Châlons-sur-Marne,
ville d’art
La cathédrale et les églises de Châlons présentent une importance notable pour l’étude du passage de l’architecture monastique romane à l’architecture gothique.
En 1147, saint Bernard avait prêché la deuxième croisade en une première cathé-
drale, détruite, à l’exception d’une tour, par un incendie en 1230 ; l’édifice était reconstruit dès la fin du siècle. Comme toutes les grandes églises du domaine royal, Saint-Étienne comporte un triforium, chemin de ronde courant au-dessous
des grandes verrières. Les chapiteaux des colonnettes formant son arcature — à claire-voie — sont vus de bas en haut, et presque sans recul ; l’esprit logique des maîtres d’oeuvre conjura les déformations perspectives en réduisant les saillies et en augmentant la hauteur des « corbeilles » : exemple typique de cette subordination de la forme réelle à l’effet. Le vitrage de la cathédrale comporte quelques éléments réemployés du XIIe s., plusieurs verrières du XIIIe et celles qu’exécutèrent au XVIe s. les ateliers troyens.
La belle église Notre-Dame-en-Vaux, élevée vers 1130, s’écroula partiellement en 1157 et fut reconstruite pour l’essentiel dans la seconde moitié du siècle. Comme à Saint-Remi de Reims, des voûtes gothiques remplacèrent la couverture en charpente de la nef, et le choeur reçut des chapelles rayonnantes. L’architecte de Notre-Dame paraît avoir tiré profit de l’expérience rémoise : il a conçu les arcs-boutants de sa nef de manière à créer pour eux, à différents niveaux, de véritables culées se lestant l’une l’autre. Il n’a pas été moins habile à couvrir les aires rayonnantes du déambulatoire de voûtains trapézoïdaux, dont les nervures sont portées par d’élé-
gantes colonnettes. L’église conserve de remarquables vitraux du XVIe s. (Couronnement de la Vierge d’après Dürer, 1526).
Des fouilles effectuées de 1963 à 1967 sur l’emplacement de l’ancien cloître, démoli dans le courant du XVIIIe s., ont permis de reconstituer notamment plus de cinquante statues-colonnes qui en formaient les supports. L’ensemble représentait un programme iconographique ambitieux, mis en oeuvre vers 1160-1180 (Châlons, dépôt des Monuments historiques).
La petite église Saint-Jean-Baptiste, dont la nef remonte aux XIe et XIIe s., se recommande par la charpente d’une extrême légèreté enjambant sa nef. Les fermes en sont raidies par deux contre-fiches courbes croisées qui s’opposent au fléchissement.
L’église Saint-Alpin (XIIe et XVIe s.) conserve, avec de beaux vitraux en grisaille de style raphaélesque, celui qui figure l’entrevue du saint éponyme avec Attila.
L’architecture classique est brillamment représentée par l’ancien hôtel des Intendants (v. 1760), devenu préfecture, par l’hôtel de ville (1771) et par l’ancien hôtel des Finances, converti en bibliothèque
municipale. Non loin de la préfecture se dresse la porte Sainte-Croix, construite en six semaines, en 1770, pour l’entrée triomphale de la Dauphine Marie-Antoinette.
G. J.
G. Maillet, la Cathédrale de Châlons-sur-Marne (Laurens, 1946).
Chalon-sur-Saône
Ch.-l. d’arrond. de Saône-et-Loire, sur la Saône et le canal du Centre ; 60 451 hab. (Chalonnais).
Chalon-sur-Saône doit à un site et à une situation remarquables un développement précoce. Bâtie sur le rebord d’une terrasse sèche qui vient directement dominer la Saône, la ville béné-
ficie de la convergence d’itinéraires terrestres venant de l’ouest et du nord ainsi que de possibilités de navigation qui lui ouvrent le bassin de la Saône et du Rhône et, par l’intermédiaire du Doubs, la rapprochent des terres rhé-
nanes. César vit l’intérêt de la position : il y installa ses dépôts durant la conquête de la Gaule.
