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Elle tourna très doucement le loquet et tira d'un petit centimètre vers elle.

Un groupe de silhouettes faisaient face à l'autre porte du fond, de l'autre côté de l'escalier. Il y avait un type près de la dernière marche qui semblait scruter l'obscurité vers elle. Un type d'une stature imposante et qui semblait diriger le groupe. L’homme se retourna vers la cage et chuchota quelque chose à quelqu'un qui faisait du bruit dans l'escalier.

Cinq hommes au moins. Trois devant la porte. Un au sommet des marches et un dans l'escalier. Ah oui et les deux types dehors. Et peut-être bien un ou deux mecs en bas pour tenir en joue le gardien. Bon dieu, une véritable armée. Qu'est-ce que…

C'est à cet instant qu'elle entrevit un mouvement brusque dans le groupe posté près de la porte et qu'une explosion déchira le silence. Un éclair avait jailli avec la détonation et elle vit la porte du fond s'ouvrir d'un coup de pied violent. On avait tiré dans la serrure et…

C'est à cet instant que l'enfer se déchaîna dans le couloir.

CHAPITRE XVIII

C'est Alice qui l'avait réveillé.

Dans son sommeil un mouvement de forte amplitude était venu bousculer les règles d'un rêve très ancien qui venait périodiquement assaillir sa conscience endormie. Puis une voix avait résonné à ses oreilles et ses yeux s'étaient ouverts. Il reprit pied difficilement. Le visage d'Alice là tout près. Ses lèvres qui chuchotaient quelque chose, son air grave. Sa main qui secouait son épaule. La chambre plongée dans le noir.

– Hugo, lui disait-elle, réveillez-vous… Hugo, il faut que vous vous réveilliez…

Il se réveilla.

– Ou'est-ce qu'ya?

– Ils sont là, Hugo… Oh, plein d'hommes, des hommes de ma mère… ils sont dans l'hôtel.

Il prit conscience tout à fait, rejetant les draps et s’asseyant sur le lit.

– Oui, jeta-t-elle, plus terrifiée à chaque seconde, je les ai vus entrer et j'ai entendu du bruit en bas, je… je ne dormais pas très bien et j'ai entendu leurs voitures… OH!

Elle venait de sursauter alors que de lourdes foulées grimpaient l'étage et que des voix étouffées se faisaient entendre.

– Ce sont eux, mon dieu, faillit-elle hurler mais Hugo lui faisait signe de la boucler, puis lui montra d'un geste ferme le cabinet de toilettes. Sa main empoignait déjà le pistolet-mitrailleur.

Il se mit sur ses pieds, doucement, et s'accroupit en tendant l'oreille, derrière le lit. Alice refermait la porte des toilettes sur elle. Le silence était retombé. Il déclencha le cran de sûreté et mit le système photo-optique en route. Il s'installa confortablement le dos au mur, en repliant ses jambes sur le sol et en tenant l'arme dirigée vers la porte, bien calée sur l'oreiller.

Un long film vert commença. Dans le viseur une porte verdâtre s'encadrait sur un mur d'une autre nuance, légèrement plus claire. Aucune lumière dans le couloir. Les types voulaient profiter de l'obscurité: ils allaient être servis.

Il attendit patiemment que la porte s'ouvre.

Une énorme détonation le fit sursauter, malgré l'habitude. Un violent éclair zébra l'image monochrome, là où la serrure explosa.

Et le rectangle vert intense découvrit un autre rectangle très dense, presque noir, mais où se détachaient nettement trois silhouettes, d'un beau vert, électrique et généreux. La croix graduée du collimateur se trouvait en plein sur la grosse silhouette du centre. Les hommes allaient se ruer dans la chambre dans une fraction de seconde.

Il appuyait déjà sur la détente. Un énorme jet de flammes orange troua la nuit, dans un bruit infernal. L'arme tressauta contre son épaule et il vit l'homme du centre et son voisin de droite partir à la renverse. Les flammes trouaient toujours la nuit et l'homme de gauche tenta de tirer avec son arme, en se jetant en avant, Hugo vit nettement l'éclair fluorescent zébrer la lentille mais le tir de l'homme ne fut pas assez précis. Les flammes orange tonnaient toujours et la croix chiffrée le pointait. L'homme s'écroula à son tour, dans une danse grotesque. On hurlait de partout. La porte et le mur étaient ravagés par une pluie de métal. Il y avait une autre ombre verte dans le couloir qui tirait vers lui à son tour. Des impacts s'étoilèrent sur le lit et l'armoire. La silhouette avait tiré accroupie et elle se releva prestement. Une solide baraque, qu'il arrosa au jugé. Mais l'homme se jeta à plat ventre dans le couloir, disparaissant momentanément à sa vue. Et un autre, non deux autres dans l'escalier, dont l'un avec un fusil, qui montaient en courant à l'étage. Les flammes trouaient la nuit. Le grand type remettait ça lui aussi. La vitre de la chambre explosa derrière lui. De grosses détonations que hurlait un énorme revolver, paraissant minuscule dans sa main de catcheur. Son tir était redoutablement précis et Hugo se colla contre le mur. L'homme avec le fusil était arrivé en haut de l'escalier et il épaula en direction de sa chambre. Le montant de la porte explosa et un autre impact vint plomber le pied du lit, déchiquetant le bois et le sommier de métal.

