sous la direction de Branting* et qui développe principalement une ligne parlementaire (il a 13 élus au Riksdag en 1905 et 87 en 1914).
Les scissions dans les partis
En Angleterre, en Italie, en Hollande, en Bulgarie et en Russie, la scission des partis ouvriers devient effective pendant cette étape, soit parce que les diverses fractions d’origine n’opèrent pas leur regroupement, soit parce que la lutte de courants débouche beaucoup plus tôt, comme en Russie, sur la division en partis distincts.
y L’Angleterre. Le marxisme, du fait de l’influence trade-unioniste, ne fut jamais très influent en Angleterre.
Impuissant, à l’étape de la IIe Internationale, à provoquer la formation d’un parti autonome, il imprègne néanmoins d’une teinture superficielle, par l’intermédiaire de certains leaders, les formations socialistes anglaises et sert à tout le moins de référence et d’horizon lointains.
Adam Weiler, ami de Marx et an-
cien membre de la Ire Internationale, est responsable de la pénétration dans les trade-unions de deux revendications qui figuraient au programme des marxistes : la nationalisation du sol et la journée de huit heures.
Henry Mayers Hyndman (1842-
1921) popularise à son tour les idées de Marx, non sans les amender dans un sens réformiste. Réorganisant la Fédé-
ration démocratique, fondée en 1881
par les jeunes radicaux, en Fédération social-démocrate, Hyndman tente de diffuser les idées socialistes et communisantes. Mais, faute de s’appuyer sur
les syndicats, il n’a guère de succès.
À la suite de la grande dépression économique et des crises prolongées de 1873 et 1883, les idées socialistes, très vaguement communisantes, inspirent des formes nouvelles de luttes syndicales et ouvrières, qui aboutissent, à travers le « Nouvel Unionisme », à la formation de l’Indépendant Labour Party (1893), dirigé par le mineur écossais J. Keir Hardie et le leader syndicaliste Tom Mann. Ce parti, très réformiste, consacre essentiellement son attention à la lutte parlementaire et aux transactions parlementaires avec le parti libéral.
C’est dans le seul British Socialist Party (parti socialiste britannique), fondé en 1911 à Manchester, que se développe un courant marxiste un peu vigoureux. Le BSP est né de la fusion de la Fédération social-démocrate downloadModeText.vue.download 554 sur 577
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 5
2805
(Hyndman) et d’autres groupes socialistes. Deux courants se détacheront nettement et s’affronteront en particulier sur la question de la guerre : l’un internationaliste et l’autre favorable à la guerre, avec Hyndman.
Le BSP refondu soutiendra la révolution d’Octobre et, en 1919, adhérera à la IIIe Internationale.
Le socialisme de l’école fabienne (Sydney et Béatrice Webb, G. B. Shaw, H. G. Wells) est par contre, réformiste.
Le Labour Party (parti travailliste), créé en 1900 par la fusion des trade-unions, devient rapidement le grand parti d’opposition.
y L’Italie. En 1881 est fondé par un ancien anarchiste converti au marxisme, Andrea Costa (1851-1910), le parti ouvrier, qui progresse rapidement (500 000 voix en 1882) et attire des intellectuels célèbres, comme Filippo Turati et Antonio
Labriola. Le courant anarchiste est écarté, en 1891-92, aux congrès de Milan et de Gênes.
y La Russie. Selon Lénine, c’est en Russie que le processus de scission entre réformistes et révolutionnaires socialistes et communistes est le plus clair. Avant 1883, date de la création par G. V. Plekhanov du premier groupe officiellement marxiste, le groupe Libération du travail, existaient des associations ouvrières : l’Union des ouvriers de la Russie mé-
ridionale, fondée en 1875 à Odessa, et l’Union des ouvriers russes du Nord, créée en 1878 à Saint-Pétersbourg.
