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Il trouvait que c’était vraiment très étrange d’arriver de cette façon et de chercher les invités dans le noir. Il pensa à rebrousser chemin et retourner chez Oop, mais il se souvint des chiens qui étaient dehors, deux brutes sauvages.

Ce n’était pas dans le style de Nancy, elle ne faisait pas de choses de ce genre. Il sentait que cela ne collait pas du tout et il ne se sentait pas à son aise.

Il avança avec précaution dans le hall, en faisant attention à ne pas buter contre un meuble. Il distinguait un peu mieux mais le hall ressemblait toujours à un tunnel.

Il passa l’escalier, rasant la première marche et il se trouva en partie coupé de la lumière qui provenait de l’étage supérieur. Le hall était encore plus sombre qu’auparavant.

Une voix appela :

— Professeur Maxwell, je sais que vous êtes là.

En fait, cela ne ressemblait pas à une voix, Maxwell aurait pu jurer qu’il n’avait pas entendu de son. Il avait l’impression que la voix provenait de quelque part dans sa tête.

Il sentit la crainte s’emparer de lui. Il essaya de se dominer mais il n’y réussit pas. Il voulut parler mais il ne put émettre un son.

La voix reprit :

— Je vous attendais, Professeur. Je désire m’entretenir avec vous. Il y va de votre intérêt autant que du mien.

— Où êtes-vous ? demanda Maxwell.

— Derrière la porte tout de suite à votre gauche.

— Je ne vois pas de porte.

Le bon sens de Maxwell lui soufflait :

— Va-t’en ! Sauve-toi aussi vite que tu le peux !

Mais il ne le pouvait pas. Il n’y parvenait pas. S’il partait, dans quelle direction devait-il courir ? Pas vers la porte de derrière à cause des chiens, ni dans le hall sombre où il heurterait sûrement quelque chose et alerterait tous les invités avec un grand bruit. On le retrouverait échevelé et mort de peur, car, il le savait, s’il se mettait à courir, la terreur s’emparerait de lui et il n’y pourrait rien.

Ce n’était déjà pas tellement brillant de s’introduire à une réception par la porte de derrière sans en plus être trouvé dans un tel état.

S’il s’était agi de n’importe quelle voix, cela n’aurait pas été aussi terrifiant. Cette voix-là ne possédait aucune intonation, elle rendait un son métallique et dur, inhumain. C’était, se dit Maxwell, la voix d’un être extra-terrestre.

— Il y a une porte, hacha la voix monocorde. Avancez-vous un peu sur la gauche et ouvrez-la.

Tout cela devenait vraiment ridicule. Ou il l’ouvrait, ou il prenait la fuite. À moins qu’il ne parte tout simplement. Mais, il savait bien que dès qu’il aurait tourné le dos à cette porte, il prendrait ses jambes à son cou, involontairement, fuyant la terreur à laquelle il tournerait le dos.

Il fit un pas vers la gauche, trouva la porte et la poussa. La pièce était sombre mais une faible lueur filtrait par la fenêtre pour éclairer une créature rondouillette au milieu de la pièce. Dans son ventre s’agitait une vermine phosphorescente comme des vers luisants dans un bocal.

— Non, dit la créature, vous ne vous trompez pas. Je suis bien un de ceux que vous nommez Roulants. Vous m’appellerez monsieur Marmaduke, ce sera plus facile. Ce n’est pas mon nom, aucun d’entre nous n’en possède un, nous n’en avons pas besoin, notre personnalité réside ailleurs.

— Enchanté de faire votre connaissance, monsieur Marmaduke.

Maxwell parlait lentement, ses lèvres étaient devenues dures et raides comme le reste de son corps.

— Moi aussi, Professeur.

— Comment saviez-vous qui j’étais ? demanda Maxwell. Vous n’avez pas hésité, vous saviez que j’allais traverser le hall.

— Bien sûr, dit le Roulant.

Maxwell distinguait mieux la créature. Un corps bouffi porté par deux roues et rempli de matière luisante et frétillante.

