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– Je doute qu'Ashton en reste là.

– Vous y êtes allé un peu fort en le provoquant chez lui, je vous avais suggéré plus de discrétion.

– Nous n'avions pas le temps, il fallait que la jeune archéologue retrouve la liberté au plus vite. Elle avait suffisamment croupi derrière des barreaux.

– Ces barreaux avaient le mérite de la tenir hors de portée d'Ashton et par conséquence de protéger aussi votre astrophysicien.

– Ce dingue s'en est également pris à lui.

– En avez-vous la preuve ?

– J'en suis certain, il l'a fait empoisonner ! J'ai vu de grandes quantités de belladone dans les allées de la propriété d'Ashton. Le fruit de cette plante provoque de graves complications pulmonaires.

– Je suis certain que beaucoup de gens ont de la belladone qui pousse dans leur campagne sans être pour autant des empoisonneurs en série.

– Vackeers, nous savons tous les deux de quoi cet homme est capable, j'ai peut-être agi de façon impétueuse, mais pas sans discernement, je pensais sincèrement...

– Vous pensiez qu'il était temps que vos recherches reprennent ! Écoutez-moi, Ivory, je comprends vos motifs, mais poursuivre vos travaux n'est pas sans danger. Si vos protégés se remettent en quête d'un nouveau fragment, je serai tenu d'en informer les autres. Je ne peux prendre indéfiniment le risque de me voir accuser de trahison.

– Pour l'instant, Adrian a fait une sale rechute, Keira et lui se reposent en Grèce.

– Souhaitons que ce repos dure le plus longtemps possible.

Ivory et Vackeers empruntèrent un pont qui enjambait le canal. Ivory s'y arrêta et s'accouda à la balustrade.

– J'aime cet endroit, soupira Vackeers, je crois que c'est celui que je préfère de tout Amsterdam. Regardez comme les perspectives y sont belles.

– J'ai besoin de votre aide, Vackeers, je vous sais fidèle et je ne vous demanderai jamais de trahir le groupe, mais, comme par le passé, des alliances se formeront tôt ou tard. Sir Ashton comptera ses ennemis...

– Vous aussi vous les compterez, et comme vous ne siégez plus autour de la table vous souhaiteriez que je sois votre porte-parole, celui qui convaincra le plus grand nombre, c'est bien ce que vous attendez de moi ?

– Cela et un peu plus encore, soupira Ivory.

– Quoi d'autre ? s'étonna Vackeers.

– J'ai besoin d'avoir accès à des moyens dont je ne dispose plus.

– Quel genre de moyens ?

– Votre ordinateur, pour accéder au serveur.

– Non, je ne suis pas d'accord, nous nous ferions repérer aussitôt et je serais compromis.

– Pas si vous acceptiez de brancher un petit objet derrière votre terminal.

– Quel genre d'objet ?

– Un appareil qui permet d'ouvrir une liaison aussi discrète qu'indétectable.

– Vous sous-estimez le groupe. Les jeunes informaticiens qui y travaillent sont recrutés parmi les meilleurs, ce sont même pour certains d'anciens hackers redoutables.

– Tous deux nous jouons mieux aux échecs que n'importe quel jeune d'aujourd'hui, faites-moi confiance, dit Ivory en tendant un petit boîtier à Vackeers.

Vackeers regarda l'objet avec un certain dégoût.

– Vous voulez me mettre sur écoute ?

– Je veux juste me servir de votre code pour accéder au réseau, je vous assure que vous ne risquez rien.

– Si l'on me suspecte, je risque d'être arrêté et traduit en justice.

– Vackeers, puis-je ou non compter sur vous ?

– Je vais réfléchir à ce que vous me demandez, et je vous ferai connaître ma réponse dès que j'aurai pris ma décision. Votre petite histoire m'a ôté tout appétit.

– Je n'avais pas très faim non plus, confia Ivory.

– Tout cela en vaut-il vraiment la peine ? Quelles sont leurs chances d'aboutir, le savez-vous seulement ? demanda Vackeers en soupirant.

