Выбрать главу

Clay avait une impression de total désenchantement.

Il avait froid en dedans.

Sa vie finissait.

Un jour ou l’autre, toutes les vies finissent. À lui son heure avait sonné : il acceptait son destin.

Le groupe tourna le couloir… Le directeur de la prison les attendait avec les journalistes.

Sans un mot, il s’effaça pour laisser entrer le condamné.

Clay vit la chaise.

Il l’avait déjà vue ; à cette époque-là, il ne pensait pas devoir un jour s’asseoir dessus.

Il eut un frémissement.

Le pasteur s’écarta et les gardiens le conduisirent au siège mortel.

L'un d'eux noua les sangles tandis que l’autre fixait le casque sur sa tête.

On n’entendait plus que la respiration des assistants.

Clay ne réagissait plus.

Il avait joué à pile ou face et il avait perdu.

Il promena un regard morne sur les spectateurs de sa mort. Au tout premier rang, il y avait Ox.

Le gros Ox, sourcils froncés, lèvres serrées.

Ox qui était venu lui donner un petit coup de main pour franchir la porte étroite de l’infini.

Le lieutenant cligna de l’œil à son ancien collaborateur. Puis, prenant une décision brusque, il s’avança vers lui.

Les gardiens reculèrent, leur besogne terminée. Ox se pencha alors sur Clay :

— Bon courage, Clay, chuchota-t-il. Si ça peut vous aider à faire la culbute, je vais vous dire que j’ai tout pigé dans votre affaire… Je sais que c’est à cause de cette fille que vous êtes là…

Le regard du condamné exprimait une immense gratitude.

Ox poursuivit :

— J’ai pigé aussi pourquoi vous avez renoncé à l’accabler. Vous vous êtes dit que votre mort serait un exemple, que, puisqu’elle était inévitable, il fallait au moins qu’elle serve à quelque chose… Ici, c’est à foutre la pétoche aux jeunots de chez nous… C'est bien, mon gars, je vous remercie.

Clay voulut parler, mais Ox s’étant reculé, le directeur venait de donner le signal et la grande secousse traversa son corps.

Il se crispa dans ses liens, eut une contorsion terrible qui tendit les courroies.

Son visage devint violet.

Puis il s’affaissa.

Le courant fut interrompu, puis remis, puis interrompu à nouveau.

Un médecin s’approcha, ausculta méthodiquement le supplicié. Après quoi il se tourna vers les assistants et dit d’une voix nette :

— Je déclare que cet homme est mort.

— Dieu ait pitié de son âme, répondit le pasteur.

CONCLUSION

Gloria Masure roulait à vive allure sur la côte de Floride.

La route escarpée longeait la mer, la surplombant.

À un moment donné, elle aperçut une petite crique bien tentante et décida de se baigner.

La vie était belle : elle était riche. Elle avait gagné la terrible partie de pile ou face…

C'était rudement fameux de vaincre !

Elle vit une vieille Pontiac se ranger derrière sa voiture.

Un homme énorme, vêtu d’une extravagante chemise jaune et d’une cravate orange, en descendit.

Cela faisait un bout de temps déjà qu’il la suivait.

Elle lui jeta un regard méfiant.

— Beau temps, dit-il aimablement.

Ç’avait l’air d’un bon gros, elle fut rassurée.

Elle s’approcha de la falaise pour examiner la crique et voir si quelque sentier n’y conduisait pas.

Elle était à deux pas du gouffre.

Le gros homme s’approcha d’elle :

— Drôle de point de vue, murmura-t-il.

Il l’intriguait.

Le gros homme sortit un revolver.

— Reculez ! dit-il.

Elle eut un sursaut, regarda autour d’elle.

Le paysage était désertique.

— Au secours ! hurla-t-elle.

— Reculez ! insista calmement le gros homme.

Elle eut peur. Elle fit un pas en arrière, battit des bras et chuta dans le vide.

Alors, le lieutenant Ox rengaina son arme et retourna à sa voiture.

Il allait pouvoir passer des vacances paisibles, maintenant.

C'était un type qui ne pouvait supporter les injustices.