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Les oreilles de l’Ogier frémirent d’incertitude.

— Bien sûr que si ! Tant que tu ne risqueras rien en étant à mes côtés, et même après, je te garderai mon amitié.

L’Ogier eut un sourire qui lui fendit en deux le visage.

— Je reste aussi, confirma Perrin avec un rien de résignation – ou d’acceptation, peut-être – dans la voix. La Roue nous a rudement piégés dans la Trame, mon vieux. Qui aurait cru ça à Champ d’Emond ?

Les soldats formaient à présent un cercle autour de Rand. À sa grande surprise, tous s’agenouillèrent, les yeux braqués sur lui.

— Nous voulons te jurer allégeance, dit Uno.

Les autres approuvèrent du chef.

— Votre fidélité va à Ingtar et au seigneur Agelmar, objecta Rand. Ingtar est mort en héros, mon ami, afin que nous puissions fuir avec le Cor.

Personne n’aurait jamais besoin d’en savoir plus. Avec un peu de chance, Ingtar aurait retrouvé la Lumière, et rien d’autre ne comptait.

— Uno, tu devras le dire à Agelmar, lorsque vous retournerez à Fal Dara.

— Il est écrit, murmura le sergent borgne, que le Dragon Réincarné brisera toutes les loyautés et annulera tous les serments. Plus rien ne nous lie à rien, désormais, et c’est à toi que nous voulons jurer fidélité.

Uno dégaina son épée et la posa devant lui, la poignée orientée vers lui. Tous les soldats l’imitèrent.

— Tu as affronté le Ténébreux, dit Masema.

Masema qui avait tant haï Rand et qui le regardait maintenant comme s’il était l’incarnation même de la Lumière.

— Je t’ai vu, seigneur Dragon. Je suis ton serviteur, jusqu’à la mort…

— Rand, tu dois choisir, dit Moiraine. Que ce soit ton œuvre ou non, le monde sera disloqué, parce que Tarmon Gai’don approche et se chargera de le dévaster. Veux-tu toujours te voiler la face et laisser l’humanité seule au moment de l’Ultime Bataille ? Allons, choisis !

Tous le regardaient et attendaient.

La mort est plus légère qu’une plume et le devoir plus écrasant qu’une montagne.

Rand al’Thor prit sa décision.

50

Après

Par les mers et les fleuves, par les routes et les chemins, par les caravanes de marchands et par les voyageurs solitaires, l’histoire du duel se répandit comme une traînée de poudre. Sans cesse altérée et pourtant toujours semblable, elle annonça aux peuples de l’Arad Doman, du Tarabon puis de bien d’autres royaumes que des signes et des présages étaient apparus dans le ciel de Falme.

Des hommes déclarèrent alors qu’ils étaient le Dragon. D’autres hommes les abattirent, puis furent éliminés à leur tour.

Une autre histoire passa de gorge en gorge. Celle d’une colonne de cavaliers qui traversa la plaine d’Almoth après avoir jailli du soleil couchant. Une centaine de Frontaliers, dirent certains. Non, un millier, affirmèrent d’autres.

Non, objectèrent d’autres encore, un millier – ou peut-être dix milliers – de héros ramenés du néant de la tombe par le Cor de Valère. Des guerriers qui avaient anéanti une légion de Fils de la Lumière, puis rejeté à la mer les armées d’Artur Aile-de-Faucon revenues d’un impossible voyage.

Mais non, s’écrièrent d’autres encore, ces guerriers, c’étaient les armées d’Artur de retour après tant de siècles. Et, à jamais, elles galoperaient vers les montagnes, en direction du levant.

Si différentes qu’elles soient, toutes ces histoires avaient un point commun. L’homme dont le visage était apparu dans le ciel de Falme chevauchait à la tête de cette glorieuse troupe, et l’étendard du Dragon Réincarné flottait au-dessus de sa tête.