Le viseur se stabilisa sur l'homme dans l'escalier alors que les flammes trouaient la nuit. Il vit la silhouette s'aplatir contre le mur, ombre verte sur un simple décor gris verdâtre. Le bruit de son corps resonna lourdement sur les marches. L'homme qui l'accompagnait se jeta à plat ventre sur les marches alors que les impacts dévoraient le mur.

Son premier chargeur était vide. Il le dégagea vivement et le retourna d'un geste avant d'enclencher son double scotché dans un claquement sec.

Il arma la culasse.

C'est à ce moment-là qu'il se passa quelque chose d'étrange dans le couloir. Le grand type ne tirait plus vers lui, il tirait vers l'autre extrémité du couloir, d'ailleurs n'avait-il pas vu une porte s'ouvrir à la périphérie de sa vision alors qu'il plombait le type de l'escalier? Oui, la porte du fond en face de la sienne s'était ouverte et une silhouette verte avait gueulé en brandissant quelque chose. Et là, le grand type venait de se retourner et de tirer vers cette silhouette qui se courba en deux puis s'effondra. Qui c'était ça, bon dieu? Hugo dirigea le viseur vers la grande silhouette couchée, et les flammes trouèrent la nuit à nouveau mais l'ombre roulait vers le mur du couloir où elle s'aplatissait, disparaissant à sa vue. Un sérieux celui-là. Des coups de feu retentissaient déjà dans l'escalier. Et d'autres là, encore une fois au fond du couloir. Et merde, l'autre gars de l'escalier rappliquait à nouveau et vidait un chargeur plein en direction de sa chambre. Un automatique. Des balles fusèrent autour de lui. Très proches. L'homme avait dû repérer les flammes. Et un type apparaissait derrière lui avec un fusil à pompe. Il cala le viseur entre eux deux et arrosa la cage. Le type au fusil déboulait les marches en poussant une plainte étouffée. Le grand planqué contre le mur du couloir continuait de tirer, putain… Hugo roula sur le côté et passa sous le lit pour ramper jusqu'à la porte. Mais d'autres coups de feu retentissaient déjà du fond du couloir et Hugo entendit un juron dans une langue rugueuse qu'il ne connaissait pas. Des détonations encore… Il se retrouva près du chambranle de la porte à plat ventre. Il s'accroupit et ajusta le viseur sur le décor du couloir. Il vit que la grande silhouette semblait touchée et descendait l'escalier à reculons, en tirant au jugé dans sa chambre et un peu partout, plus généralement, protégé par le deuxième homme de l'escalier qui plombait l'espace avec deux flingues maintenant. La rambarde de l'étage semblait dévorée par une race particulièrement tonique de termites. Dans l'escalier, un autre homme arrivait avec un fusil lui aussi, et un autre encore avec un petit PM israélien à canon ultra-court, nom de dieu. Les types montèrent à l'assaut de l'escalier en ouvrant le feu. Des balles et de la grosse mitraille s'étoilèrent partout dans la chambre, sur les murs. Hugo stabilisa vaguement le viseur sur les silhouettes verdâtres. Les flammes trouèrent la nuit à nouveau et les impacts dévorèrent la cage d'escalier. Il vit qu'il avait fait mouche. Le type aux deux flingues avait morflé et l'homme au PM aussi, dévalant les marches. Le type au fusil se jeta très professionnellement au bas de l'escalier et empoigna au passage la lourde silhouette qui traînait la jambe, à l'entresol. Ils réussirent par miracle à échapper à l'essaim de balles qui pilonna la cage jusqu'à ce que son chargeur soit vide.

Le bruit du percuteur agaça son oreille.

Il reprit son souffle et essuya la sueur qui lui dégoulinait de partout sur le visage et dans le cou.

Il entendit leur course au rez-de-chaussée, la porte du hall s'ouvrir et des cris résonner dans l'espace. Des ordres brefs. Il les entendit sortir de l'hôtel, à toute vitesse, puis courir sur le gravier. Il entendit presque aussitôt les moteurs démarrer et es portières claquer. Puis le crissement des pneus.

Il fut surpris de constater qu'aucune sirène de police ne hululait dans la nuit.

Seigneur dieu. Cela faisait trois bonnes semaines qu'il n'avait pas eu aussi peur. Il était couvert d'un film moite et glacé. Quand il avait compris qu'ils étaient une bonne dizaine il s'était dit que le siège serait plus difficile à tenir que prévu. Mais, bon, ça avait marché. Bon sang… il n'aurait jamais cru pouvoir tuer six ou sept hommes aussi rapidement, là, en quoi? Allez… deux ou trois minutes?