INTRODUCTION.
XI
dans la figure suivante, dont elle a fait aussi une femme et qui est Vulcain (Ephaistos), placé en face de Minerve (Athèné). Vulcain était pourtant très-bien caractérisé par la tenaille de forgeron qu'il porte dans la main droite et qui est antique. Minerve, qui tient sa lance et son bouclier, a aussi quelques parties modernes, mais elle a beaucoup moins souffert de la restauration que les figures précédentes (fig. 4).
Mars (Ares) et Vénus (Aphrodite) apparaissent les premiers sur la troisième face. Mars tient une lance et un bouclier; on peut être
Fig. 5. — Autel des douze dieux (Musée du Louvre).
surpris de trouver dans un monument grec certains détails qui appartiennent au costume romain, mais le casque et les lambrequins delà cuirasse sont des restaurations modernes. Le dieu de la guerre regarde son épouse, Vénus, qui est vêtue d'un chiton talaire et d'une mantille, et porte dans la main gauche la colombe, oiseau qui lui est consacré.
Mercure (Hermès) et Vesta (Ilestia) terminent la série des douze grands dieux.Mercure, caractérisé par le caducée qu'il tient à la main, porte une barbe pointue et des cheveux nattés, selon l'usage de la période archaïque. Il est vu de face, et une paire de grandes ailes est fixée à ses talons. Il tourne la tête du côté de Vesta dont le costume ne diffère en rien de celui qui est donné à Junon, dans le même monument (fig. 5).
L'Autel des douze dieux, malgré les déplorables restaurations qui ont dénaturé le caractère de certaines figures, est un des monuments
antiques les plus précieux pour l'archéolof^ie. La sculpture, d'un relief très-peu saillant, appai'tient au plus ancien style. Les dieux sont représentés dans une attitud(^ raide et quelquefois avec les jambes serrées, conformément à une ancienne croyance d'après laquelle ils marchent en effleurant seulement la terre et sans avoir besoin de faire mouvoir leurs membres inférieurs. Les doigts très-effilés des déesses, et les plis symétriques de leurs draperies sont aussi une marque de haute antiquité. Néanmoins le travail du ciseau annonce une liberté qui jure un peu avec les allures archaïques du style, et quelques archéologues ont pensé que le monument devait être une imitation, exécutée dans une époque plus avancée, d'un autel vénéré et de date beaucoup plus ancienne.
L'ordre dans lequel les dieux sont placés sur l'Autel des douze dieux
se retrouve identiquement le même dans l'autel rond du musée capito-
lin à Rome, mais il est différent sur l'autel astrologique de Gabies,
plus connu sous le nom de Table des douze dieux. Ce monument, qui
est au Louvre, et qui appartient à l'époque romaine, est une sorte de
table circulaire, au milieu de laquelle a dû être un cadran solaire.
Autour de la table, les têtes des douze divinités de l'Olympe sont
sculptées dans un relief très-prononcé et se présentent toutes de face
dans l'ordre suivant : Jupiter, caractérisé par la foudre, est placé entre
Minerve et Vénus. Celle-ci, qui est diadémée,est reliée h Mars, son
époux, parTAmour qui les enlace tous les deux dans ses petits bras;
mais l'Amour n'apparaît ici que comme emblème pour qualifier l'union
de Mars et Vénus, car il n'a jamais compté parmi les douze grands
dieux. Après Mars, vient Diane, dont on entrevoit le carquois, et
ensuite Cérès et Vesta, qui se retrouve à côté de Mercure, caractérisé
par le caducée. La figure suivante est Vulcain, reconnaissable à son
bonnet rond; il est suivi de Neptune, dont le trident est placé à gauche,
puis de Junon et Apollon, qui se trouve à la gauche de Minerve, ce qui
termine la série des douze grands dieux. Comme les douze signes du
zodiaque forment le contour de la table, qui contenait un cadran
solaire, on a pensé que chacun des dieux est ici pour présider soit à
une des douze heures du jour, soit à un des douze mois qui constituent
la révolution de l'année.
Toutefois il y a des dieux qui ne figurent point ici et dont la puissance n'est nullement inférieure à celle des douze grands dieux. Bacchus et Hercule ont une très-grande importance mythologique, et Bacchus notamment est peut-être le dieu qui paraît le plus souvent sur les monuments figurés. Enfin il y a tout le peuple des dieux et des demi-
INTRODUCTION.
XIII
dieux, qui sont, la plupart du temps, ou bien une petite divinité locale, dont le culte n'a pas pris d'extension, ou bien des héros divinisés. Ceu.v-ci ont dans le ciel païen une importance a peu près analogue à
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Fig. (i. — Bas-relief antique, dit la Table des douze dieux (Musée du Louvre).
celle des saints dans le christianisme et chacun d'eux a des dévots qui rinvoquent de préférence.
Les dieux ont généralement une sphère d'action particulière à chacun d'eux, de sorte qu'on peut les classer suivant la nature de leur puissance qui s'exerce dans le ciel, sur la terre, les eaux, le feu ou les enfers. Mais, à l'exception de Jupiter qui les domine tous, les dieux, bien qu'inégaux en puissance, ne sont pas subordonnés l'un à l'autre, et un dieu ne défait jamais ce qu'a fait un autre dieu. En outre, les dieux ne se frondent jamais l'un l'autre, excepté pourtant Momus, personnification de la critique impuissante et railleuse. Suivant Hésiode, Momus est fils de la Nuit, mais il n'a pas dans la mythologie d'histoire proprement dite.
S(3ulc'nicnt,s'il ii(> fait rien parlui-nuMiio, il passe son temps à critiquer les ouvrages des autres dieux, et il le lait quelquefois avec esprit. A l'entendre, rien n'a été fait d'une manière convenable. Les cornes du taureau auraient dû être placées plus près de ses yeux de façon (ju'il {tùt au moins diriger ses coups; l'homme aurait dû avoir une i)elite fenêtre donnant sur son cœur, alin qu'on put lire sa pensée véritable, etc. Momus ayant examiné Vénus ne put trouver à redire qu'à sa chaussure : aussi, il en mourut de dépit.
Occupations des dieux. — Les dieux passent leur vie dans les festins et ne sont pas sujets aux maladies. Du haut de leur Olympe ils règlent les lois de l'univers et leur providence intervient souvent dans les actes des mortels. Cependant les philosophes niaient quelquefois la providence des dieux, et c'est peut-être cette négation qui explique une
Fig. 7. — Les dioux pochant à la ligne (d'après un vase archaïque).
curieuse peinture de vase où l'on voit trois divinités, Neptune avec son trident, Mercure avec son caducée et Hercule couvert de sa peau de lion, qui, bien loin de s'occuper des actions des hommes, passent tout simplement leur temps à pêcher à la ligne (fig. 7).
Le choix que les Grecs ont fait du mont Olympe, comme séjour des dieux, prouve qu'ils regardaient cette montagne comme la plus haute du monde. Dans l'impossibilité où on était de se figurer les immortels éternellement suspendus dans le ciel, on leur donnait pour demeure une montagne réputée inaccessible ; il n'est donc pas étonnant que les cimes neigeuses de l'Olympe, toujours environnées de nuages, soient devenues la demeure de Jupiter et de la cour des dieux. Le mont Olympe, situé en Thessalie, a perdu tout son prestige, quand le mathématicien Xénagoras eut donné la mesure exacte de sa hauteur, et, à la chute du paganisme, il n'était plus guère question de lui ; mais pendant la période mythologique, c'est là que se tenaient les assemblées célestes.