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L’interférence de plusieurs facteurs explique une telle diversité. On peut schématiquement les regrouper en trois catégories.

Les particularités de

l’érosion

L’érosion présente certaines particularités, résultant de divers facteurs.

y L’ampleur des dénivellations et la vigueur des pentes. Celles-ci favorisent en premier lieu la torrentialité, les eaux qui dévalent les versants étant douées d’un fort pouvoir érosif et d’une très grande capacité de trans-

port. Se concentrant au bas de bassins de réception torrentiels qui s’inscrivent en forme de demi-entonnoir dans la partie supérieure des versants, elles évacuent des masses considérables de débris, souvent énormes, qu’elles entassent en cônes de déjections à leur débouché dans la vallée.

La raideur des pentes favorise également le déclenchement de glissements en masse, parfois catastrophiques, dans les roches ou les manteaux détritiques riches en argile. Certains de ces glissements peuvent atteindre des volumes énormes et obstruer des vallées. De tels phénomènes se produisent lorsque les matériaux perdent toute cohésion par suite d’une profonde imbibition par des pluies surabondantes ou une brusque fonte des neiges.

y L’altitude. En provoquant un

abaissement des températures, elle tend à faire prédominer les processus propres aux régions froides. La gélifraction est l’agent essentiel du recul des escarpements rocheux, au pied desquels les débris s’accumulent en cônes d’éboulis. Sur les pentes où la désagrégation libère suffisamment de débris fins, les alternances de gel et de dégel, liées à la forte radiation diurne et au fort rayonnement nocturne, favorisent les phénomènes de géli-fluxion et de géliturbation. La neige, accumulée dans des creux ou sous le vent des crêtes, ronge des niches et corniches nivales tandis que les avalanches strient les versants de couloirs caractéristiques. Les glaciers, enfin, modèlent suivant des processus spécifiques des cirques et des auges coupées de seuils, et abandonnent en fondant des amas morainiques parfois imposants.

Ces divers processus sont inégalement efficaces suivant l’altitude, que corrige l’exposition : dans les Alpes par exemple, les étages inférieurs, forestiers à l’état naturel, ont un modelé qui ne se distingue de celui des régions voisines que par la raideur des pentes, qui facilite l’évacuation des débris. Au-dessus de 600-800 m et jusque vers les parties culminantes du couvert forestier, la pluviosité accrue ainsi que l’abaissement des tempéra-

tures assurent une active désagrégation des roches ; mais l’ablation est encore entravée par la végétation, en dehors des pentes trop raides qui sont nues et partout où les torrents et les avalanches détruisent périodiquement la forêt.

Lorsque les arbres s’espacent et font place à la prairie alpine vers 2 200 -

2 500 m, les torrents ouvrent encore de profondes déchirures dans les versants, mais ce sont les phénomènes périgla-ciaires et nivaux qui deviennent pré-

pondérants. Plus haut encore, on entre dans le domaine de l’érosion glaciaire, que dominent les parois rocheuses culminantes soumises à une intense gélifraction.

Ainsi, les systèmes d’érosion se modifient avec l’altitude, engendrant des modelés différents qui se superposent en un véritable « étagement »

de formes. Cet étagement varie en premier lieu avec l’importance du volume montagneux : il est d’autant plus riche que la montagne débute à une altitude plus basse et s’élève plus haut. En second lieu, il dépend de la latitude : les plus beaux étagements s’observent aux latitudes tropicales des Andes, où l’on passe de la forêt amazonienne ou du désert côtier péruvien au domaine glaciaire ; il est au contraire très ré-

duit dans la Cordillère alaskienne, par exemple.

La marque de la trame

structurale

y La zonation du relief des chaînes de montagnes. Elle est en étroit rapport avec leur architecture géologique : chaque zone se définit par un style morphologique commandé en

grande partie par le type de déformations tectoniques (plis de couverture, nappes de charriage, plis de fond, etc.), lui-même conditionné par le contenu lithologique (séries sédi-downloadModeText.vue.download 14 sur 577

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 5

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mentaires rigides ou plastiques, unités métamorphiques, etc.).

