de la reine Catherine, toujours dévouée à son volage époux ; Louis partage son temps entre Rome et Florence ; Lucien se consacre à ses enfants. Le « clan »