L’agaric champêtre se tait et attend. Des questions, vous pensez s’il en pleut, mes drôles ! Après une révélance pareille, on se sent tout chose du kangourou. On est frappé durement dans son imagination ; et quand la gamberge passe par le calbar, l’homme se survolte les méninges, croyez-moi. On se voit déjà le zoupzoup fané, en déconfiture noire. On a envie de courir chez Mâame la Baronne pour se faire faire le point fixe. On a des craintes à propos de ses accus. On redoute une panne de secteur ! Y en a, on les retiendrait pas de toute notre morale bourgeoise, qu’ils se dégaineraient séance tenante le joufflu pour une paluchette de contrôle. Se testeraient le vigoureux de la main à la main, en dessous de table ! Ça fait frissonner, une telle annonce, non ? Notez que le réconfortant, dans l’histoire, c’est la qualité des « impuissés ». Tant que ce sont les ministres et les P.-D.G. qui sont frappés, on a de la rémission pour s’envoler Nestor. La récompense des humbles c’est de ne pas provoquer la haïssure des grands méchants. On peut triquer en catimini. On a pour soi la protection de son anonymat. Seulement, malgré tout, le doute vous point ; c’est humain. On se dit que ça va p’t’être bien devenir épidémique, ce bazar. Gagner les couches du dessous, ravager toutes les braguettes. Pour lors on voudrait se déposer le trésor en chambre froide. Se le coller en hibernation pour le garer des atteintes. Ou bien se confectionner des slips en chprountbitz d’uranium afin de se remiser l’intime des radiations perfides. Le mâle, son dada, ça reste le gentil chauve à col roulé ! Se demande chaque minute s’il est encore bon pour le service. Bien apte, ce cher petit guerrier.
Faut les entendre forcener de l’insistance, mes chers z’homologues.
« Et comment que ça se peut, un truc semblable. Est-ce que l’impuissance est définitive ? Bien vrai, plus d’espoir, l’escarguiche est neutralisé pour toujours ? À part leur situation, y n’ont pas d’autres points communs, les amoindris du soubassement ? Quéque chose comme les oreillons, de la constipation chronique, une arthrose de la hanche ou des fois qu’ils seraient tous albinos ? Non, bien vrai ? » Dommage ! Ce serait commode de savoir que seuls les mecs nés avec un pied bot ou une tache de vin sur la fesse droite sont concernés. Ça relâcherait le tourment général. On calamiterait seulement pour les autres au lieu de redouter pour soi, ce qu’est toujours extrêmement préoccupant. On garderait la tronche froide, comprenez-vous ?
Y en a qui s’allument drôlement la mèche à idées, je vous le dis. Un Italien fait observer que ça pourrait peut-être provenir de la nourriture, vu qu’elle est quasi commune, la tortore des grands. Y aurait pas un virus dans le caviar, d’hasard ? Ou un vilain microbe dans le foie gras. P’t’être qu’elles bouffent du cresson, les yoyos du Périgord et qu’elles se prennent la douve, la transmettent à l’homme sous forme de charançons à valseuses. Ça échafaude profond ! Il en gicle de partout ! On passe d’une supposition à une hypothèse, d’une suggestion à une affirmation. On pose des a priori. On réfute des thèses ! On confronte des points de vue ! On tergiverse ! On bouleverse ! On renverse ! On proteste ! On conteste ! On ergote ! On polyglotte ! On détermine ! On délimite ! On isole ! On délecte ! On prospecte ! On introspecte ! On conçoit ! On impose ! On soumet ! On dit que !.. On conjure ! On adjure ! On abjure ! On conjugue ! Y a des tenants, des aboutissants, des ressortissants. Y a des partisans ! Certains préconisent. D’autres visualisent ! Les malins resquillent une consultation à l’œil, un Suisse surtaxe, comme quoi il serait empêtré des joyeuses depuis un temps. Les respects humains chancellent devant l’imminence du danger. La terreur s’instaure dans les rangs poulardiers. Tous ces mâles seraient menacés de mort, qu’ils entonneraient à qui mieux plus : Le God Save the queen, la Brabançonne, le. Deutschland-machinchouette, le J’sais plus-quoi-helvétique et le Tralala pompsi-boum rital. Mais les perspectives d’impuissance leur taraudent les rognons. Ils disent qu’ils vont s’unir. Combattre ! Vaincre ! Ils mourront avec la zézette bien cambrée, c’est promis, juré ! Le serment des Trois Suissagas ! Celui des Horace ! Du Jeu de Pomme ! Une main à l’horizontale, l’autre sur la braguette.
