Выбрать главу

Oh! c’était la réalité!

Je me suis arrêté, comme chancelant déjà du coup.

– J’ai une dernière déclaration à faire! ai-je crié faiblement.

On m’a monté ici.

J’ai demandé qu’on me laissât écrire mes dernières volontés. Ils m’ont délié les mains, mais la corde est ici, toute prête, et le reste est en bas.

XLIX

Un juge, un commissaire, un magistrat, je ne sais de quelle espèce, vient de venir. Je lui ai demandé ma grâce en joignant les deux mains et en me traînant sur les deux genoux. Il m’a répondu, en souriant fatalement, si c’est là tout ce que j’avais à lui dire.

– Ma grâce! ma grâce! ai-je répété, ou, par pitié, cinq minutes encore!

Qui sait? elle viendra peut-être! Cela est si horrible, à mon âge, de mourir ainsi! Des grâces qui arrivent au dernier moment, on l’a vu souvent. Et à qui fera-t-on grâce, monsieur, si ce n’est à moi?

Cet exécrable bourreau! il s’est approché du juge pour lui dire que l’exécution devait être faite à une certaine heure, que cette heure approchait, qu’il était responsable, que d’ailleurs il pleut et que cela risque de se rouiller.

– Eh, par pitié! une minute pour attendre ma grâce! ou je me défends, je mords!

Le juge et le bourreau sont sortis. Je suis seul. – Seul avec deux gendarmes.

Oh! l’horrible peuple avec ses cris d’hyène! – Qui sait si je ne lui échapperai pas? si je ne serai pas sauvé? si ma grâce?… Il est impossible qu’on ne me fasse pas grâce!

Ah! les misérables! il me semble qu’on monte l’escalier…

QUATRE HEURES.

NOTES DU DERNIER JOUR D’UN CONDAMNÉ

1829

Nous donnons ci-jointe, pour les personnes curieuses de cette sorte de littérature, la chanson d’argot [30] avec l’explication en regard, d’après une copie que nous avons trouvée dans les papiers du condamné, et donc ce fac-simile reproduit tout, orthographe et écriture. La signification des mots était écrite de la main du condamné; il y a aussi dans le dernier couplet deux vers intercalés qui semblent de son écriture; le reste de la complainte est d’une autre main. Il est probable que, frappé de cette chanson, mais ne se la rappelant qu’imparfaitement, il avait cherché à se la procurer, et que copie lui en avait été donnée par quelque calligraphe de la geôle.

La seule chose que ce fac-simile ne reproduise pas, c’est l’aspect du papier de la copie, qui est jaune, sordide et rompu à ses plis.

1881

Le manuscrit original du Dernier Jour d’un condamné porte en marge de la première page:

Mardi 14 octobre 1828.

Au bas de la dernière page:

Nuit du 25 décembre 1828 au 26. – 3 heures du matin.

Paris, Gosselin, 1829

вернуться

[30] Il s’agit de la chanson du chapitre XVI. (Note du correcteur – ELG.)