— Vous êtes invité par Nancy ? demanda-t-il.

— Oui, répondit M. Marmaduke. Je crois être l’hôte d’honneur de sa soirée.

— Alors, peut-être devriez-vous être avec les autres.

— J’ai dit que j’étais fatigué. C’est un léger mensonge car je ne suis jamais fatigué. Alors, j’ai été me reposer un moment.

— Et vous m’attendiez ?

— Exactement.

Maxwell était certain que Nancy n’y était pour rien. Elle était futile et pour elle la seule chose qui avait de l’importance était ses éternelles soirées. Elle était incapable de toute intrigue.

— Il y a un sujet dont nous pourrions discuter, dit M. Marmaduke. Cela pourrait être profitable pour tous les deux. Je crois que vous cherchez un acheteur pour une marchandise importante. Cela pourrait m’intéresser.

Maxwel fit un pas en arrière et chercha une réponse, mais il n’en trouva pas.

— Vous ne dites rien, dit M. Marmaduke. Je ne peux pas m’être trompé, vous êtes bien l’intermédiaire chargé de cette vente ?

— Oui, dit Maxwell.

Il savait que cela ne servirait à rien de le nier. Cette créature était au courant de l’existence de l’autre planète et du trésor de science, il ne savait trop comment. Peut-être en connaissait-elle aussi le prix. Se pouvait-il que ce soit les Roulants qui aient fait la proposition d’achat de l’Artifact ?

— Eh bien alors, dit M. Marmaduke, occupons-nous tout de suite de cette affaire et examinons-en les modalités. Sans oublier, bien entendu votre commission.

— J’ai bien peur que ce ne soit impossible pour le moment. Je ne connais pas les conditions. Voyez-vous, je suis chargé de trouver l’acheteur et ensuite…

M. Marmaduke le coupa :

— Aucune importance. Je suis au courant des détails qui vous manquent.

— Et vous paierez le prix ?

— Bien entendu, dit le Roulant. Simplement, cela sera un peu long. Il me faut le temps de mener à bien certaines négociations. Ensuite, nous pourrons conclure l’affaire sans aucun problème. Le seul que je vois est de déterminer le montant de votre commission.

— Je présume, dit Maxwell que ce sera une bonne commission.

— Nous avions pensé vous nommer, disons bibliothécaire. Nous avons besoin d’une créature comme vous et je pense que ce travail pourrait vous intéresser. Nous voudrions connaître le salaire que vous demandez et vos conditions d’emploi.

— Il va me falloir réfléchir.

— Bien entendu. Dans un cas comme celui-ci, il est bon de s’accorder un peu de réflexion. Nous sommes prêts à une grande générosité.

— Ce n’est pas ce que je voulais dire, dit Maxwell. C’est de l’opération elle-même que je parlais. Il faut que je décide si je veux traiter avec vous.

— Peut-être doutez-vous de notre solvabilité ?

— Peut-être.

— Professeur Maxwell, je vous conseillerais d’abandonner vos doutes, car nous sommes décidés à obtenir de toute façon ce que vous avez à vendre. Alors, il vaudrait mieux que vous nous le vendiez de bon cœur.

— Que je le veuille ou non ?

— Je ne l’aurais pas dit aussi franchement mais c’est bien cela.

— Vous n’êtes pas très bien placé pour employer ce ton.

— Vous ne savez rien de notre position. Votre savoir ne dépasse pas une certaine limite dans l’espace. Au-delà, vous ne savez plus rien.

Il y avait quelque chose dans le ton employé, dans les mots mêmes qui fit frémir Maxwell.

Votre savoir ne dépasse pas une certaine limite dans l’espace, avait dit le Roulant. Qu’y avait-il au-delà de cette limite ? Personne ne le savait. On savait seulement que les Roulants avaient installé leur empire quelque part dans la zone inconnue et on racontait des histoires horribles, comme celles qu’inspire toute frontière.