De toutes ces apostrophes et virgules, de ces déclarations flamboyantes, y a rien à retenir de positif, mes gamins.
D’ailleurs Béru ne s’y trompe point, qui continue de mastéguer avec application. Il s’en est stocké de toutes les parts, des bouftances délicates, l’Ogre de la Grande Volière. Il était bardé de sandwichs. L’en avait dans la poche revolver, dans son slip, sous les bras, à la place du stylo, partout ! Son costard ressemble à une palette de peintre. Celle de Renoir, je pencherais. Des couleurs délicates, avec des demi-teintes, des éclats sourds.
Son cas se complique un chouille lorsqu’il débouche sa boutanche de « Mouette et Chantons ». Agité, tiédi par sa chaleur combien animale, le liquide à ressort n’attendait que le détortillage du fil de fer de sécurité pour se barrer sur les complets du voisinage. Un policier romain, beau comme l’Italie, en morfle plein sa flanelle délicate. Un Belgium courroucé se fait rentrer la protestance jusqu’à l’œsophage par un jet impétueux. Ça crée diversion. Béru pousse des bramances en essayant de boire le reliquat. Là-bas, sur son estrade, le Dabe agite sa sonnette avant de s’en servir, en criant des sévérités qui ne parviennent pas jusqu’à leur objet. Le vieux Champignon irlandais est grimpé sur sa chaise et grimace comme un mec de Dublin qui souffre d’un Ulster à l’estomac. Il déplore d’avoir lâché le crachoir, le sinistré. Ça l’apprendra de demander si on aurait des questions à lui poser. À son âge, il devrait être mieux averti des choses humaines. Quand tu laisses la jacte à un auditoire, il pose pas de questions : il cause ! Les questions, y a que les douaniers qui sachent vraiment les formuler. Tenez, on se figure, mais chez nous, lorsqu’on interroge un suce-pet, on parle plus que lui. Pour un point d’interrogation, t’en enregistres quinze d’exclamation et plus encore de suspension (de famille). Le douanier, lui, c’est le vrai questionneur à l’état brut. Y a pas de poils autour. On s’écarte jamais de la question. Faut grimper après comme la vigne à son échalas. — Combien de paquets de cigarettes ? — De l’alcool ? — Pas de montre ? — Quelle quantité de devises ? Elle est poinçonnée, la broche de Madame ? Tel quel ! Sec comme des gaufrettes neuves ; précis, pointu. « Il est à vous, le gamin qui vous ressemble pas, là derrière ? » Et la pire de toutes, celle qui est à l’origine d’une chiée d’infarctus : « Rien d’autre à déclarer ? » Les plus malades de cette horrible question, ce sont ceux qui n’ont vraiment rien, mais alors rien de rien à déclarer et qui réalisent mais un peu tard qu’on ne les croira jamais ; que c’est trop vrai pour en avoir l’air, que c’est louche horriblement, en un mot : « impossible » ! Et qui cherchent si dans leur fond en comble, des fois, y aurait pas un petit reliquat de quéque chose de louche dans leur chignole. Si leur cendrier serait pas tchécoslovaque d’origine par exemple et qu’on aurait omis de le taxer à l’importation. Mais je boumerangue pour vous en revenir au petit vioque, le professeur Connel O’Broshett. À force de faire le sémaphore et d’égosiller, à force que le Dirlo sonnaille, le calme revient.