Lénine réussit à faire fusionner les groupes marxistes et le mouvement ouvrier : la première étape de cette démarche est le regroupement de
tous les cercles ouvriers marxistes de Saint-Pétersbourg en une seule Union de lutte pour la libération de la classe ouvrière (1895) ; d’autres unions semblables à celle-ci se constitueront à Moscou et dans de nombreuses villes russes, et esquisseront en 1898 une première tentative pour fonder le parti ouvrier social-démocrate de Russie (P.O.S.D.R.).
Le parti ainsi fondé n’a ni pro-
gramme, ni statuts, ni direction solide ; dans son effort de consolidation, Lé-
nine doit lutter contre les économistes, partisans de la seule lutte syndicale et économique. Le IIe Congrès du parti, en 1903, marque le triomphe de la ligne défendue par Lénine dans son journal l’Iskra.
Mais le combat reprend entre les mencheviks (minorité) et les bolcheviks (majorité), dirigés par Lénine.
Les premiers, poursuivant les hésitations des économistes, s’opposent au parti révolutionnaire de combat. Le IIIe Congrès du parti, tenu à Londres en avril 1905, sanctionne la division entre bolcheviks et mencheviks, car il y a en fait « deux congrès, deux partis »
(Lénine).
Le congrès de Londres condamne les mencheviks : ceux-ci, analysant la situation comme étant celle de la révolution démocratique bourgeoise, recommandent l’alliance avec la bourgeoisie cadette et l’acceptation de sa direction dans une révolution qui lui appartient.
Lénine, au contraire, constatant l’exis-
tence de liens intimes, en particulier au sein de l’appareil d’État, entre la bourgeoisie et l’aristocratie, déclare la première incapable, par crainte du peuple, de mener la révolution démocratique bourgeoise jusqu’au bout et rejette en conséquence toute subordination et toute alliance avec elle ; il réclame l’alliance de la paysannerie afin de mener le plus loin possible la révolution.
Dès lors, le P.O.S.D.R. se trouve scindé en deux partis de fait, qui continuent de s’affronter pendant toute la période de la réaction stolypinienne (1907-1910). Les mencheviks demandent l’abandon de la lutte clandestine et la formation d’un parti légal : Lénine lutte avec acharnement contre eux. La conférence du P.O.S.D.R.
tenue à Prague en 1912 chasse les mencheviks du parti : le P.O.S.D.R.
se transforme alors en parti bolchevik, parti de type nouveau, composé de ré-
volutionnaires professionnels et qui va diriger la première révolution communiste victorieuse du monde.
La restauration de la
IIe Internationale
Des deux congrès parallèles et rivaux qui se réunissent à Paris en 1889, l’un est à tendance marxiste (salle Pétrelle), l’autre à tendance possibiliste (rue de Lancry). La IIe Internationale tire son origine du premier. Y participent gues-distes, blanquistes et des délégués de vingt-trois pays.
Mais, en fait, c’est au congrès de Bruxelles en 1891 que naît la IIe Internationale*, très différente de la Ire, dominée par le marxisme du point de vue doctrinal et déchirée par la lutte des tendances.
C’est la question du parlementa-
risme et de l’opportunisme qui départage officiellement l’Internationale en une droite, un centre et une gauche. La condamnation d’Eduard Bernstein est suivie par celle de Millerand (1900).
La résolution de Karl Kautsky, baptisée de « résolution caoutchouc » par la gauche allemande, le fait apparaître comme un conciliateur : « Dans un État démocratique moderne, la conquête du pouvoir politique par le prolétariat
ne peut être le résultat d’un coup de main, mais bien le long et pénible travail d’organisation prolétarienne sur le terrain économique et politique, de la régénération physique et morale de la classe ouvrière et de la conquête graduelle des municipalités et des assemblées législatives. »
En 1904, au congrès d’Amsterdam, les droitiers, qui pratiquent ouvertement la collaboration de classe et la participation ministérielle aux gouvernements bourgeois, sont condamnés plus explicitement. Il n’empêche que la pratique dominante des grands partis sociaux-démocrates, à l’exception du parti russe, sera, comme le soulignait Lénine, parlementaire et légaliste.