« S’adressant au Créateur, les hommes et les femmes implorèrent : “Lumière des Cieux et du Monde, fais que le Promis naisse du pic, comme l’annoncent les prophéties, puisqu’il en fut ainsi dans les Âges passés et qu’il en ira de même dans ceux qui restent à venir. Fais que le Prince du Matin chante afin que tout ce qui pousse reprenne vigueur et que les vallées, à partir de ce jour, regorgent d’agneaux. Fais que le bras du Seigneur de l’Aube nous protège des Ténèbres, et que la grande épée de la justice nous défende. Ainsi, le Dragon volera de nouveau sur les courants du temps.” »

(Extrait de Charal Drianaan te Calamon
Le Cycle du Dragon
Auteur inconnu, Quatrième Âge)

Glossaire

Note sur les dates

Le calendrier tomien (conçu par Toma dur Ahmid) fut adopté environ deux siècles après la mort du dernier Aes Sedai, et il compte les années à partir de la Dislocation du Monde (AD : Après Dislocation). Durant les guerres des Trollocs, beaucoup d’archives furent détruites, et l’ancien système calendaire fut remis en question. Tiam de Gazar en proposa un nouveau, censé célébrer la fin de la menace représentée par les Trollocs. À partir de là, on compta en Années Libres (AL). Vingt ans après la fin des conflits, le calendrier gazarien fut universellement adopté. Artur Aile-de-Faucon tenta d’en imposer un nouveau, basé sur la Fondation de son Empire (FE), mais la greffe ne prit pas, et, aujourd’hui, seuls les historiens y font encore référence. Après les ravages de la guerre des Cent Années, un quatrième calendrier fut établi par Uren din Jubai Envol-Goéland, un érudit du Peuple de la Mer. Le panarche Farede de Tarabon décida de son adoption. Le calendrier farendien, qui commence à la date (arbitrairement déterminée) de fin de la guerre des Cent Années, compte les années de la Nouvelle Ère (NE) et est toujours en vigueur.

A’dam : Composé d’un collier et d’un bracelet reliés par une chaîne de métal argenté, cet artefact peut servir à contrôler toute femme en mesure de canaliser le Pouvoir. Chez les Seanchaniens, c’est la damane qui porte le collier et la sul’dam qui porte le bracelet.

Adan, Heran : Gouverneur de Baerlon.

Aes Sedai : Capables de canaliser le Pouvoir de l’Unique. Depuis l’Ère de la Folie, les Aes Sedai sont exclusivement des femmes. Unanimement craintes et détestées, elles sont souvent tenues pour responsables de la Dislocation du Monde et systématiquement soupçonnées d’ingérence dans les affaires des nations. Cela dit, presque tous les dirigeants ont une Aes Sedai pour conseillère, y compris dans les royaumes où il est préférable de garder la chose secrète. Utilisé comme un titre honorifique : Sheriam Sedai. Tournure encore plus honorifique : Sheriam Aes Sedai. Voir également « Ajah » et « Chaire d’Amyrlin ».

Âge des Légendes : L’Âge auquel la guerre des Ténèbres et la Dislocation du Monde mirent un terme. Une époque où les Aes Sedai accomplissaient des miracles inimaginables. Voir également « Roue du Temps ».

Agelmar ; seigneur Agelmar de la maison de Jagad : Seigneur de Fal Dara. Emblème : trois renards roux courant.

Aiels : Habitants du désert des Aiels. Connus pour leur férocité et leur courage, ces guerriers se mettent un voile avant de tuer. D’où l’expression : « Agir comme un Aiel voilé de noir », qui décrit une personne faisant montre de violence. Redoutables avec une arme ou à mains nues, les Aiels n’utilisent jamais d’épée. Partant au combat au son des cornemuses, ils ont un surnom bien à eux pour la guerre, qu’ils appellent simplement « la Danse ».

Aiguillon : Minuscule insecte mortellement dangereux.

Ajah : Les sept sous-ordres qui composent l’ordre des Aes Sedai. Ils sont identifiés par une couleur : Ajah Bleu, Ajah Rouge, Ajah Blanc, Ajah Vert, Ajah Marron, Ajah Jaune et Ajah Gris. Chaque Ajah a sa propre conception de l’usage du Pouvoir et de la mission ultime des Aes Sedai. L’Ajah Rouge, par exemple, se consacre à la recherche des hommes capables de manier le Pouvoir, afin de les contrôler et de les « apaiser ». À l’opposé, l’Ajah Marron est totalement coupé du monde et se voue à la recherche du savoir. Une rumeur (qu’il vaut mieux éviter de mentionner devant une Aes Sedai) prétend qu’il existe un Ajah Noir qui sert en secret le Ténébreux.