La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 9
Gothique (août 1944), au nord de Florence, et abandonner la Grèce, où les Anglais, débarquant en octobre 1944, trouvent un pays affamé et déchiré entre les fractions rivales de la résistance. Dans une situation économique souvent désastreuse surgissent en Europe libérée d’épineux problèmes politiques.
En Belgique, dès le retour de Londres à Bruxelles du gouvernement Pierlot (8 sept.) se pose la question royale.
L’attitude de Léopold III pendant la guerre étant très critiquée, son frère, le prince Charles, est proclamé régent par le Parlement. Une union douanière est conclue entre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg (Benelux).
En France, le Comité de libération nationale s’est proclamé le 3 juin Gouvernement provisoire île la République française. De Gaulle s’est installé à Paris dès le 31 août et a inclus dans son gouvernement des personnalités de la Résistance (Bidault aux Ailaires étrangères). Mais la méfiance de Roosevelt fait retarder sa reconnaissance par les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’U. R. S. S. jusqu’au 23 octobre
1944. Le 11 novembre, la France est admise à la Commission consultative européenne de Londres, et, le 10 dé-
cembre, Bidault et Molotov signent à Moscou un traité d’alliance franco-soviétique. Toutefois, le problème le plus grave qui divise les trois Grands est celui de la Pologne. Depuis la dé-
couverte par les Allemands, en avril 1943, dans la forêt de Katyn, près de Smolensk, des restes de 4 500 officiers polonais, que plusieurs enquêtes affirmeront avoir été massacrés en 1940
par les Soviétiques, l’U. R. S. S., qui refuse cette allégation, a rompu toute relation avec le gouvernement polonais de Londres (25 avr. 1943).
L’Angleterre et les États-Unis ne reconnaissent que ce dernier, que dirige alors Mikołajczyk et de qui relèvent les troupes polonaises du général Anders, qui se battent aux côtés des Anglo-Américains. Mais un Comité de libération, soutenu par l’U. R. S. S., s’est installé à Lublin à la fin du mois de juillet 1944. Le 5 janvier 1945, il est reconnu par Staline comme gouvernement de la Pologne et s’installe à Varsovie dès l’entrée de l’armée rouge dans la capitale (18 janv.).
Le problème polonais sera l’un des principaux abordés par la conférence qui réunit à Yalta (Crimée), du 4 au 11 février 1945, Staline, Churchill et Roosevelt (réélu pour la quatrième fois en novembre 1944 président des États-Unis). Churchill est très méfiant à l’égard de Staline, et Roosevelt, qui s’intéresse surtout à la victoire contre le Japon et à l’Organisation des Nations unies, est très malade, comme l’est aussi son premier conseiller Harry Lloyd Hopkins (1890-1946). Et pourtant, c’est à Yalta que vont être prises les décisions qui conditionneront pour de longues années l’avenir du monde.
En Extrême-Orient, Roosevelt ob-
tient par un accord secret l’engagement de Staline d’entrer en guerre contre le Japon, trois mois après la défaite allemande, moyennant la cession de la moitié de Sakhaline, des îles Kouriles, de Port-Arthur et du chemin de fer de Dairen.
En Europe, les trois proclament leur
volonté d’« aider les peuples libres à former des gouvernements provisoires largement représentatifs de tous les éléments démocratiques qui s’engage-ront à établir par des élections libres des gouvernements correspondant à la volonté des peuples ». Il est admis que les frontières de la Pologne incluront le sud de la Prusse-Orientale (moins Kö-
nigsberg, annexé par l’U. R. S. S. [auj.
Kaliningrad]) et suivront à l’est la ligne Curzon et à l’ouest les cours de l’Oder (Odra) et de la Neisse (Nysa Łużycka).
Il est prévu que le gouvernement polonais de Lublin ne sera reconnu par Londres et Washington qu’après s’être élargi (v. Pologne). En Allemagne, ce sont les trois Grands qui détiendront l’« autorité suprême » sous la forme d’un Conseil de contrôle, auquel la France sera invitée à participer. La répartition des zones d’occupation des armées (convenue à Québec en septembre 1944) est confirmée, mais une zone prise sur celle des Anglais et des Américains sera confiée à la France.
