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De la fin du IIIe siècle à la fin du VIe siècle

C’est la période d’assimilation, du-

rant laquelle les Chinois traduisirent et commentèrent, souvent en collaboration avec les maîtres indiens, les grands textes bouddhiques, non plus seulement ceux du hīnayāna, mais surtout, à partir de 265 environ, ceux du mahāyāna (Grand Véhicule).

Au début de cette période eurent lieu deux événements importants : l’incendie de la capitale Chang’an (Tch’ang-ngan) par les Tatares en 311 et l’exode de la Cour (dynastie des Jin [Tsin]) vers le sud, événements qui bouleversèrent les structures sociales de la Chine et favorisèrent la propagation du bouddhisme. La Chine fut divisée en deux parties : celle du Nord et celle du Sud. Les princes barbares semi-sinisés qui régnaient au nord ne tardèrent pas à encourager une religion qui leur permettait de trouver un terrain d’entente avec le peuple soumis.

D’autre part, dans le Sud comme

dans le Nord, les misères du temps présent et les incertitudes de l’avenir poussèrent les gens à chercher refuge dans la vie spirituelle. De nombreux lettrés se tournèrent vers le taoïsme ; par leurs discussions et leurs commentaires sur la doctrine de Laozi (Lao-tseu), ils inaugurèrent la tradition de xuanxue (hiuan-hiue), qui marqua

toute leur époque. On assista à des conversions massives au bouddhisme.

Pour des raisons d’ordre géogra-

phique et culturel s’instaura une différence de style et même de conception entre le bouddhisme du Nord, plus conservateur et dont l’effort porta avant tout sur la traduction des textes, et celui du Sud, plus libéral et plus orienté vers la recherche théorique.

Les Chinois ne se contentaient plus de connaître le bouddhisme uniquement par le truchement des textes. Plus d’une centaine de pèlerins se rendirent en Inde, par voie terrestre, à travers l’Asie centrale, ou par voie maritime, downloadModeText.vue.download 579 sur 583

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 3

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en dépit des difficultés et des dangers

innombrables. Parmi les pèlerins, le plus éminent est Fa Xian (Fa Hien), qui, parti en 399, ne revint en Chine qu’en 414. Inversement, un certain nombre de maîtres indiens vinrent en Chine pour y enseigner le bouddhisme.

Les plus célèbres furent Kumārajīva, originaire de Koutcha, venu en Chine vers la fin du IVe s., et Bodhidharma, arrivé à Canton vers 526.

Quelques grandes figures marquèrent cette période. Dao’an (Tao-ngan [312-385]), dont l’action fut décisive pour l’enracinement du bouddhisme en

Chine, ne se borna pas à la théorie, mais établit des règles de vie pour les moines. À l’époque de Dao’an, la tendance générale consistait à traduire et à interpréter les textes bouddhiques avec des thèmes et des idées tirés du taoïsme. Cette méthode s’appelait

« geyi » (ou « ko-yi ») [interprétation par analogie]. On utilisait par exemple le mot dao (tao) pour traduire les mots sanskrits dharma (loi) et bodhi (éveil), le terme taoïque wuwei (ou wou-wei)

[non agir] pour rendre le mot nirvāṇa, etc.

L’influence de Dao’an s’exerça aussi en Chine du Sud, où le bouddhisme eut pour représentant son brillant disciple, Huiyuan (Houei-yuan [344-416]). La dévotion de ce dernier à Maitreya, le bouddha du futur, est à l’origine du culte d’Amitābha, culte que pratiquent les adeptes de l’école jingtu (tsing-t’ou, « Terre pure »), une des écoles les plus répandues en Chine.

Peu après Dao’an, la venue en Chine, à Chang’an (Tch’ang-ngan), en 401, du maître indien Kumārajīva marque une étape importante pour l’établissement de la doctrine mahāyāna en Chine. Ses travaux de traduction et son enseignement formèrent toute une génération d’authentiques penseurs.