Le destin de la ville fut cependant moins brillant qu’on ne serait tenté de le penser. Des cités voisines, Autun downloadModeText.vue.download 18 sur 577
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 5
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dans l’Antiquité, Cluny au Moyen Âge, tirèrent mieux parti de la multiplicité des voies qui conduisent aisément dans tout l’Ouest européen. D’autres, comme Beaune, exploitaient des
vignobles plus proches et plus prestigieux que celui du Chalonnais. L’avantage de la situation en plaine n’apparut vraiment qu’avec les moyens de transport en masse.
La fin de l’Ancien Régime coïncida avec une période d’enrichissement.
La Révolution eut des effets contradictoires. La ville perdit au profit de Mâcon ses fonctions administratives.
Cependant, l’ouverture, en 1793, du canal du Centre, confirma son rôle de carrefour de la navigation, fournit une
voie aisée vers la Loire et la Seine et prépara la ville, désormais proche de la houille du bassin de Montceau-les-Mines, à la révolution industrielle.
La construction de la voie ferrée de Paris à Lyon fit perdre à la voie d’eau une partie de son importance. Chalon est sur la grande ligne, mais en tira moins de profit que des carrefours comme Dijon au nord ou Mâcon au
sud (Mâcon, où l’intervention de Lamartine avait fixé la bifurcation vers Genève, la Savoie et l’Italie).
Toutefois la vocation de la ville était déjà établie : centre administratif secondaire, elle tire l’essentiel de sa prospérité du commerce et des fabriques.
Dès 1839, trois ans à peine après avoir repris en main les destinées du Creusot, les frères Schneider fondent, face au débouché sur la Saône du canal du Centre, le gros établissement industriel qu’on appelle de nos jours le petit Creusot : c’est le point de départ d’un essor économique vigoureux. De ce point de vue, Chalon ressemble plus aux villes rhénanes qu’à la plupart des cités de la Saône et du Rhône.
Les quais de Saône et l’île Saint-Laurent constituent un cadre empreint de noblesse et d’harmonie : ils portent la marque de l’urbanisme du XVIIIe s. Le centre des affaires n’a pourtant pas tiré profit de cet ensemble prestigieux. Il s’ordonne autour de la place de l’Obé-
lisque, au nord de la ville médiévale, à la croisée des voies qui la desservent et du boulevard qui mène à la gare. Le décor urbain date là de la fin du siècle passé et témoigne de l’activité de la ville à cette époque.
La poussée urbaine a négligé longtemps les rives de la Saône : vers l’ouest, le canal et la voie ferrée créaient des coupures, cependant qu’au nord-est, et sur la rive gauche, prairies marécageuses et zones inondables dé-
courageaient les efforts des constructeurs. Vers le nord au contraire, sur la terrasse sèche, l’extension était facile : au centre commercial succèdent des quartiers résidentiels et des installations industrielles, les verreries de Bourgogne par exemple.
Chalon connaît depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale un développement rapide : les destructions ont été vite réparées, et la ville a vu croître à la fois son rôle commercial et son activité industrielle. Elle est remarquablement desservie par les voies modernes : le chemin de fer est complété par l’autoroute Paris-Lyon-Méditerranée, cependant que la Saône reçoit les plus gros chalands. Des usines importantes ont été décentralisées là (Kodak par exemple). Le comblement du canal, un programme routier ambitieux ont permis de faire disparaître les contraintes de site et d’assurer l’extension urbaine dans un cadre aéré.
P. C.
F Bourgogne / Saône-et-Loire (départ. de).
chamanisme
F MAGIE.
Chamberlain
Famille qui a joué dans l’histoire de l’Angleterre contemporaine un rôle capital par la succession au pouvoir du père, Joseph, et des deux fils, Austen et Neville. Entre 1880 et 1940, rares sont les gouvernements où n’a pas siégé un Chamberlain ; leur influence s’est imposée même hors du gouvernement.
Joseph Chamberlain
(Londres 1836 -
Birmingham 1914)
Famille et jeunesse
Originaire du Wiltshire, la famille Chamberlain s’était installée dans le courant du XVIIIe s. à Londres, où le père de Joseph avait trouvé le moyen de s’enrichir et de devenir un notable de la Cité. De cette lignée bourgeoise, travailleuse et économe, marquée par le puritanisme non conformiste (la famille appartenait à la secte unita-rienne), « Joe » tirera toujours un vif orgueil, beaucoup plus que s’il avait pu se réclamer d’une ascendance