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La détonation

dans les gaz

Caractères fondamentaux de

la détonation dans les gaz

Dans un tube fermé contenant un

mélange gazeux explosif enflammé à l’une de ses extrémités, la vitesse de la flamme va en croissant, et il arrive fréquemment qu’elle passe, de façon pratiquement discontinue, à une valeur très élevée qui reste ensuite parfaitement constante. Berthelot et Vieille reconnurent que chaque mélange gazeux a sa vitesse maximale propre, et ils désignèrent du nom d’onde explosive ce mode de propagation de la flamme à une célérité très élevée, que l’on appelle plutôt maintenant détonation.

Ils reconnurent aussi que la célérité est indépendante de la matière et du diamètre du tube, pourvu que ce diamètre ne soit pas trop petit, et qu’elle est la même quand la détonation succède à une déflagration et quand elle est amorcée d’emblée, par exemple au moyen d’une amorce au fulminate de mercure.

La célérité de la détonation ne varie que peu avec la température et la

pression initiale du gaz explosif ; par exemple, pour le mélange d’hydrogène et d’oxygène de formule 2H2 + O2

(gaz électrolytique), la célérité sous la pression atmosphérique normale

est 2 821 m/s à 10 °C et 2 790 m/s à 100 °C ; à 10 °C, elle vaut respectivement 2 720 et 2 875 m/s à une pression moitié et à une pression double de la pression atmosphérique.

Théorie

Berthelot et Vieille comparèrent la vitesse de l’onde explosive (célérité de la détonation) à la vitesse moyenne que possèdent les molécules des gaz brûlés à la haute température à laquelle les a portées la détonation, et ils trouvèrent downloadModeText.vue.download 20 sur 591

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 7

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des valeurs du même ordre. Harold

Baily Dixon (1852-1930) crut plus tard que la célérité de la détonation est égale à la vitesse du son dans les gaz brûlés chauds. Mais Arthur Schuster (1851-1934) d’une part, en 1893, et Vieille d’autre part, en 1897, avaient pressenti une relation entre la détonation et la propagation des ondes de choc, dont Bernhard Riemann (1826-1866), puis Henri Hugoniot (1851-1887) avaient fait l’étude mathématique.

En 1899, David Léonard Chapman

(1869-1958) établit des équations dans lesquelles la détonation était considé-

rée comme une onde de choc accom-

pagnée d’une réaction chimique ; cette réaction est dans la majorité des cas celle d’un gaz combustible avec l’air, l’oxygène ou un autre gaz comburant, de sorte que, à la suite de Louis Crus-sard (1876-1959) en 1907, on appelle le phénomène une onde de choc et

combustion, la surface de l’onde étant une surface de discontinuité non seulement pour la vitesse matérielle, la pression et la température, mais aussi pour la composition chimique.

Indépendamment de Chapman, et

d’une manière plus générale que celui-ci, Emile Jouguet (1871-1943) a mis sur pied, entre 1901 et 1906, la théorie rigoureuse de ces ondes, théorie universellement appelée théorie de Chapman-Jouguet ou théorie hydro-thermodynamique de la détonation.

Ses équations fondamentales sont

d’ailleurs valables aussi bien pour les explosifs gazeux que pour les explosifs solides ; mais leur application est moins simple pour ces derniers parce qu’on connaît mal l’équation d’état des produits de la détonation sous des pres-

sions allant de 50 à 300 kilobars. La théorie a été approfondie depuis 1945

pour rendre compte de toutes les particularités qui ont été observées.

La détonation dans

les explosifs

solides et liquides

Dans le cas des explosifs solides, le contraste le plus frappant entre la dé-

flagration et la détonation est la célé-

rité élevée de cette dernière ; elle peut dépasser 8 500 m/s.

Dans les cartouches cylindriques, il existe une valeur du diamètre au-dessous de laquelle la détonation amorcée à un bout subit un affaiblissement puis cesse après un certain parcours, laissant une partie de l’explosif intacte.

