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Vous parliez de Mr Johnson.

Ah ! oui ! Il me conduisit ensuite à un bateau des Messageries françaises en partance pour Smyrne, où mon gendre m'attendait au quai. Que va-t-il dire quand je lui raconterai tout cela dans ma prochaine lettre ? Ma fille prétendait que j'aurais moins d'ennuis en voyageant par chemin de fer. Comment pourrais-je décommander ma cabine sur le paquebot ? Oh ! c'est affreux !

Une fois de plus, Mrs Hubbard était prête à fondre en larmes.

Poirot qui commençait à s'impatienter, saisit ce moment pour lui dire :

Après cette violente émotion, madame, il faut vous remonter un peu. On va commander au serveur du restaurant de vous apporter du thé et des biscuits.

Le thé ne me dit pas grand' chose, gémit la brave dame. C'est une habitude anglaise.

Du café, si vous préférez. Vous avez besoin d'un stimulant.

Ce cognac m'a un peu tourné la tête. Je boirais volontiers une tasse de café.

Tout d'abord, voulez-vous me permettre de jeter un coup d'œil dans vos valises. pour la forme ?

Pourquoi ?

Nous devons fouiller les bagages de tous les voyageurs. Sans vouloir vous rappeler un fait désagréable. votre sac à éponge.

Grand Dieu ! vous avez raison. Je ne tiens nullement à faire une autre découverte comme celle-là.

Mrs Hubbard ne voyageait qu'avec un minimum de bagages : un carton à chapeau, une petite valise et un sac de voyage bien bourré.

Cette visite n'eût guère demandé plus de deux minutes si Mme Hubbard n'avait insisté pour qu'on admirât les photographies de « ma fille » et de deux gamins plutôt laids :

Les enfants de ma fille. N'est-ce aps qu'ils sont mignons ?

Les bagages des voyageurs

Ayant proféré quelques compliments mensongers, et assuré à Mrs Hubbard qu'il allait lui faire apporter du café, Poirot prit congé et sortit en compagnie de ses deux amis.

Nous voici bredouilles, remarqua M. Bouc. Où allons-nous fouiller à présent ?

A mon avis, le plus simple serait de procéder par ordre en suivant le couloir. Commençons par le numéro &6. L'aimable Mr Hardman.

Mr Hardman, en train de fumer un cigare, les reçut avec la meilleure grâce du monde.

Entrez, je vous en prie, messieurs. du moins si vous pouvez tenir tous trois dans un espace aussi restreint.

M. Bouc expliqua le but de leur visite et le détective new-yorkais approuva cette initiative.

Parfait. Je me demande pourquoi vous ne l'avez pas fait plus tôt. Voici mes clefs, messieurs, et si vous désirez fouiller mes poches, ne vous gênez pas. Voulez-vous que je descende mes valises ?

Le conducteur s'en chargera. Michel !

Le contenu des valises de Mr Hardman fut rapidement passé en revue. Peut-être s'y trouvait-il une quantité trop considérable de liqueurs.

Mr Hardman cligna de l'œil.

La douane visite rarement les bagages aux frontières. du moins si on ne fait que traverser le pays. Jusqu'ici je n'ai eu aucun ennui.

Mais à la frontière française ?

Avant d'arriver en France, je verserai ce qui restera de ces bouteilles dans un flacon étiqueté :  Lotion capillaire.

Vous n'êtes point partisan de la prohibition, monsieur Hardman, observa M. Bouc en riant.

Ma foi, j'aurais tort de dire que la prohibition m'ait empêché de boire. Vous con naissez ce qu'on appelle en Amérique le « speakeasy » ou cabaret clandestin.

Non, je voudrais bien aller en Amérique, dit Poirot.

On vous y apprendrait quelques méthodes un peu modernes. L'Europe a besoin de s'éveiller, elle dort à moitié.