– Seuls, ils n'en ont guère, mais si je mets à leur disposition les informations que j'ai accumulées en trente années de recherches, alors il n'est pas impossible qu'ils découvrent les fragments manquants.

– Parce que vous avez une idée de l'endroit où ils se trouvent ?

– Vous voyez, Vackeers, il y a peu, vous doutiez même de leur existence et, aujourd'hui, vous vous souciez de l'endroit où ils sont cachés.

– Vous n'avez pas répondu à ma question.

– Je crois que c'est tout le contraire.

– Alors où sont-ils ?

– Le premier fut découvert au centre, le deuxième au sud, le troisième à l'est, je vous laisse deviner où pourraient être les deux derniers. Réfléchissez à ma requête, Vackeers, je sais qu'elle n'est pas anodine et qu'elle vous coûte, mais je vous l'ai dit, j'ai besoin de vous.

Ivory salua son ami et s'éloigna ; Vackeers lui courut après.

– Et notre partie d'échecs, vous ne comptez pas partir comme ça ?

– Vous pouvez nous préparer une petite collation chez vous ?

– Je dois avoir du fromage et quelques toasts.

– Alors avec un verre de bon vin, cela fera l'affaire et préparez-vous à perdre, vous me devez une revanche !

*

*     *

Athènes

Keira et moi étions assis sur la terrasse. Grâce aux soins prodigués par la doctoresse, je reprenais des forces et pour la première fois j'avais passé une nuit sans tousser. Mon visage avait retrouvé des couleurs qui rassuraient presque ma mère. La doctoresse avait profité de son séjour forcé pour examiner Keira et lui prescrire décoctions de plantes et compléments de vitamines. La prison lui avait laissé quelques séquelles.

La mer était calme, le vent était tombé, le petit avion de notre médecin pourrait redécoller aujourd'hui.

Nous nous retrouvions à la table du petit déjeuner où maman avait préparé un repas avec autant d'attention que si cette doctoresse avait été reine. Pendant cette période où je n'avais pas été au mieux, elles avaient passé ensemble des heures entières à partager histoires et souvenirs entre la cuisine et le salon. Maman s'était passionnée pour les aventures de cette femme, médecin volant, qui se rendait d'île en île au chevet de ses malades. En partant, la doctoresse me fit promettre de prolonger de quelques jours au moins ma convalescence avant d'envisager de faire quoi que ce soit d'autre ; conseil que ma mère lui fit répéter deux fois au cas où je n'aurais pas bien entendu. Elle la raccompagna jusqu'au port, nous laissant enfin quelques moments d'intimité.

Dès que nous fûmes seuls, Keira vint s'asseoir à mes côtés.

– Hydra est une île charmante, Adrian, ta maman est une femme merveilleuse, j'adore tout le monde ici, mais...

– Moi aussi je n'en peux plus, dis-je en l'interrompant. Je rêve de ficher le camp avec toi. Cela te rassure ?

– Oh oui ! soupira Keira.

– Nous nous sommes fait la belle d'une prison chinoise, je pense que nous devrions réussir à nous échapper d'ici sans trop de difficultés.

Keira regarda le large.

– Qu'est-ce qu'il y a ?

– J'ai rêvé d'Harry cette nuit.

– Tu veux retourner là-bas ?

– Je veux le revoir. Ce n'est pas la première fois que je rêve de lui, Harry est souvent venu me rendre visite dans mes nuits à la prison de Garther.

– Repartons dans la vallée de l'Omo si c'est ce que tu souhaites, je t'avais promis de t'y raccompagner.

– Je ne sais même pas si j'y aurais encore ma place, et puis il y a nos recherches.

– Elles nous ont déjà assez coûté, je ne veux plus te faire courir de risques.

– Sans vouloir faire ma maligne, je suis revenue plus en forme de Chine que toi. Mais j'imagine que la décision de poursuivre ou non nous appartient à tous deux.