A présent, monsieur Poirot, reprit-elle, vous connaissez toute l'histoire. Qu'allez- vous décider ? Si vous devez faire un rapport officiel, ne pourriez-vous me rendre uniquement responsable ? J'aurais volontiers frappé moi-même ce monstre de douze coups ! Non seulement il a tué ma fille et la petite Daisy, et cet autre bébé qui aurait pu vivre, mais avant de nous enlever notre chère mignonne, il avait assassiné d'autres enfants et rien ne dit que, dans l'avenir, il n'eût pas récidivé. La société, sinon la légalité l'avait condamné, nous n'avons fait qu'exécuter la sentence. Je demande à répondre seule de cet acte. Pourquoi entraîner après moi tous ces braves cœurs : ce pauvre Michel. Mary et le colonel Arbuthnot ?... Ils s'aiment.
La voix de la tragédienne emplissait l'espace étroit du wagon. cette voix riche, profonde, pathétique, qui avait fait vibrer d'émotion tant d'auditoires enfiévrés.
Poirot interrogea son ami du regard.
En tant que directeur de la Compagnie, quelle est votre opinion, monsieur Bouc ?
M. Bouc s'éclaircit la voix.
Selon moi, mon cher ami, votre première supposition est la bonne. sans aucun doute. Quand la police yougoslave se présentera, nous lui remettrons un rapport rédigé dans ce sens. Etes-vous de cet avis, docteur ?
Certainement. En ce qui concerne les constatations médicales, il me semble que. que j'ai fait une ou deux suggestions fantaisistes.
- Après cet exposé de mon point de vue personnel, j'ai l'honneur, mesdames et messieurs, de me dessaisir de cette affaire, acheva Poirot.