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— J’aime les hommes comme vous, fit-elle.

Elle l’attira et glissa une langue soyeuse dans sa bouche mince. Leur baiser aurait pu aisément allumer un haut fourneau. Les artères de Gene charriaient de la fonte en fusion. Fiévreusement, ses mains parcoururent le corps souple de la jeune femme sans rencontrer la moindre résistance. Cette familiarité n’étonnait pas Gene Shirak outre mesure. En Californie, et spécialement dans le milieu où il vivait, les mœurs sexuelles avaient considérablement évolué. Pratiquement les tabous classiques étaient tous tombés. Pour les filles belles et jeunes, le soutien-gorge était aussi démodé qu’une bottine à lacets. On faisait l’amour comme on buvait des cocktails. Sans inhibition et sans prolongement métaphysique. Daphné se dégagea et murmura :

— Vous m’aviez promis un bain…

À grand-peine, Gene Shirak redescendit sur terre.

— Comment vous appelez-vous ? demanda-t-il.

Elle s’étira creusant son ventre d’une façon qui fit perler la sueur au front du producteur.

— Daphné, dit-elle. Daphné La Salle. Je suis danseuse. Mais, en ce moment, je ne travaille pas. Je suis avec mon ami au Beverly Hills.

— Ah ! fit Gene déçu.

Elle eut un geste insouciant :

— Oh ! il n’est pas jaloux ! C’est un prince d’Europe. Un type marrant. Je l’ai rencontré à New York. Il m’a promis de m’emmener dans son château.

Rasséréné, Gene Shirak fila vers la salle de bains.

La baignoire était une grande fosse de marbre creusée dans le sol. Gene ouvrit les robinets, mit en marche la machine à rayons ultraviolets pour sécher plus vite, puis revint trouver Daphné.

— Votre bain est prêt.

Le court déplacement de Daphné jusqu’à la salle de bains déclencha dans le cerveau du producteur un flot de pensées abominablement lubriques.

À regret, il referma la porte et fonça vers le bar du living-room. Au moment où il atteignait la bouteille de White Label le téléphone sonna. Avant que Gene ait pu décrocher, la sonnerie s’arrêta. Puis reprit trente secondes plus tard.

Aussitôt, l’excitation de Gene tomba. C’était le signal d’Erain. Il se laissa tomber dans un fauteuil et décrocha.

— Ici, Gene Shirak, qui est là ? Malgré lui, il parlait à voix basse.

— J’ai appelé au bureau, dit la voix dure d’Erain. Avez-vous fait ce que je vous ai dit ?

— Non, répondit piteusement le producteur. Je n’ai pas pu.

Qui aurait reconnu le puissant Gene Shirak : il parlait d’une voix plaintive et humble, le front barré de deux grosses rides. Impitoyable, la voix reprit :

— Vous savez ce qui arrivera si vous refusez d’obéir. Il faut continuer ce que vous aviez commencé. Débrouillez-vous.

Avant qu’il ait pu protester, elle avait raccroché. Il resta une seconde assommé, fou de rage. Tout allait si bien. S’il n’y avait pas eu cette menace dans l’ombre. Il se sentait des envies de meurtre.

Il avala son whisky, passa rapidement dans sa douche, se lava les dents et s’arrosa d’after-shave. Puis, il ouvrit la porte du sauna et disposa des serviettes sur la large banquette de carrelage doré. Il avait bien droit à des compensations. Il ne voulait pas penser à la menace de plus en plus précise sur sa vie.

Gene Shirak léchait à petits coups de langue les seins de Daphné, avec des grognements de joie. Étendue sur le dos, intégralement nue, la jeune femme se laissait faire, tandis que son cerveau enregistrait les réactions de son partenaire. Le producteur semblait tendu et inquiet lorsqu’il était venu la retrouver dans la salle de bains. Aussi avait-elle précipité les choses.

Avec le plus grand naturel, elle avait émergé du bain nue et couverte de mousse, tendant une serviette à Gene :

— Essuyez-moi.

