On trouve dans ces ouvrages des
comptes rendus d’expériences qui
laissent apparaître une réelle rigueur. Théophraste établit en outre une classification rigoureuse pour les nombreuses plantes dont il donne la description ; il se fonde surtout sur la morphologie générale et il distingue ainsi les arbres avec un seul tronc, ramifiés à partir d’une certaine hauteur, les arbrisseaux, au tronc ramifié dès la base, les sous-arbrisseaux et enfin les
herbes, dépourvues de tronc et dont les feuilles sortent de terre.
Au IIe s. av. J.-C., le poète grec Ni-candre et Krateuas, médecin de Mith-ridate, nous ont laissé de nombreuses descriptions de plantes, qui furent reprises plus tard par Dioscoride (Peda-nius), médecin grec du Ier s. apr. J.-C.
Celui-ci composa un traité de matière médicale où environ sept cents plantes, minutieusement décrites (racines, fruits, milieu de vie), sont rangées suivant leurs propriétés pharmacolo-giques. Cet ouvrage, extrêmement lu et répandu, toucha non seulement le monde grec, mais aussi les mondes latin et arabe, et il fut encore à l’honneur au Moyen Âge.
À la même époque, Pline l’Ancien
(23-79 apr. J.-C.) composa une véritable encyclopédie (Naturalis Historia) en trente-sept livres ; les documents les plus intéressants concernent l’arboriculture et l’horticulture, et sont une source importante de renseignements sur les techniques de l’époque.
Le Moyen Âge
y Les Arabes. La botanique, après la chute de Rome, trouva asile dans la civilisation arabe, et de nombreuses traductions d’auteurs anciens furent faites, en particulier, dès le IXe s., celle du traité de matière médicale de Dioscoride, qui servit ensuite de base à toute la médecine arabe. C’est surtout dans un but pratique que
furent publiés les grands ouvrages de botanique : traités d’agriculture, des « simples », de pharmacologie, de toxicologie. Dans leurs encyclopédies, Avicenne* (980-1037), al-
Bīrūnī* (XIe s.) et Qazwīnī (XIIIe s.) décrivirent et nommèrent un grand nombre d’espèces. Al-Bīrūnī découvrit la régularité d’implantation des pièces florales et créa la notion de diagramme caractérisant l’espèce.
y Bassin méditerranéen oriental.
Dans la Byzance médiévale, la botanique ne fut étudiée que pour servir la médecine et l’agriculture ; les ouvrages furent le plus souvent consacrés à des énumérations de plantes et à des descriptions accompagnées parfois d’illustrations. Quelques vé-
gétaux orientaux furent ajoutés aux listes des siècles précédents.
Le peuple juif, lui, joua un rôle important dans la diffusion des connaissances. En effet, la Diaspora transmit à de nombreux peuples les éléments des sciences antiques. On retrouve dans les Talmuds de précieuses indications sur les arbres, les plantes vénéneuses, mé-
dicinales et alimentaires. Beaucoup de traductions et de traités furent élaborés par des savants juifs : par Asaph au VIIe s., par Shabbetay Donnolo au Xe s.
et surtout par Rabbi Salomon ben Isaac.
À côté de ces ouvrages, où sont réunis des renseignements morphologiques et systématiques, d’autres firent, dès le VIIIe s., connaître la flore, la faune et les peuples de régions lointaines comme la Mésopotamie, l’Afrique, la Perse et la Gaule.
y L’Occident chrétien. Au Moyen
Âge, pendant la première période qui va de l’invasion barbare au début du XIe s., les sciences ont peu progressé ; cependant, certaines encyclopédies monumentales (Institutions de Cassiodore, Étymologies d’Isidore de Sé-
ville, travaux de Bède le Vénérable) sortirent de l’oubli et présentèrent sous de nouvelles formes la science antique. Dès le début de la deuxième période, remarquable grâce aux nombreux contacts que les Occidentaux eurent avec les étrangers, on vit apparaître l’influence de la science islamique, transmise souvent par les Juifs du pourtour méditerranéen.
Une des premières sommes fut celle de Vincent de Beauvais (v. 1190 - v.
1264), qui fut reprise par le dominicain Thomas de Cantimpré (1201-1263)
dans son De naturis rerum, dont trois livres sur dix-neuf sont réservés à la botanique. Albert* le Grand (1200-1280) composa un véritable traité de botanique, De vegetabilibus aut plantis. Il décrivit différents types de feuilles, de fleurs et de fruits, distingua épines et piquants, calice et corolle, et discourut même sur la structure de la graine (dispositions des embryons). Il pressentit la relation entre la chaleur et la lumière, d’une part, et la maturation des grappes de vigne, d’autre part.
C’est à la fin du XIIIe s. qu’apparut la
loupe, qui devait permettre la découverte d’éléments de plus en plus petits.
Le XVIe siècle
Au début de la Renaissance, on abandonna peu à peu les grandes encyclopédies. Otto Brunfels (1488-1534), Leonhart Fuchs (1501-1566), Hieronymus Bock (1498-1544) recherchèrent dans la nature elle-même les faits qu’ils décrivirent, sans philosopher sur les textes anciens ; ils commencèrent à accumuler de véritables documents scientifiques, mais n’en tirèrent pas de classification valable. Dans le même temps, les premiers herbiers locaux commencèrent à être constitués, et nous possédons encore quelques-uns de ces vieux spécimens (Rome, Mu-séum de Paris).
Puis Conrad Gesner (1516-1565) eut l’intuition que les fleurs et les fruits étaient les organes primordiaux pour l’établissement des classifications ; on lui doit la première notion du « genre ».
Un peu plus tardivement, Charles de Lécluse (Clusius) [1526-1609], après avoir beaucoup voyagé en Europe,
apporta dans son grand ouvrage Ra-riorum plantarum historia (1601) une précision jamais encore égalée dans les descriptions des spécimens étudiés aussi bien sur les plantes supérieures que sur les Champignons ; il ne sut malheureusement pas coordonner tous ces documents pour en tirer une classi-downloadModeText.vue.download 560 sur 583
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 3
1657
fication utilisable. Il aurait le premier, en 1588, cultivé la Pomme de terre, importée du Pérou par Zarate. Andrea Césalpin (1519-1603) publia en 1583
un ouvrage de systématique, De plantis, qui fut pendant deux siècles la base des classifications, malgré l’absence de caractères naturels comme critères de comparaison. Certaines divisions qu’il établit sont en grande partie valables aujourd’hui, tels les Ombellifères, certains groupes de Monocotylédones à grandes fleurs, les Borraginacées, les Labiées, les Composées. Il donna de chacune des plantes une description
latine très courte ; ces petits textes sont les ancêtres des diagnoses modernes.
Cette idée fut reprise par le zoologiste Pierre Belon (1517-1564), qui, en ré-
duisant à l’extrême ces textes, ne laissa que deux mots ; il aurait été ainsi un précurseur de la nomenclature binaire, reprise par Gaspard Bauhin (1560-1624) et codifiée définitivement, beaucoup plus tard, par Carl von Linné.
Matthias de Lobel (Lobelius) [1538-1616], élève de Clusius, publia une véritable flore de la région montpel-liéraine, où l’on découvre pour la première fois la répartition des plantes en Monocotylédones et Dicotylédones.
Malheureusement, il se mit à classifier les plantes à partir de la morphologie foliaire, ce qui le conduisit à de nombreuses erreurs. Son plus important ouvrage fut Plantarum seu stirpium historia (1576), auquel Linné devait se référer.