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Il eut un hoquet et décrocha son téléphone pour appeler l’hôpital.

* * *

Le pantalon de soie blanche collait aux jambes de Sani comme une seconde peau. Accentuant la cambrure de ses reins. Le haut assorti semblait coulé sur sa poitrine de rêve. Détendu, Phil Scott avait posé une main sur sa hanche ; et pianotait sur son ventre bombé, installé à côté d’elle dans le bar du Shangri-la.

Elle avait transformé en bêtes un plein chargement de Japonais lorsqu’elle avait traversé le hall du Shangri-la, distante comme une princesse, mais irradiant l’érotisme de toutes ses courbes, suivie de son seigneur et maître. À peine rentré d’Indonésie, Scott avait appelé Malko, pour l’inviter à dîner. Apparemment, l’Australien n’était pas au courant de l’épisode de l’acide et Sani non plus. Il serait toujours temps de les prévenir.

— Comment ça s’est passé avec Linda ? Vous êtes tombés d’accord ? demanda l’Australien.

Le barman qui servait la table voisine, l’œil rivé sur la poitrine de Sani, faillit verser son plateau directement sur les genoux de ses clients.

— Linda est charmante, dit Malko, mais très méfiante !

Phil Scott se tordit de joie.

— Il faut la comprendre, dit-il. Elle a la police au cul en permanence. Mais elle a le génie du commerce. Il rit. Vous savez ce qu’elle a fait ? Il y a des centaines de bateaux qui font relâche tout le temps à Singapour. Dont les équipages ne vont jamais à terre. Du gibier tout cuit pour les putes. Seulement, elles n’aiment pas parce qu’il faut aller en mer. Alors, Linda a eu une idée géniale : elle a rameuté toutes les putes pour atteintes par la limite d’âge, les vérolées, les infirmes, les grosses, les lépreuses… Et tous les soirs, elle en charge plusieurs jonques qui vont faire le tour des cargos en rade.

Les gars n’ont pas le choix. C’est ça ou le tonneau de sciure. Tout le monde est content : les putes qui mouraient de faim autrement, les marins et Linda qui prend 50 %…

— C’est l’Armée du Salut, fit Malko.

Le rire de Phil Scott se calma d’un coup.

— Linda en a bavé. Quand je l’ai rencontrée, elle dansait dans une boîte, près de Bugis Street. À poil, bien entendu. Ensuite, elle se tapait les clients. Et elle payait à tout le monde. À son maquereau chinois, au patron de la boîte, aux flics. Puis elle a eu du pot, un riche marchand chinois est tombé amoureux d’elle. Il l’a enfermée dans sa villa et comme il était fou de papillons, il lui en a fait tatouer sur la cuisse.

— Belle histoire d’amour, fit Malko.

Phil Scott ricana.

— Ça c’est mal terminé. Le gars devenait dingue. Il attachait Linda sur un lit qui tournait pendant des heures et il s’amusait à lui enfoncer des plumes dans le zizi au passage. Puis il a voulu la faire baiser avec des lézards…

Alors un jour, quand il l’a détachée, Linda a pris des ciseaux et lui a crevé les deux yeux, avant de se tirer. C’est à ce moment que je l’ai rencontrée. Elle se planquait. Le Chinois avait mis des voyous à ses trousses avec ordre de la récupérer et de l’enfermer dans une cage avec des rats.

— Elle m’a demandé de se cacher chez moi. J’ai dit « oui ». Elle était bien foutue et jolie. Mais elle baisait si mal que je ne l’ai plus baisée. Il rit. C’est pour ça qu’elle m’aime bien. Mais elle gueulait toutes les nuits. Des cauchemars. C’est à ce moment-là qu’elle m’a raconté ce qui était arrivé avant. Même maintenant, elle rêve encore. Elle vit seule dans un truc rembourré comme pour les fous. Elle a honte…

— Comment croyez-vous que Linda retrouvera Lim ? demanda Malko.

Phil Scott eut un sourire en coin.