Parmi ses disciples, les plus célèbres furent Sengzhao (Seng-tchao [384-414]) et Daosheng (Tao-cheng [365-434]). Ce dernier s’installa dans le Sud et y prêcha une théorie selon laquelle la présence innée de la « Nature du Bouddha » (bhūtatathāta) se trouve dans les êtres vivants et tous peuvent devenir des bouddhas. Il opposait le subitisme mahāyāniste au gradualisme hīnayāniste, estimant que le premier ré-

pondait mieux à la mentalité chinoise, encline à saisir le dao (tao) par une intuition directe et synthétique. En ce sens, Daosheng peut être considéré comme un chamiste avant la lettre.

Mais le vrai courant de l’école du chan (tch’an, zen en japonais), qui, par la suite, devait connaître un développement si important, commença avec Bodhidharma, qui vint en Chine vers 520. Selon la tradition, le Bouddha aurait transmis un enseignement éso-térique à l’un de ses disciples, et Bodhidharma serait le vingt-huitième patriarche en Inde. En Chine, il fut vénéré comme le premier zu (ou tsou)

[patriarche] de l’école du chan et son disciple, Huige (Houei-Ko), devint le deuxième zu.

Une scission eut lieu entre deux

disciples du cinquième zu : Shen-

xiu (Chen-sieou [606-706]), fondateur de l’école du Nord, et Huineng (Houeineng [638-713]), fondateur de celle du Sud et reconnu comme le si-xième zu.

Les dynasties des Sui (Souei) et

des Tang (T’ang) [VIIe-Xe siècle]

Après plusieurs siècles d’assimilation et de recherches, les Chinois finirent par donner une forme chinoise au

bouddhisme, définitivement adopté.

Il faut évoquer la grande figure de Xuan Zang (Hiuan Tsang [† 664]), qui, par son immense savoir, sa vraie humilité, son périlleux pèlerinage en Inde, entre 627 et 645 (l’administration des Tang ayant rompu ses relations avec certains États d’Asie centrale), et les travaux de traduction qu’il entreprit après son retour en Chine, fut le type achevé du moine.

Durant son séjour en Inde, Xuan

Zang étudia plus particulièrement la philosophie mahāyāniste de

l’école vijnānavāda (« Rien que la conscience »), qu’il connaissait déjà bien en Chine. Il participa à des débats doctrinaux avec les plus éminents érudits indiens. Le système idéaliste de cette philosophie qu’il introduisit en Chine constitue le fondement de

l’école faxiang (fa-siang).

Si certaines écoles en Chine se rattachent à des courants indiens, telles que l’école faxiang et l’école sanlun (san-louen, « Trois Traités »), il en est de typiquement chinoises, dont les plus importantes sont l’école huayan (houa-yen, « Guirlande des fleurs »), l’école tiantai (t’ien-t’ai, « Terrasse céleste »), l’école jingtu (tsing-t’ou, « Terre pure ») et l’école du chan (tch’an,

« Méditation »). La plupart plongent leurs racines dans la période précé-

dente, mais c’est à l’époque des Tang qu’elles prennent une forme distincte.

La propagation du bouddhisme

implique des aspects sociaux et économiques non négligeables. Ayant reçu des terres à titre de dons, les monastères possédaient de vastes domaines.

Exempts d’impôts, ils accumulaient des richesses énormes. D’autre part, la vie des moines en marge de la société mit inévitablement le bouddhisme en conflit avec l’État et avec la philosophie de l’État que fut le confucianisme traditionnel. Trois persécutions eurent lieu, en 626, en 714 et en 842-845. La dernière, de loin la plus importante, porta au bouddhisme un coup très dur.

Depuis lors, tout en restant la religion la plus répandue de la Chine — par ses rites et ses fêtes, il constitue un élé-

ment intimement lié à la vie du peuple

—, le bouddhisme perdit sa vitalité dans le domaine intellectuel, où le néo-confucianisme, à partir du XIe s., devait prendre la place dominante.

La doctrine

Étant donné le grand nombre d’écoles qui existent, il est difficile de présenter une doctrine bouddhique à laquelle peuvent souscrire tous les adeptes.

D’autre part, il paraît aussi vain de fournir une liste des écoles et des sectes avec une brève explication de leur doctrine. Il est plus utile d’étudier les problèmes essentiels que se pose le bouddhisme et sa manière spécifique d’y répondre.