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— jsptke. dbltag. nsltce. dzcnt.

Andy lui renvoya l’ascenseur en deux fois plus raide.

— maxfrq. minpau. spktot. jspike.

Mais l’autre continua comme si de rien n’était.

— maxdz. spktim. falter. nslice.

— frqsum. eburst.

— iburst.

— prebst.

— nobrst.

Match nul à la mexicaine. Le petit homme gris souriait toujours. Pas la moindre trace de sueur sur son front. Il y avait là quelque chose de surnaturel, songea Andy.

Il comprit soudain que c’était une sorte de borgmann bidouilleur. Qui bossait pour les Entités, écumait la ville à la recherche d’indépendants dans son genre pour leur causer des ennuis.

À voir la compétence du bonhomme – et quelle compétence ! – Andy n’en avait que plus de mépris pour lui. Il y avait juste assez de sang Carmichael dans ses veines pour qu’il sache quel parti prendre dans la lutte entre les humains et les Entités. Un borgmann, ça, c’était vraiment ignoble ! Se servir de ses talents d’informaticien pour les aider, Elles ! Non, pas question. C’était dégueulasse. Andy voulait le court-circuiter. Le griller. Jamais il n’avait autant détesté quelqu’un.

Mais il ne pouvait absolument rien lui faire. Il n’en revenait pas. Il était le Roi des Données, il était le Monstre des Méga-octets. Depuis des années, il flottait d’un bord à l’autre d’un monde enchaîné, chevauchant allègrement le flux des données, crochetant toutes les serrures qu’il trouvait sur son chemin. Et voilà que cet inconnu l’entortillait dans un sac de noeuds. Il parait tous les coups que lui portait Andy et ses contre-attaques devenaient de plus en plus bizarres. Le petit homme travaillait avec un algorithme qu’Andy n’avait jamais vu et avait le plus grand mal à résoudre. Au bout de cinq minutes, il ne savait même plus ce que l’autre était en train de lui faire et encore moins comment le neutraliser. Au point qu’il arrivait à peine à exécuter la moindre procédure. L’autre le poussait inéluctablement vers un plantage de biogiciel.

« T’es qui, toi, bordel ? » hurla Andy, furieux. Le petit bonhomme lui rit au nez.

Et continua de le pilonner. Il menaçait l’intégrité de l’implant d’Andy, l’attaquant au niveau microcosmique, s’en prenant aux molécules elles-mêmes. Il bousculait les cosses d’électrons, inversait les charges, brouillait les valences, engorgeait ses portes, réduisait ses circuits en bouillie. L’ordinateur implanté dans le corps d’Andy n’était qu’un tas de chimie organique, après tout. Son cerveau aussi. Si l’autre continuait comme ça, le biordinateur serait fichu, et le cerveau auquel il était relié ne tarderait pas à suivre.

Ce n’était pas une partie de bras de fer. C’était du meurtre.

Andy piocha dans ses réserves, mettant en batterie tous les blocages défensifs qu’il pouvait inventer. Des trucs qu’il n’avait encore jamais eu à utiliser ; mais ils étaient toujours à sa disposition et ils réussirent effectivement à ralentir son adversaire. L’espace d’un instant, il fut en mesure de contenir l’assaut et même de faire un peu reculer l’autre, ce qui lui donna le temps de souffler pour mettre au point quelques-unes de ses propres combinaisons offensives. Mais avant qu’il puisse les lancer, le petit homme neutralisa Andy encore une fois et recommença à le pousser sur la pente du plantage intégral. Incroyable, ce mec.

Andy le bloqua. Il revint à la charge. Andy frappa un grand coup et le minable détourna l’impact sur quelque autre voie neu-rale où il se dissipa.

Andy lui allongea un nouveau coup, encore plus violent. Une fois de plus, son attaque fut neutralisée.

C’est alors que le petit homme assaillit Andy avec une force très supérieure à tout ce qu’il avait employé auparavant – de quoi l’envoyer au tapis. Andy était à trois nanosecondes du bord du précipice lorsqu’il réussit, à un demi-poil près, à se rattraper.

