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— Oh ! oui, expliqua Frankie, mais il nous faut l’extraire d’abord : il faut bien le préparer…

— Le traiter…, ajouta Bennie.

— Le découper…

— Merci bien, s’écria Arthur, renversant sa chaise et s’écartant de la table avec horreur.

— On pourrait toujours le remplacer », émit Bennie sur un ton raisonnable, « si vous pensez que c’est important.

— Oui, par un cerveau électronique, ajouta Frankie, un modèle simple pourrait suffire.

— Un modèle simple ! vagit Arthur.

— Ouais », dit Zaphod avec un mauvais sourire soudain, « vous n’auriez qu’à le programmer pour dire : Quoi ? Je ne comprends pas et Où peut-on trouver du thé ? – qui pourrait faire la différence ?

— Quoi ? s’exclama Arthur en reculant encore plus loin.

— Vous voyez ce que je veux dire, fit Zaphod, en poussant un hurlement de douleur à cause de ce que Trillian venait de lui faire.

— Moi, je remarquerais la différence, dit Arthur.

— Même pas, dit Frankie : on vous programmerait pour ne pas la remarquer.

Ford se dirigea vers la porte.

— Écoutez, je suis désolé, les souris, mais je ne pense pas qu’on puisse s’entendre.

— Je penserais plutôt qu’il faut qu’on s’entende », répondirent en chœur les souris (et toute trace de charme avait soudain disparu de leurs petites voix pointues).

Avec un minuscule couinement, leurs deux verres volants s’élevèrent au-dessus de la table pour foncer dans les airs en direction d’Arthur qui, trébuchant, se retrouva acculé dans un coin, totalement incapable de décider ou penser quoi que ce soit.

Trillian le prit par le bras et tenta désespérément de le traîner jusqu’à la porte que Ford et Zaphod se débattaient pour ouvrir mais Arthur était un poids mort – il semblait hypnotisé par les deux rongeurs volants fondant sur lui.

Elle lui hurla dessus mais il se contenta de rester bouche bée.

Dans un ultime effort, Fort et Zaphod parvinrent à ouvrir la porte. De l’autre côté les attendait un petit comité de bonshommes passablement laids, sans doute (supposèrent-ils) la pire lie de Magrathea : non seulement étaient-ils déjà hideux par eux-mêmes mais l’équipement médical qu’ils arboraient en plus était loin d’être joli. Ils chargèrent.

Donc : Arthur était à deux doigts d’avoir le crâne ouvert, Trillian était incapable de l’aider, et Ford et Zaphod étaient sur le point de se faire attaquer par quelques affreux considérablement plus lourds et mieux armés qu’eux.

L’un dans l’autre, il semble extrêmement heureux qu’à cet instant même toutes les alarmes de la planète éclatèrent en un tintamarre assourdissant.

Chapitre 32

Alerte ! Alerte ! bramèrent les klaxons dans tout Magrathea. Atterrissage d’un vaisseau hostile sur la planète. Envahisseurs armés localisés dans le secteur 8-A. Aux postes de défense ! Aux postes de défense !

Les deux souris tournaient en reniflant avec irritation les fragments épars de leurs verres volants répandus sur le sol.

— Damnation ! maugréa Frankie, tout ce tintouin pour deux malheureux kilos de cervelle de Terrien !

Il courait de-ci, de-là, ses yeux roses luisant de colère, sa fourrure blanche crépitant d’électricité statique.

— La seule chose qu’il nous reste à faire à présent », remarqua Bennie, accroupi et se lissant pensivement les moustaches, « c’est d’essayer d’inventer une question, d’en imaginer une de plausible.

— Difficile, constata Frankie.

Il réfléchit.

— Que dirais-tu de : Qu’est-ce qui est jaune et dangereux ?

Bennie considéra la suggestion quelques instants :

— Non, pas bon, dit-il enfin. Ça ne colle pas avec la réponse.

Ils s’abîmèrent dans le silence durant quelques secondes.