Certes, j'admire l'Amérique, le pays du progrès, mais j'avoue préférer mes compatriotes aux femmes américaines. La jeune fille belge ou française surpasse en charme et en finesse celle des autres nations.

Hardman se tourna un instant vers la fenêtre pour contempler la neige.

Il clignota des yeux.

Cette neige vous éblouit, remarqua-t-il. Vraiment, je commence à en avoir plein le dos de cette panne et de ce crime ! Que faire pour tuer le temps ? J'aimerais inventer une occupation quelconque.

Voilà bien l'esprit remuant de l'Amérique, prononça Poirot avec un sourire.

Le conducteur replaça les valises et ils s'en allèrent dans le compartiment suivant. Le colonel Arbuthnot, assis dans un coin, fumait sa pipe en lisant une revue.

Poirot lui exposa le motif de leur visite. Le colonel ne souleva aucune difficulté : il avait deux grands sacs de voyage en cuir où tout était ragé avec un ordre tout militaire.

Le reste de mon attirail me suit par bateau, expliqua-t-il.

En moins de trois minutes, l'inspection fut terminée. Poirot remarqua un paquet de cure-pipes.

Vous employez toujours cette même marque ?

Autant que possible.

ah

Ces cure-pipes étaient identiques à celui que Poirot avait ramassé dans le compartiment de Ratchett.

Le docteur Constantine en fit la remarque lorsqu'ils se retrouvèrent dans le couloir.

Tout de même, dit Poirot, je ne puis croire à la culpabilité de cet homme.

Le compartiment voisin était celui de la princesse Dragomiroff. Dès qu'ils frappèrent à la porte, la vieille dame répondit de sa voix grave et bien timbrée :

Entrez !

M. Bouc, plein de déférence, prit la parole et expliqua ce qu'ils désiraient.

Je n'y vois pas d'inconvénient, messieurs. Les clefs sont entre les mains de ma femme de chambre qui va vous aider.

Confiez-vous habituellement vos clefs à votre femme de chambre, madame ? demanda Poirot.

Oui, monsieur.

Et si à l'une des frontières les douaniers demandaient à visiter vos bagages au milieu de la nuit ?

La vieille dame haussa les épaules :

C'est peu probable. Mais si le fait se produisait, le conducteur irait prendre les clefs chez ma femme de chambre.

Vous avez une confiance absolue en cette femme ?

Je vous répète encore que je ne prends à mon service que des gens sur qui je puis compter.

Il vaut souvent mieux, en effet, employer une personne simple et honnête qu'une femme de chambre mieux stylée. par exemple, quelque jolie Parisienne.

Les yeux noirs et perspicaces de la princesse Dragomiroff se fixèrent sur les yeux du détective.

Qu'insinuez-vous par là, monsieur Poirot ?

Rien, madame, rien du tout.

Si, si ! Vous pensez que je devrais avoir à mon service une élégante Parisienne ?

Cela semblerait peut-être plus naturel, madame.

Hildegarde m'est entièrement dévouée, et le dévouement ne s'achète pas, monsieur Poirot, déclara la princesse en appuyant sur les mots.

L'Allemande apporta le trousseau de clefs. Sa maîtresse lui ordonna, dans sa langue maternelle, d'ouvrir les valises et d'aider ces messieurs dans leurs recherches. Pendant ce temps, debout dans le couloir, elle regarda méditativement la neige. Poirot s'approcha d'elle, laissant à M. Bouc le soin de fouiller les bagages.

Eh bien, monsieur Poirot, vous ne vous inquiétez donc pas du contenu de mes valises ?

Oh ! madame, ce n'est là qu'une formalité.

Est-ce bien sûr ?

Oui, du moins en ce qui vous concerne.

Pourtant j'ai bien connu Sonia Armstrong et je l'affectionnais beaucoup. Vous pensez sûrement que je n'aurais pas voulu souiller mes mains en tuant cet ignoble Cassetti ? Sans doute avez-vous raison.

Elle garda le silence un instant, puis elle reprit :