Presque aussi timoré que ses homologues alliés, l’état-major allemand s’est vu imposer par Hitler l’audacieuse doctrine de la guerre éclair menée par le couple char-avion, expérimentée de 1936 à 1939 lors de la guerre civile espagnole et des invasions de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie. La Pologne disposait aux ordres du maréchal Rydz-Smigli d’une vingtaine de divisions et de 10 brigades de cavalerie soutenues par 447 avions et 280 chars anciens.
La Wehrmacht attaque concentriquement, à partir de la Prusse-Orientale, de la Silésie et de la Slovaquie avec 63 divisions, dont 7 Panzer, soit environ 2 000 blindés et près de 2 000 avions. Surprise en cours de mobilisation, mal déployée, l’armée polonaise, bousculée et rapidement tronçonnée, résistera jusqu’au 27 septembre. Dix jours
avant, elle avait reçu le coup de grâce : alors que Varsovie venait d’être investie, les forces soviétiques, conformé-
ment aux accords du 23 août, franchissaient la frontière orientale polonaise et marchaient à la rencontre de la Wehrmacht. Conquise en vingt-six jours, la Pologne est le 28 septembre à Moscou l’objet d’un quatrième partage. Il fixe la ligne du Bug comme frontière germano-soviétique, en échange de quoi l’U. R. S. S. obtient de s’installer dans les États baltes, y compris en Litua-nie. Quant à l’Allemagne, elle annexe Memel, Dantzig et son corridor, la Posnanie et la Silésie polonaise. Les régions de Varsovie et de Cracovie, où est concentrée la population, forment un gouvernement général placé sous administration allemande : le terme même de Pologne a disparu.
Drôle de guerre à l’ouest et
campagne de Finlande
Sur le front français, les opérations sont très limitées durant l’hiver 1939-40.
Sur mer, elles sont marquées par le torpillage du cuirassé anglais Royal Oak dans la rade de Scapa Flow (14 oct.) et le sabordage du cuirassé allemand Graf von Spee devant Montevideo
(17 déc.) : la Kriegsmarine ne dispose alors que de 22 sous-marins de haute mer, et la guerre sous-marine n’en est qu’à ses débuts.
Les gouvernements alliés se sont organisés pour la guerre. À Londres, Churchill prend la tête de l’amirauté, et Eden devient ministre des Dominions ; à Paris, Daladier, déjà président du Conseil et ministre de la Défense nationale, s’approprie les Affaires étrangères et dissout les organisations communistes qui, à limage de Moscou, condamnent la guerre. Il obtient les pleins pouvoirs du Parlement, tandis que le général Gamelin* est reconnu généralissime du front occidental. La stratégie demeure défensive à l’abri de la ligne Maginot et se cantonne dans un blocus dont les Alliés attendent la décision ou au moins le temps nécessaire pour réduire le retard de leurs armements. Une offre de paix de Hitler (6 oct.) est repoussée, comme la médiation du roi Léopold et de la reine Wilhelmine. Au printemps de 1940,
un voyage d’information en Europe de Sumner Welles (1892-1961), secrétaire d’État adjoint américain, révèle l’impossibilité d’un compromis.
Au même moment, les états-ma-
jors alliés envisagent, pour parfaire le blocus, des actions aériennes péri-phériques sur les pétroles roumains comme sur les mines de fer Scandinaves. Ces projets prennent corps au moment où l’U. R. S. S. attaque la Finlande (30 nov.), ce qui lui vaut d’être exclue de la Société des Nations. La résistance de l’armée finnoise étonne le monde jusqu’en février 1940, date où les Russes finissent par forcer la ligne Mannerheim, qui barre l’isthme de Carélie. Par le traité de Moscou du 12 mars 1940, l’U. R. S. S. annexe la Carélie finlandaise et afferme la presqu’île de Hanko (Hangö en suédois).
Occupation du Danemark,
campagne de Norvège
Le 16 lévrier 1940, le cargo allemand Altmark est arraisonné dans les eaux norvégiennes par un destroyer anglais, et, le 8 avril, les Alliés annoncent le minage des eaux territoriales de la Norvège pour empêcher le Reich de se ravitailler par Narvik en minerai de fer suédois. Dès le lendemain, Hitler devance ces projets en occupant le Danemark et en envahissant la Norvège.