— Bon, reprit Bennie. Qu’est-ce qu’on trouve si l’on multiplie six par sept ?

— Non, non, trop littéral ! trop concret ! dit Frankie. Aucun intérêt pour un parieur.

Nouvelle intense réflexion. Enfin, Frankie dit :

— J’ai une idée : Combien de routes un homme doit-il prendre[5] ?

— Ah ! s’exclama Bennie. « Ha, Ha. Voilà quelque chose de prometteur !

Il joua quelques instants avec cette phrase.

— Oui, c’est excellent ! Ça a l’air lourd de sens sans pour autant vous limiter en fin de compte à la moindre signification. Combien de routes un homme doit-il prendre ? – Quarante-deux. Excellent, excellent ; ça va les piéger. Frankie mon vieux, on est sauvés !

Dans leur excitation, ils se mirent à danser la gigue en tapant du pied.

Étendus à terre non loin, gisaient plusieurs bonshommes passablement laids et qui avaient reçu du côté du crâne quelques trophées d’esthétique industrielle particulièrement pesants.

Cinq cents mètres plus loin, quatre silhouettes remontaient un couloir à la recherche d’une sortie. Les quatre fuyards émergèrent dans une vaste salle d’ordinateurs. Ils regardèrent autour d’eux, affolés.

— Par où va-t-on, à ton avis, Zaphod ? demanda Ford.

— Au pif, je dirais par là », et il fonça sur la droite entre une baie d’ordinateurs et le mur.

Au moment où les autres se ruaient derrière lui, il fut arrêté net par la décharge d’énergie d’un Kill-O-Zap qui déchira l’air à deux doigts du bout de son nez et crama un petit bout du mur adjacent.

Une voix jaillit dans un beuglophone :

— O.K., Beeblebrox. Ne bougez plus ! On vous tient en joue.

— Des flics ! » siffla Zaphod en se jetant à quatre pattes. « À ton tour, t’as une suggestion à nous faire, Ford ?

— D’accord, par ici », dit Ford et les quatre se lancèrent dans un passage entre deux rangées d’ordinateurs.

Au bout du passage apparut une silhouette en scaphandre spatial lourdement blindé et brandissant un vicieux pistolet Kill-O-Zap.

— Nous n’avons pas l’intention de vous descendre, Beeblebrox ! lança la silhouette.

— Entièrement d’accord ! » rétorqua Zaphod avant de plonger dans le large intervalle séparant deux unités de traitement.

Les trois autres bifurquèrent dans son sillage.

— Ils sont deux, dit Trillian ; nous sommes coincés !

Ils se tassèrent dans l’angle entre une grosse banque de données et le mur.

Ils attendirent en retenant leur respiration.

Soudain, l’air explosa sous les décharges d’énergie lorsque les deux flics ouvrirent le feu simultanément.

— Eh ! mais, ils nous tirent dessus ! » dit Arthur, présentement roulé en une petite boule. « Je croyais qu’ils avaient dit qu’ils voulaient pas nous descendre !

— Ouais, moi aussi je croyais », opina Ford.

Zaphod prit le risque de sortir momentanément la tête :

— Eh ! Je croyais que vous aviez dit que vous ne vouliez pas nous descendre ! lança-t-il avant de se planquer de nouveau.

Ils attendirent.

Au bout d’un moment, une voix répondit :

— Ce n’est pas facile d’être flic !

— Qu’est-ce qu’il a dit ? murmura Ford, étonné.

— Il a dit que ce n’était pas facile d’être flic.

— Eh bien, ça c’est sûrement son problème, non ?

— Je serais plutôt de ton avis.

Ford lança :

— Eh ! écoutez ! Je crois que de notre côté on a déjà assez de problèmes avec vous qui nous tirez dessus et tout ça, alors si vous pouviez éviter de nous soumettre les vôtres, je pense que ça serait plus facile pour tout le monde !

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5

Une simple consultation de l’Encyclopædia Galactica vous précisera qu’il s’agit du premier vers de la chanson de Bob Dylan: Blowin’in the Wind.