Ce diamètre minimal, au-dessous duquel il n’y a pas de détonation stable, est appelé diamètre critique ; il varie d’un explosif à un autre ; il est égal par exemple à 2 mm dans la dynamite-gomme, à 12 mm dans la tolite, pour une densité de tassement de 1,10 g/

cm 3, et à 18 mm pour le nitrométhane.

Le diamètre croissant à partir de sa valeur critique, la célérité de la détonation augmente, comme Berthelot

l’avait reconnu en 1885, puis atteint une valeur constante lorsque le diamètre a atteint ce qu’on appelle le diamètre limite. Aux diamètres supérieurs à cette limite, la détonation est dite

« détonation idéale ».

Dans les détonations non idéales, la dé-

tente latérale des produits de la détonation fait perdre une partie de l’énergie qui entretient l’onde de choc spéciale constituant le front de détonation, et la célérité observée est alors moindre que celle de la détonation idéale. Au-dessous du diamètre critique, la perte d’énergie est si forte qu’un régime de détonation stable n’est plus possible.

Pour des explosifs logés dans des enveloppes métalliques épaisses, l’inertie de celles-ci s’oppose à la détente laté-

rale des gaz, et, en réduisant la perte d’énergie, permet d’obtenir la célérité de la détonation idéale à un diamètre plus petit que le diamètre limite.

Dans la détonation des explosifs

solides, la célérité est une fonction de la densité de chargement ; avec les explosifs nitrés usuels, elle est, dans l’intervalle des densités allant de 1,10

à 1,60 g/cm 3, une fonction à peu près linéaire de la densité ; à la densité de 1,5 g/cm 3, presque tous ces explosifs détonent à une vitesse comprise entre 6 500 et 7 500 m/s. Les explosifs

liquides détonent à des vitesses comparables : 7 600 m/s pour la nitroglycérine (d = 1,60), 6 630 m/s pour le nitrométhane (d = 1,145).

Les explosifs chloratés et les explosifs nitratés ont, aux densités auxquelles on les emploie pour les travaux de mine, un diamètre limite de l’ordre de 100 mm, de sorte que les cartouches à enveloppe en papier (enveloppe sans inertie) de 25, 30 ou 40 mm, qui sont les diamètres les plus pratiquement employés, détonent à une vitesse d’autant plus faible que le diamètre est plus petit ; pour chaque diamètre, il existe une densité pour laquelle la célérité est maximale ; à une densité un peu plus élevée, la détonation n’est plus stable.

L’étude de la décroissance de la

célérité entre le diamètre limite et le diamètre critique a permis de préciser l’épaisseur de la zone de réaction, c’est-à-dire de la zone comprise entre le front de l’onde de choc et le plan, dit « plan de Chapman-Jouguet », où la réaction chimique irréversible produite par le choc est achevée.

On a ainsi trouvé l’épaisseur de

la zone de réaction égale à 0,8 mm pour l’hexogène, à 2 mm pour l’acide picrique et à 9 mm pour la nitrogua-nidine : par conséquent, pour ces explosifs, la réaction d’explosion s’accomplit, dans cette zone, en une durée de 0,1 à 1,2 μs.

Sur une paroi solide mince en

contact avec un explosif qui détone, une pression énorme vient s’appliquer quasi instantanément ; elle peut projeter, en la fragmentant, cette paroi à une vitesse de plusieurs kilomètres par seconde ; en donnant, comme on le fait dans les charges creuses, une forme appropriée à cette paroi, il est possible de la rassembler en un jet qui, lancé à 10 km/s, possède un pouvoir de perfo-

ration élevé.

Dans l’air, l’onde de choc issue d’un explosif qui détone peut produire des effets destructeurs divers dans le milieu environnant. Elle peut aussi faire détoner une autre charge explosive à quelque distance : ce phénomène porte le nom de détonation par influence.