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L’État, enfin, a délimité des zones spéciales d’action rurale et des zones de rénovation rurale pour atténuer les difficultés régionales les plus accusées par des mesures qui visent surtout à renforcer l’équipement et l’emploi non agricole dans les bourgs et petites villes (Bretagne, Manche, montagnes). Le VIe Plan doit voir s’élaborer des plans d’aménagement ruraux (P. A. R.) destinés à proposer des mesures globales et concertées par petites régions. Par ailleurs, l’encouragement aux syndicats de communes, notamment S. I. V. O. M. (syndicats intercommunaux à vocation multiple), et aux regroupements de communes est de nature à faciliter certaines actions (adduction d’eau, ramassage scolaire, etc.) ; l’aménagement agricole tend à devenir plus complètement rural.

L’ensemble de ces efforts individuels, professionnels et officiels a déjà eu des résultats très positifs. Avec beaucoup moins d’hommes, et même moins de surface cultivée, la production a fortement augmenté. La plupart des rendements nationaux ont doublé en quinze ou vingt ans. Les revenus sont donc partagés entre des familles bien moins nombreuses et ont fortement augmenté, quoique les frais de culture se soient accrus. Par travailleur, ils paraissent encore inférieurs à ceux de l’industrie ou du commerce, mais les statistiques sont ici douteuses ; il semble bien que les gains de productivité aient été supérieurs à ceux de l’industrie dans les quinze dernières années. Mais il devient de plus en plus difficile de généraliser : les moyennes nationales ont peu de sens, tant se sont accusées les disparités entre types d’exploitations et entre régions.

Les grandes régions

Les meilleurs résultats individuels sont obtenus dans les plaines et plateaux

de grande culture du Bassin parisien, orientés vers la production de céréales (blé, orge et de plus en plus maïs), de betterave à sucre et de pomme de terre, parfois vers l’élevage bovin intensif sur les sous-produits de la culture et vers les productions spécialisées sous contrat comme les petits pois, les fruits, etc. La prédominance de grandes exploitations de plus de 100 ha, rationnellement équipées, aux grandes parcelles, dont les chefs ont une solide formation professionnelle, ont réduit leurs charges salariales, savent se servir de la coopération, agir en commun et disposent d’un grand poids politique, en a fait des régions à haut revenu global et individuel, où le genre de vie des exploitants n’a rien à envier à celui de bien des industriels.

Un autre grand ensemble de régions est celui des pays de l’Ouest, où dominent les productions animales, les exploitations encore petites (souvent 15 ou 20 ha) avec une population trop abondante et un encadrement urbain insuffisant. Malgré des efforts localement considérables, comme en Finistère, et le développement d’ateliers modernes d’élevage (bovins, et surtout porcs et volailles en batteries), les ré-

sultats individuels et les éléments de confort restent insuffisants, et l’exode continue. À l’intérieur même de ces pays, une Bretagne dynamique, surpeuplée et souvent déçue en matière de débouchés, qui est avec l’Alsace et le Nord la région de France qui tire le plus d’un hectare de terre, se sépare assez nettement d’une Normandie qui s’est un peu trop reposée sur ses anciens succès.

Une grande bande associe les pourtours du Bassin parisien du sud et de l’est : sur un relief plus accidenté où les bois s’étendent, des exploitations souvent supérieures à 50 ha y pratiquent une polyculture plutôt tournée vers les produits animaux. Les densités sont peu élevées, le territoire agricole se rétrécit, mais les revenus individuels sont meilleurs qu’à l’ouest.

Tout le reste du territoire est extrê-

mement contrasté. Des zones de vide ou de découragement, en montagne et sur les plateaux calcaires ou cristallins

peu doués du Nord-Est aquitain, du Massif central ou du Jura, y voisinent avec des taches de dynamisme, dont les origines sont fort variées : petites exploitations très intensives des régions industrielles (Nord, Alsace, Lyonnais), vieux vignobles de qualité ou de masse (Bordelais, Cognac, Languedoc, Bourgogne, Côtes de Provence), ensembles très spécialisés, en partie grâce à l’irrigation (comtat Venaissin, Roussillon, est de la plaine languedocienne), grands domaines modernes de la rizi-culture en Camargue forment un premier groupe actif, aux bons résultats à l’hectare et par travailleur, mais où se posent souvent des problèmes de commercialisation. Ailleurs, des groupes d’exploitants moyens, souvent sous l’impulsion de jeunes bien organisés, de migrants et de rapatriés d’Afrique du Nord, ont rénové le vieux fonds de polyculture, comme dans certaines parties du Midi toulousain, du Ségala, des Charentes ou des plaines de la ré-

gion Rhône-Alpes : ce sont surtout des problèmes de structure, et notamment d’agrandissement des exploitations, qui se posent à eux, du moins quand les densités de population restent élevées.

Le bilan

Aussi la faiblesse générale des revenus agricoles (d’ailleurs biaisée par la médiocrité des données et des avantages fiscaux traditionnellement accordés à l’agriculture) et surtout celle des indices de confort et d’équipement doivent-elles être fortement nuancées : dans l’ensemble, on retrouve la coupure de la France en une moitié, orientale, à l’est d’une ligne joignant Le Havre à Perpignan, active et bien équipée, et une moitié occidentale, plus démunie malgré les efforts locaux.

L’évolution n’est certes pas terminée. On compte environ 150 000 dé-

parts de ruraux par an et 50 000 fermetures d’exploitations. Mais si, naguère, downloadModeText.vue.download 14 sur 573

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 9

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les moins doués surtout restaient à la terre, la complexité du métier et l’amé-

lioration des revenus font que l’émigration a changé de nature, et que la qualité des agriculteurs s’améliore sans cesse. Toutefois, le morcellement est encore trop fort : la moitié des exploitations n’ont pas 11 ha ; il est vrai que beaucoup sont des exploitations de retraite, ou à temps partiel, sans parler des vignes de cru ou des maraîchers.

Quelques carences sont constatées en matière d’industries agricoles et alimentaires : la France ne transforme pas assez ses productions. Ces industries assument cependant 6,2 p. 100

du produit national, qui s’ajoutent aux 8,4 p. 100 de l’agriculture elle-même, et bénéficient d’une vague de regroupements et de la pénétration de capitaux étrangers à l’agriculture (B. S. N.

par exemple) ou même à la France.

C’est encore assez loin des pays industriels voisins, et la France exporte trop de produits bruts.

C’est tout récemment que le com-

merce extérieur des produits agricoles et alimentaires est devenu bénéficiaire : 15 milliards de francs aux exportations (à peu près constamment le sixième des exportations totales), dont 32 p. 100

viennent des céréales (plus de 10 Mt, la moitié de la collecte) et 17 p. 100

des vins et spiritueux ; 13,6 milliards d’importations (soit 15 p. 100 des importations totales, contre 25 p. 100

en 1958), mais dont le septième seulement consiste en produits tropicaux, tout le reste étant donc des denrées que la France peut, en fait, produire.

Le budget d’État consacré à l’agriculture est assez lourd : environ 17,5 milliards de francs, soit une somme égale à la moitié du revenu brut d’exploitation... On en compte 5 milliards au titre de l’intervention sur les prix, 7 pour la protection sociale, 3 pour l’aménagement direct des structures.

Les perspectives du VIe Plan pré-

voient des augmentations substantielles de la consommation des fruits, légumes, laitages et viandes, et de l’alimentation du bétail (qui absorbe déjà les trois quarts des céréales produites).

Or, c’est incontestablement dans ces domaines surtout que de gros efforts d’organisation restent à faire. Par ailleurs, la législation devrait plus claire-