Encore groggy, il se mit à élaborer une nouvelle combine. Mais ce faisant, il analysait le style des données adverses et n’y trouvait qu’une confiance imperturbable, intégrale. Le petit bonhomme l’attendait au tournant. Il était paré pour tout ce qu’Andy pourrait lui balancer sur la tronche. Il planait dans cette zone de certitude absolue qui se trouve au-delà de la simple confiance en soi.

Andy voyait bien où il en était arrivé. Il pouvait empêcher l’autre de le démolir, quoique tout juste, mais n’était pas en mesure de lui faire tâter de ses gants. Et l’autre avait derrière lui des ressources apparemment infinies. Andy ne l’inquiétait pas le moins du monde. Ce mec était infatigable. Il ne faiblissait pas. Il encaissait tout ce qu’Andy lui envoyait et n’arrêtait pas de le bombarder de nouvelles données tous azimuts.

Pour la première fois, Andy comprenait ce qu’avaient dû ressentir tous les bidouilleurs dont il avait triomphé au fil des an-nées. Certains avaient dû pas mal rouler les mécaniques avant de tomber sur lui. Ça coûte plus de perdre quand on se croit le meilleur. Quand on se sait le meilleur. Quand ils perdent, les types de ce genre sont obligés de reprogrammer intégralement l’idée qu’ils se font de leur rapport au monde.

Il n’avait plus que deux possibilités. Ou continuer de se battre jusqu’à ce que le petit homme le pousse à la limite de ses forces et le détruise. Ou abandonner tout de suite. Il n’avait vraiment pas d’autre choix.

Finalement, songea Andy, on en arrive toujours là, pas vrai ? À une alternative entre oui ou non, marche ou arrêt, un ou zéro. Il inspira à fond. Il ne voyait plus que le chaos devant lui. « Très bien, dit-il. Je suis battu. J’abandonne. » Paroles qu’il n’aurait jamais cru s’entendre prononcer.

Il arracha son poignet de l’implant de son adversaire, trembla, vacilla et s’effondra sur le sol.

Une minute plus tard, cinq flics du LAGON jaillirent de nulle part, lui sautèrent dessus, le ficelèrent comme une dinde et l’emmenèrent, son bras implanté en l’air, un neutralisateur fixé au poignet, comme s’ils craignaient qu’il se mette à saisir des données au vol.

Steve Gannett sortit sur le patio où son cousin était assis dans le fauteuil du défunt Colonel et dit : « Tu veux bien jeter un coup d’œil à ça, Anson ? »

II lui remit une longue feuille de papier vert glacé. Anson la contempla sans rien y comprendre. Ce n’étaient que flèches, tortillons et lettres grecques, indéchiffrables sornettes crachées par quelque ordinateur.

« Tu sais bien que je ne pige rien à ces foutus machins », dit sèchement Anson. Il se rendait compte qu’il avait tort de parler à Steve sur ce ton ; mais sa patience s’amenuisait de jour en jour. Agé de trente-neuf ans, il avait l’impression d’en accuser cinquante. Il y avait eu un temps où il était plein de grands projets, lorsqu’il était jeune, gonflé à bloc et certain que ce serait lui qui libérerait le monde de ses suzerains extraterrestres et de leur sereine tyrannie ; mais tout était allé de travers, creusant dans son coeur un vide glacial qui s’étendait à n’en plus finir, jusqu’à ce qu’il ait le sentiment qu’il n’y avait plus tellement d’Anson autour. Depuis des années – depuis l’échec de la grande expédition contre le Numéro Un – il menait une vie qui semblait n’avoir ni passé ni avenir. Il n’y avait que la grisaille d’un interminable présent. Il n’élaborait pas de projets, ne caressait pas de rêves. « Qu’est-ce que je suis censé voir là ?

— Les empreintes digitales d’Andy, je crois.

— Ses empreintes digitales ?

— Son profil de codage en ligne. Sa patte personnelle. Oui, ça peut se comparer aux empreintes digitales de quelqu’un. Ou à son écriture. Je crois qu’il s’agit du profil d’Andy.

— Vraiment ? Et tu l’as eu comment ?