Les Fourmis à miel des déserts amé-
ricains offrent l’exemple d’ouvrières devenant de vraies outres vivantes, gavées d’un miel qu’elles régurgiteront à leurs compagnes pendant la saison sèche. Mentionnons enfin les Fourmis champignonnistes, qui cultivent dans leur fourmilière une espèce de Champignon dont elles se nourrissent.
Fourmis à miel
Chez quelques espèces, des ouvrières accumulent dans leur jabot les liquides sucrés apportés par des pourvoyeuses, qui les ont récoltés sur des végétaux ou sur les Pucerons ; reconnaissables à leur abdomen distendu, elles constituent des outres vivantes qui régurgiteront leurs réserves aux downloadModeText.vue.download 552 sur 567
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 8
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membres de la société pendant la saison sèche, lorsque les sources extérieures de nourriture sont taries.
Les plus curieuses sont les Myrmecocys-tus des déserts du Colorado : les ouvrières pot-de-miel restent suspendues pendant plusieurs mois à la voûte des chambres de la fourmilière ; leur abdomen atteint le volume d’un pois. D’autres Fourmis à miel, encore capables de se déplacer, ont été signalées en Australie et en Afrique du Sud.
Des Fourmis pratiquent
l’élevage et parfois se
droguent
Beaucoup de Fourmis sont attirées par les exsudats sucrés produits par divers Insectes, en particulier les Pucerons ; lorsqu’ils sont frôlés par les antennes des ouvrières, ceux-ci expulsent par l’anus un miellat riche en sucre, dont elles sont avides. Certaines formes (Lasius, Fourmi d’Argentine) rassemblent des Pucerons sur des rameaux, les visitent régulièrement, les transportent d’une plante à l’autre et même les installent sur des radicelles dans la fourmilière à la mauvaise saison ; elles disposent ainsi d’un véritable cheptel, qui leur procure une abondante provende.
D’autres Fourmis élèvent des Cochenilles ou bien divers autres Homoptères.
Certaines chenilles, comme celles des Lycénidés, attirent également les Fourmis par une sécrétion ; elles peuvent être portées dans le nid, où elles se nourrissent des larves et des nymphes de leurs hôtes.
Avec quelques Coléoptères, les rapports deviennent fort étranges ; ainsi, la Fourmi rouge héberge et nourrit la larve du Staphylin Lomechusa, en échange d’un délicieux produit quelle lèche avec avidité ; mais cette substance déclenche une véritable ivresse, qui perturbe gravement son comportement ; la Fourmi délaisse son couvain et consacre tous ses soins aux étrangers, dont on a comparé les méfaits à ceux de l’alcool ou de la drogue chez l’Homme.
Les chemins de Fourmis
Rayonnant autour de leur nid, les ouvrières suivent des pistes parfois visibles sur le sol ; on a pu constater la pérennité de certaines pistes pendant quatorze ans chez Formica rufa ! Les Fourmis jouissent de facultés d’orientation assez extraordinaires, et l’on
ne connaît pas encore tous les mécanismes qui permettent leur retour au nid. On invoque des facteurs tactiles, visuels et olfactifs. D’ingénieuses ex-périences ont montré que les ouvrières repéraient la direction des rayons du soleil frappant à l’aller quelques ommatidies et que le retour était assuré approximativement quand le soleil frappait les ommatidies opposées ; il semble, également, que les Fourmis retiennent quelques repères visuels sur leur chemin. Les recherches actuelles mettent en évidence le rôle essentiel joué par l’olfaction ; les Fourmis disposent d’un ample éventail de substances odorantes émises par plusieurs glandes ; elles marquent leurs pistes par ces sécrétions, que sauront reconnaître les antennes ; on a également mis en évidence une substance d’alarme que projette une ouvrière attaquée et qui avertit ses soeurs les plus proches.
Les Fourmis se meuvent dans un univers olfactif complexe, difficilement imaginable pour nous.
Quand deux espèces de
Fourmis se rencontrent...
Tous les types de rapports, ou presque, peuvent exister entre Fourmis d’es-pèces différentes. La guerre s’installe souvent, avec deux conséquences
possibles : l’élimination d’une espèce ou sa mise en servitude. Iridomyrmex humilis, la Fourmi d’Argentine, nous offre un exemple du premier cas : en envahissant les Açores, puis le littoral méditerranéen, elle s’opposa à l’espèce indigène Pheidole pallidula et finit par la faire disparaître. Les Fourmis esclavagistes illustrent le second cas : les Raptiformica pillent nymphes et ouvrières des Serviformica et utilisent leurs services.
Il arrive que deux Fourmis d’espèces différentes cohabitent dans le même nid. Il s’agit parfois de relations pacifiques : en Colombie Dolichoderus et Crematogaster ont été observés vivant en bonne intelligence et allant ensemble sur les lieux de récolte ; en Europe, on a même constaté des échanges trophallactiques entre Formica polyctena et Formica rufa. Le plus souvent, les rapports tiennent du parasitisme : une espèce de petite taille comme Sole-
nopsis fugax creuse ses galeries dans les cloisons du nid de Formica fusca et pille les provisions et le couvain de son hôte ; on a signalé plus haut le cas d’Anergates, qui vit constamment aux dépens de son hôte Tetramorium ; la reine de Bothriomyrmex pratique un parasitisme temporaire vis-à-vis d’un Tapinoma.
On a comparé leurs hordes
féroces à celles des Huns
et des Tatars
Les Fourmis légionnaires, ou Doryles, ont sinistre réputation ! On les connaît en Afrique (Anomma ou « magnans ») et en Amérique (Eciton). N’édifiant pas de nid permanent, elles mènent une vie nomade entrecoupée de bivouacs ; au repos, les ouvrières s’agglomèrent en une masse temporaire autour du couvain et des sexués ; la femelle, aptère, se distingue par son énorme abdomen, signe d’une fécondité exceptionnelle ; le mâle, ailé, est doté d’une grande longévité.
Que ce soit pour chasser ou pour chercher un nouveau gîte, la société se déplace en colonnes imposantes, groupant des millions d’individus et pouvant atteindre 10 m de large et plusieurs centaines de mètres de long ; au centre se trouvent les ouvrières, transportant parfois les sexués et les Staphylins commensaux ; sur les côtés, des soldats, aux mandibules mena-
çantes tournées vers l’extérieur. Tout animal qui n’a pu fuir est submergé par une foule avide et, avec une rapidité inouïe, déchiqueté et dévoré. Les indigènes pré-
fèrent quitter leur case envahie par ces implacables carnivores, tous aveugles ; ils la retrouvent débarrassée des hôtes indé-
sirables (rongeurs, Scorpions, Cafards, ver-mine), mince compensation à la perte des aliments carnés et des animaux domestiques parqués.
Comment des Fourmis
parviennent à en réduire
d’autres à l’esclavage
Incapables du moindre travail, les Fourmis amazones (Polyergus rufescens) se font servir par les ouvrières d’une autre espèce, en général Formica fusca ; elles pénètrent
en rangs serrés dans un nid convoité, y livrent des combats aussi brefs qu’efficaces et en sortent chargées de cocons, qu’elles ramènent dans leur propre fourmilière ; quand les ouvrières fusca éclosent, elles soignent et nourrissent les amazones ainsi que leur couvain ; on observe donc des so-ciétés mixtes, où vivent jusqu’à 85 p. 100