Il s’était exécuté de très bonne grâce et l’avait guidée ensuite jusqu’au sauna.

Devant les seins fabuleux, il n’avait pas pu résister. À genoux sur le carrelage, il avait enfoui la tête contre la poitrine de Daphné, tout en la caressant.

Soudain, la porte du sauna s’entrouvrit. Le visage brun et triangulaire de Joyce Shirak s’encadra dans l’ouverture. Gene vit le reflet de sa femme dans la glace.

Il abandonna la poitrine de Daphné pour aboyer :

— Fous le camp !

Joyce eut une grimace de mépris, hésita une fraction de seconde puis referma la porte. Cela faisait partie de leurs conventions. Gene Shirak respirait comme un soufflet de forge. Cette poitrine fabuleuse le rendait fou.

Il mordit cruellement Daphné qui gémit.

Aussitôt, il s’allongea sur elle et la prit brutalement.

Daphné respira profondément et démarra.

Un festival de soupirs, de gémissements, de halètements, de râles, de petits cris. En même temps, ses ongles rouges déchiraient le dos et la nuque de l’homme qui lui faisait l’amour. Rendu fou par ce manège, Gene s’activait à se faire péter toutes les artères. Un vrai jeune homme.

Daphné était assez satisfaite d’elle. La tête froide comme un poisson sorti de freezer, elle écoutait les réactions de son partenaire. Une fois par semaine, elle se passait une bande de magnétophone reproduisant tous les bruits de l’amour. Le reste était une question de mémoire et d’application…

À l’accélération des mouvements de l’homme, elle sentit que l’aboutissement était proche. Il ne fallait pas rater le final. Brutalement, elle se cambra, comme sous un plaisir exacerbé, un long cri jaillit de sa gorge, ses yeux se révulsèrent et, d’un coup de reins, elle se débarrassa de Gene Shirak au moment psychologique. Puis elle resta haletante, la bouche ouverte, murmurant :

— Oh ! pardonne-moi, c’était trop, jamais je n’ai éprouvé cela.

À la fois frustré et ivre de désir, Gene ne savait plus où il était. Les étreintes consciencieuses de ses call-girls habituelles lui semblaient fades à côté de cette tornade.

Daphné guetta sa réaction. Elle ne tarda pas.

— Je veux te revoir, murmura le producteur. Je donne une partie dans deux jours. Viens.

— Mais je ne suis pas seule, objecta Daphné.

La contrariété tordit l’estomac de Gene Shirak. Ce n’était pas possible qu’une pareille créature lui échappe.

— Amène ton ami aussi, dit-il. J’espère qu’il n’est pas trop jaloux.

Daphné eut un rire de gorge.

— Pas plus que ta femme… Cela ouvrait de beaux horizons.

Avec une conscience professionnelle pareille, Daphné mériterait le jour venu d’être enterrée au cimetière d’Arlington parmi les héros ayant donné leur vie pour le salut de la patrie.

Chapitre VIII

Une grande fille au visage de madone, déshabillée par une robe orange s’arrêtant en haut de ses longues cuisses, s’approcha de Malko, un verre à la main. Sa petite poitrine se dessinait parfaitement sous le léger tissu. Son regard parcourut Malko avec l’intérêt d’un turfiste devant un pur-sang, pour s’arrêter aux yeux dorés.

Une fraction de seconde, l’expression de ses yeux chavira.

— Je m’appelle Jill, dit-elle. Nouveau en ville ? Je ne vous ai jamais vu chez Gene.

— Prince Malko Linge, répliqua Malko. Je suis en effet de passage.

— J’aime la couleur de vos yeux, dit « Darling » Jill pensivement.

Ils lui rappelaient ceux de Sun. Jill, peu à peu, oubliait la mort du Navajo. Rien n’avait bougé et elle reprenait goût à la vie.

Malko n’eut pas le temps de répondre à son compliment direct. Une autre fille, en mini-robe dorée, lança une bouteille de Champagne dans la piscine, juste devant Malko et Jill.

Celle-ci posa la main sur le bras de Malko.