Or, la nature lithologique des séries

plissées est le fidèle reflet des modalités de leur genèse. Autrement dit, en dernière analyse, la zonation du relief des chaînes de montagnes est une lointaine conséquence de la paléogéographie.

À cet égard, une distinction fondamentale doit être établie entre les chaînes géosynclinales et les chaînes intracontinentales. Ces dernières, incluses dans les socles continentaux, naissent sur l’emplacement de bassins subsidents de forme allongée, qui sont le siège d’une épaisse sédimentation de calcaires, marnes ou argiles, et qui correspondent à l’effondrement prononcé d’un panneau de socle. Lors du plissement, les mouvements verticaux, auxquels participe le socle, ont autant d’importance que les poussées laté-

rales ; selon que la couverture présente ou non des variations d’épaisseur liées à une subsidence différenciée pendant la phase sédimentaire et que la surrection du socle est plus ou moins énergique, la zonation est plus ou moins marquée : ainsi, dans les Pyrénées, le relief de la zone axiale, fragment de socle hercynien, s’individualise nettement par rapport à celui des plis de couverture qui la flanquent au nord et au sud. Dans les monts Ibériques, en revanche, le socle n’affleure qu’à la faveur de quelques boutonnières ouvertes par l’érosion, et seule la présence de bassins d’effondrement permet de distinguer une branche castillane d’une branche aragonaise, au style de relief pourtant très comparable.

Les chaînes géosynclinales sont

engendrées dans des zones particuliè-

rement instables de l’écorce terrestre, localisées à la marge des masses continentales consolidées. Là se forment des fosses très profondes où les venues magmatiques se mêlent fréquemment aux sédiments pélagiques qu’affecte plus ou moins le métamorphisme

(zones internes). La bordure du continent n’est pas épargnée par ces graves perturbations : une fosse moins profonde s’y constitue généralement où la sédimentation présente des aspects différenciés en fonction de l’inégale subsidence (zones externes). Dans les édifices qui naissent de la compression de ces systèmes géosynclinaux et dont l’architecture tectonique est d’autant plus complexe que le serrage est plus

intense, la zonation est donc bien marquée. Une coupe à travers les chaînes du nord de la Grèce en donne un bel exemple : aux reliefs tabulaires des îles de la mer Ionienne succèdent, dans les chaînes littorales, un relief calqué sur des plis souples, puis de lourds bombements faillés de calcaires kars-tifiés (massif du Gavrovo), la chaîne finement ciselée du Pinde et, au-delà d’un grand couloir molassique, une mosaïque de blocs cristallins à couverture rigide (Olympe) retombant sur la plaine d’effondrement de Thessalie.

y Le relief de chaînons orientés. Caractéristique à l’échelle du massif, il résulte de la mise en valeur par l’érosion différentielle de la structure plissée. Il n’est pas toujours évident, soit que la roche, éminemment plastique, se soit plutôt froissée que plissée, soit que la dissection par le réseau hydrographique d’une série lithologiquement homogène ait effacé toute influence de la trame plissée.

Dans les plis de couverture souples à couches alternativement dures et tendres, le relief peut être classé en trois types : conforme, dérivé et inversé. S’il est demeuré conforme aux données de la tectonique, comme dans le Jura par exemple, les chaînons correspondent à des anticlinaux (monts) et les vallées à des synclinaux (vaux). Mais l’érosion, après avoir crevé la carapace résistante des anticlinaux, creuse dans les terrains tendres sous-jacents des dépressions appelées « combes », que dominent des crêts. Dès lors, le relief est de type dérivé : les chaînons correspondent soit à des monts, dont certains dégagés par l’érosion au sein des combes, soit à des crêts, et les vallées soit à des vaux, soit à des combes, ou encore à des dépressions monoclinales logées entre un crêt et un mont dérivé. Tel est le type de relief des Baronnies dans les Préalpes du Sud. Lorsque, enfin, les roches tendres sont suffisamment épaisses, l’érosion peut avoir progressé très vite dans les combes et avoir mis en saillie les fonds de synclinaux, auxquels on donne alors le nom de « vaux perchés ». Le relief est alors inversé. Le massif de la Chartreuse illustre parfaitement ce type de relief.