L’organisation de la paix sera le fait d’une conférence des Nations unies convoquée à San Francisco le 25 avril 1945. Mais les décisions de son Conseil de sécurité exigeront un vote affirmatif de chacun de ses cinq membres permanents (Chine, États-Unis, France, Grande-Bretagne, U. R. S. S.). C’est l’origine du droit de veto, qui limitera beaucoup son efficacité.
La capitulation de l’Allemagne
Au lendemain des accords de Yalta commence la dernière bataille, qui, à l’est comme à l’ouest, se livre en territoire allemand. À l’ouest. Eisenhower dispose de 93 divisions — 60 américaines, 14 britanniques, 5 canadiennes et 14 françaises (dont 4 bouclent les poches allemandes de Dunkerque,
Lorient et Royan) — et de 4 brigades alliées (belge, hollandaise, polonaise et tchèque). À l’est, l’armée rouge est répartie en huit fronts : quatre d’entre eux joueront un rôle capital, celui de Malinovski, axé sur Vienne, celui de Rokossovski, sur la Poméranie, ceux de Joukov et de Koniev, sur Berlin.
Ce dernier, qui a franchi l’Odra les 11 et 24 février, fait sa jonction avec Joukov en basse Silésie, tandis que
Malinovski, entré à Budapest le 13 fé-
vrier, pénètre en mars en Autriche. Au même moment, à l’ouest, les Alliés percent la ligne Siegfried et foncent sur le Rhin, qu’ils franchissent à Remagen (7 mars), à Oppenheim et près de Wesel (23-24 mars). Le 25 mars, la totalité de la rive gauche du Rhin est aux mains des forces d’Eisenhower. La Hollande est isolée par les Britanniques, qui arrivent le 19 avril sur l’Elbe. Le 1er avril, les Américains ont encerclé la Ruhr (où 18 divisions capitulent) et marchent aussitôt sur l’Elbe en direction de Magdeburg et de Leipzig, tandis que Patton, entré à Francfort le 29 mars, pénètre en Thuringe et s’arrête sur ordre le 18 avril à Plzeň (90 km de Prague). Au sud, du 19
au 29 avril, les Américains atteignent Nuremberg, Ratisbonne et Munich, de Lattre pénètre en Forêt-Noire et au Wurtemberg, atteint Ulm (24 avr.) et s’engage en Autriche ; le 4 mai, la division Leclerc prend Berchtesgaden.
Le 13 avril, les Russes sont entrés à Vienne et, remontant le Danube, prennent liaison avec les Américains en aval de Linz. Du 16 au 20 avril, Joukov et Koniev rompent le front allemand de l’Oder et atteignent Berlin, conquis le 2 mai par l’armée rouge.
Le 30 avril, Hitler s’est suicidé après avoir désigné l’amiral Dönitz* pour lui succéder. Des contacts s’établissent entre l’armée rouge et les forces anglo-américaines, notamment à Torgau
(Hodges-Koniev, le 25 avr.) et près downloadModeText.vue.download 570 sur 573
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de Wismar (Dempsey-Rokossovski, le 3 mai). Malinovski et Koniev font leur jonction à Prague du 6 au 9 mai.
En Italie, le groupe d’armées
Alexander débouche le 9 avril de la ligne Gothique en direction du Pô.
Ses troupes prennent liaison le 29
près de Turin avec l’armée française des Alpes, le 1er mai près de Trieste avec les forces de Tito et le 4 mai avec celles d’Eisenhower, qui ont franchi le Brenner. Mais, le 29 avril, le commandement allemand a signé à Caserte la
capitulation de ses armées en Italie, en Autriche, en Styrie et en Carinthie. La veille, Mussolini avait été exécuté par des partisans près du lac de Côme.
Le 4 mai, les troupes allemandes des Pays-Bas et du nord de l’Allemagne capitulaient à Lüneburg entre les mains de Montgomery, et, le 7 mai, l’amiral Dönitz mandatait le général Jodl pour signer à Reims la reddition inconditionnelle de l’ensemble de la Wehrmacht aux armées alliées et soviétiques. Elle était confirmée le lendemain à Berlin par le maréchal Keitel en présence des généraux Joukov, A. Tedder. C. Spaatz et de Lattre. Le 22 mai, les Alliés faisaient prisonniers tous les membres du gouvernement fantôme de Donitz à Flensburg : l’Allemagne vaincue avait ainsi perdu toute existence politique.