Les Alliés répondent en débarquant au nord et au sud de Narvik du 13 au 20 avril. La flotte anglaise attaque ce port avec succès, mais la supériorité de la Luftwaffe contraint les Alliés à concentrer dans cette seule région leur action terrestre : la prise de Narvik le 28 mai par les Français de Béthouart ne sera qu’un succès éphémère pré-
cédant de peu le rembarquement des troupes alliées, imposé par l’offensive allemande sur la France. Par cette nouvelle victoire, Hitler, s’assure aussi bien les portes de la Baltique que la côte norvégienne et contrôle ainsi les débouchés vers l’ouest de l’économie suédoise. Dès le 9 avril, un gouvernement Quisling, aux ordres des Allemands, a été installé à Oslo, forçant le roi Haakon VII à gagner l’Angleterre (juin). Au Danemark, le roi Christian X
décide de demeurer avec son peuple, mais l’Islande, où débarquent les
troupes anglaises (10 mai 1940), puis américaines (7 juill. 1941), proclame son désir de dénoncer son union avec le Danemark.
Guerre éclair aux Pays-Bas, en
Belgique et en France
Le remplacement de Daladier par Reynaud à la tête du gouvernement fran-
çais le 22 mars 1940 accentuait l’engagement de la France dans la guerre : le 28, elle signait avec l’Angleterre une déclaration où les deux nations s’interdisaient de conclure toute paix séparée.
Le 10 mai, la Wehrmacht déclen-
chait son offensive générale entre les Pays-Bas et le Luxembourg. Cinq semaines plus tard, après les dramatiques batailles de Sedan et de Dunkerque, les capitulations hollandaise et belge (v. France [campagne de]), l’avance des troupes allemandes posait au gouvernement français de redoutables problèmes politiques, au moment où, le 10 juin, l’Italie lui déclarait la guerre. Le 11, au Conseil suprême allié de Briare, le gé-
néral Weygand*, soutenu par Pétain*, que Paul Reynaud a appelé le 18 mai dans son gouvernement, prend position en faveur d’un armistice, tandis que l’amiral Darlan* s’engage, vis-à-vis de Churchill, à ce que la flotte française ne tombe jamais au pouvoir de l’Allemagne. L’avance de la Wehrmacht se poursuit, et Reynaud, qui préconisait la continuation de la lutte en Afrique du Nord, démissionne le 16 juin. Appelé par le président Lebrun, Pétain lui succède comme chef du gouvernement et demande aussitôt l’armistice, signé le 22 juin à Rethondes avec l’Allemagne et le 24 à Rome avec l’Italie.
Les clauses de l’armistice, qui, jusqu’à sa libération en 1944, vont peser sur la France, sont particuliè-
rement sévères. Son gouvernement perd en effet le contrôle des trois cinquièmes du territoire national, soit toute la région nord-est du pays, Paris, la Bretagne et une bande côtière allant jusqu’à la frontière espagnole, qui seront occupés par l’Allemagne. Il est convenu que les deux millions de prisonniers le resteront jusqu’à la paix, et que la France paiera l’entretien des troupes d’occupation allemandes. Elle
conserve toutefois son empire colonial, sa marine (à peu près intacte), une armée de 100 000 hommes et une zone non occupée où, le 2 juillet, Pétain installe à Vichy son gouvernement.
Le jour même où le vieux maréchal demandait l’armistice, le 17 juin, le général de Gaulle, membre depuis le 5 juin du gouvernement de Paul Reynaud, ralliait Londres et proclamait le 18 juin son refus de l’armistice et son appel à continuer la lutte aux côtés de l’Angleterre. Tandis qu’ainsi naissait la France libre, Pétain recevait le 10 juillet de l’Assemblée nationale le pouvoir constituant et se proclamait chef de l’État (v. Vichy [gouvernement de]). Son autorité s’étendait sur l’ensemble de l’empire sauf l’Afrique-Equatoriale française, les établissements de l’Inde, Tahiti et la Nouvelle-Calédonie, qui, au cours de l’été, se ralliaient au géné-
ral de Gaulle.