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Lors dit li quens [45] : Comment qu’il aille Je veil [46] que l’on oste lez tablez Et si [47] n’ai cure d’oïr fables, Ne [48] chançon, ne son de vielle : Je veil veoir celle pucelle Et que touz et toutes la voient Et que trestouz tesmoins en soient S’elle est si belle comme il dïent. » Li dut [49] variet molt l’en mercïent ; Lez napes lievent [50] , l’iaue donnent Et li fourriers pas ne sermonnent : Lez tablez ont misez par terre[51] !

Ce n’est pas malgré les apparences ce que l’on appelle « faire table rase. »

À titre d’exemple et de curiosité voici une soirée complète typique du XIIIe siècle, celle du Chevalier qui fit les cons parler, hébergé pour un soir dans un château :

Li cuens et la contesse ansamble Alerent querre, se me semble, Lor oste qu’orent herbergié ; Et la contesse por laver Print [52] par les mains le chevalier,

Et puis li cuens et les puceles, Les dames et les damoiselles, Lavent après et l’autre gent [53] De coi il y ot [54] planté grant [55] por le chevalier conjoïr [56]
Assez y ot planté de mes [57] Desqueus en servi près a près [58] De chars [59] fresches, de venoisons, Et de pluseurs mes de poissons, Et des noviaus vins et des viez[60]
Puis fist on les nappes oster Et por laver l’iaue aporter. Li chevaliers tous primerains [61] Avec la contesse ses mains Lava et puis l’autre gent toute. Et puis se burent an route [62] Et por l’amour dou chevalier Se vont trestuit [63] apparillier De faire karoles et dances, Par molt très noble contenances[64].

Entre la poire et le fromage

La poire a probablement été le fruit préféré de nos aïeux. À cause de son goût, bien sûr, de sa pulpe juteuse, qui a donné « la poire pour la soif. » Peut-être aussi parce que la saison en est longue et les variétés nombreuses, contrairement aux autres fruits de l’époque, succulents aussi, mais tellement éphémères ! Les poires les plus précoces étaient mûres en juillet, les plus tardives au début de l’hiver. Elle semble avoir été le symbole de l’exquise douceur : ne pas « promettre poires molles » voulait dire ne pas promettre un avenir tout rose, et lorsqu’il est question de partager une bonne chose avec quelqu’un, naturellement on coupe la poire en deux.

On mangeait les poires à la fin du repas, tout de suite avant le fromage, autre délice, qui le terminait. Cela ne paraît une bizarrerie qu’à première vue ; c’était au contraire une habitude assez logique dans des menus où les légumes brillaient par leur absence, et où il semble, contrairement à une image répandue, que l’on buvait surtout après le repas, et non pendant. Au fond il était peut-être mal commode de manier la coupe ou le hanap avec les mains pleines de graisse ! C’est sans doute le sens de ce vieux proverbe : « La table ôtée doit-on laver et boire. »

Bref, les derniers rôtis de volaille ou de gibier avalés, la poire arrivait pour rincer agréablement la bouche, rafraîchir le palais et changer le goût des victuailles. En somme elle jouait le rôle de la salade dans notre gastronomie. Voici un menu typique de 1228, extrait du Guillaume de Dole de Jean Renart :

Si [65] s’en vont en la sale arriere ou li soupers ert atornez mout biaus de viandes assez : faons de let [66] , porciax farsiz [67]
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45

Le comte.

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49

Les deux.

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50

Lèvent.

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51

Jehan Maillart, Le Roman du comte d’Anjou, 1316.

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53

Les autres.

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55

En abondance.

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56

Fêter.

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58

À la suite.

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61

D’abord.

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62

En bande.

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64

Jean Rychner, Contribution à l’étude des fabliaux, II, Droz, Genève, 1960.

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66

Était préparé.

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67

De lait / porc.