— Elle lui fournit des petites filles. Il ne peut pas s’en passer. Quand il va lui en demander une, ce sera facile…

Sani ne broncha pas. Elle avait écouté sans sourciller le récit de l’Australien. Ailleurs, perdue dans un rêve. Machinalement, Phil Scott avait abandonné sa hanche pour une de ses longues cuisses, qu’il triturait ouvertement, sous le regard effaré du garçon.

— Comment s’est passé votre voyage ?

L’Australien arbora aussitôt un sourire satisfait.

— Très bien. Il y a beaucoup de business à faire avec les Indonésiens. Faudra que j’y retourne bientôt.

Malko n’eut pas la cruauté d’insister. Quant à Sani, elle semblait en transes, acceptant n’importe quoi. La main de Phil Scott remonta le long de la cuisse gainée de soie blanche et s’immobilisa à la hauteur du mont de Venus. D’où il était, Malko pouvait voir les doigts de l’Australien pianoter doucement sur le renflement moulé par la soie. Et peu à peu, les yeux de Sani chaviraient. Elle allongea la jambe avec une impudeur totale, s’exposant totalement à la caresse.

Malko était si troublé qu’il entendit à peine le garçon se pencher sur lui.

— Téléphone, Sir.

L’appareil était posé sur le bar. Malko se leva et prit l’écouteur. Ce devait être John Canon.

D’abord, il n’entendit rien et faillit raccrocher. Puis une voix de femme étouffée et basse lui parvint. Si troublée qu’il ne la reconnut pas immédiatement.

— Je ne vous dérange pas, dit la voix…

C’était Margaret Lim.

Malko dut faire un effort considérable pour ne pas hurler de joie. Enfin quelque chose.

— Margaret, pas du tout, dit-il. Avez-vous du nouveau ?

Nouveau silence, comme si la Chinoise hésitait. Puis la fille de Tong Lim dit très vite :

— Je crois savoir où se trouve mon père. Nous pourrions nous voir pour que vous m’expliquiez ce que vous voulez lui demander pour votre article.

— Quand vous voulez, fit Malko. Où êtes-vous ?

— À l’hôtel, mais je ne veux pas vous voir là. Pourriez-vous passer à la maison dans une heure.

— J’y serai.

Elle raccrocha aussitôt. Il demanda le numéro de John Canon, eut une bonne qui lui dit que M. Canon était à l’hôpital… Lorsqu’il revint à la table, Sani semblait au bord de l’orgasme. À demi allongée sur la banquette, la main de Phil Scott entre ses jambes, elle haletait discrètement, la bouche entrouverte, sous le regard effaré des occupants de la table voisine, peu habitués à ce genre d’exhibition. Son ventre ondulait doucement sous les doigts de l’Australien. Les yeux de ce dernier avaient pris une expression à la fois bestiale et méchante.

— Il faut retarder notre dîner, annonça Malko. J’ai une course urgente à faire.

Phil Scott loucha sur la clef posée sur la table.

— Ça vous ennuie qu’on vous attende en haut, dans votre chambre…

— Je vous en prie, dit Malko.

Il ne pensait qu’à Margaret Lim. Phil Scott hala Sani hors de la banquette. À voir son allure, Malko se dit qu’elle n’était pas au bord de l’orgasme, mais qu’elle venait de l’avoir en plein bar du Shangri-la. Elle pouvait à peine tenir debout.

— À tout à l’heure, dit-il.

Avant d’aller chez Lim, il voulait parler à John Canon, ou au moins lui laisser un message. En quittant le hall il se retourna et aperçut dans l’ascenseur dont les portes se fermaient, Sani qui se laissait glisser lentement le long de Phil Scott.

* * *

La maison de Tong Lim était totalement obscure. Malko gara sa voiture à côté de la Mercedes de Margaret Lim et s’avança vers les colonnes blanches du perron. L’air embaumait le magnolia. On avait l’impression de se trouver très loin, dans un oasis de calme et de sérénité.