Выбрать главу
gn et st) étaient parfois employées également. La porte secrète était marquée d’un D . Sur le côté, une main pointait vers elle, et en dessous il était écrit :

Les deux dernières runes (th) étaient les initiales de Thror et Thrain.

Les runes lunaires découvertes par Elrond se lisaient ainsi :

Sur la carte, les points cardinaux sont indiqués par des runes, l’est étant placé en haut, comme c’est souvent le cas sur les cartes naines. On lit donc, dans le sens des aiguilles d’une montre : E(st), S(ud), O(uest), N(ord).

1.

En français, dwarf signifie « nain ». (N.d.T.)

2.

La raison de cet usage est donnée dans Le Seigneur des Anneaux, p. 1232.

I

Une fête inattendue

Au fond d’un trou vivait un hobbit. Non pas un trou immonde, sale et humide, rempli de bouts de vers et de moisissures, ni encore un trou sec, dénudé, sablonneux, sans rien pour s’asseoir ni pour se nourrir : c’était un trou de hobbit, d’où un certain confort.

Sa porte, peinte en vert, était parfaitement ronde comme un hublot, avec un étincelant bouton de cuivre jaune placé exactement au centre. Elle s’ouvrait sur un hall en forme de tube, comme un tunnel ; un tunnel très confortable et sans fumée, avec des murs recouverts de lambris, un sol carrelé et garni de tapis, pourvu de chaises bien astiquées et de nombreuses patères pour accrocher chapeaux et manteaux : ce hobbit aimait la visite. Le tunnel s’enfonçait profondément, presque en ligne droite mais pas tout à fait, dans le flanc de la colline – La Colline, comme tout le monde l’appelait à des lieues à la ronde – et de nombreuses petites portes rondes s’ouvraient de chaque côté, une à gauche, puis l’autre à droite. Le hobbit ne montait jamais d’escaliers : chambres, salles de bain, caves, garde-manger (nombreux), penderies (il y avait des pièces entières consacrées aux vêtements), cuisines, salles à manger – tout était au même étage et le long d’un même corridor. Les plus belles pièces se trouvaient toutes à gauche (en entrant), car c’étaient les seules à avoir des fenêtres, des fenêtres rondes, dans de belles niches, qui donnaient sur son jardin et sur les prés au-delà, descendant vers la rivière.

Ce hobbit était un hobbit fort bien nanti, et il s’appelait Bessac. Les Bessac habitaient les environs de La Colline de temps immémorial, et ils étaient vus comme des gens très respectables, non seulement parce que la plupart d’entre eux étaient riches, mais aussi parce qu’ils ne partaient jamais à l’aventure et ne faisaient jamais rien d’inattendu : on savait ce qu’un Bessac dirait de telle ou telle chose sans être obligé de lui poser la question. Cette histoire raconte comment un Bessac se trouva mêlé à une aventure, à faire et à dire des choses tout à fait inattendues. Il a peut-être perdu le respect de ses voisins, mais il a gagné… enfin, vous verrez s’il a gagné quelque chose à la fin du compte.

La mère de notre hobbit… mais qu’est-ce qu’un hobbit ? Je suppose qu’il faut de nos jours en faire une description, puisqu’ils sont désormais rares et craintifs envers les Grandes Gens, comme ils nous appellent. Ce sont (ou c’étaient) des gens de petite stature, environ la moitié de notre taille, plus petits que les Nains barbus. Les hobbits, eux, n’ont pas de barbe. Ils n’ont à peu près rien de magique, sauf cette magie de tous les jours qui leur permet de disparaître rapidement et sans bruit quand de gros balourds comme vous et moi arrivent avec fracas, en faisant un bruit d’éléphant qu’ils peuvent entendre à des centaines de pieds. Ils ont tendance à prendre du ventre ; ils s’habillent de couleurs vives (surtout de vert et de jaune) et ne portent pas de chaussures, parce qu’ils développent un cuir naturel sous la plante des pieds et une épaisse touffe de poils bruns sur le dessus, semblable à leur chevelure (qui est frisée) ; ils ont de longs doigts foncés et agiles, un visage souriant et un rire franc et chaleureux – surtout après le dîner, qu’ils prennent deux fois par jour quand ils peuvent se le permettre. Maintenant, vous en savez assez pour la suite. Comme je le disais, la mère de ce hobbit – de Bilbo Bessac, s’entend – n’était nulle autre que Belladonna Touc, l’une des trois remarquables filles du Vieux Touc, le chef des hobbits qui vivaient de l’autre côté de L’Eau, cette petite rivière qui coulait au pied de La Colline. On disait souvent (dans les autres familles) que longtemps auparavant, un des ancêtres Touc avait dû épouser une fée. C’était absurde, bien entendu, mais sans doute y avait-il encore chez eux quelque chose qui n’était pas tout à fait hobbitesque, et de temps à autre, des membres du clan Touc partaient à l’aventure. Ils disparaissaient en catimini, et la famille étouffait l’affaire ; mais cela ne changeait rien au fait que les Touc n’étaient pas aussi respectables que les Bessac, même s’ils étaient assurément plus riches.

Ce qui ne veut pas dire que Belladonna Touc ait été mêlée à des aventures après être devenue Mme Bungo Bessac. Bungo, le père de Bilbo, construisit pour sa femme (et en partie avec son argent) le trou de hobbit le plus luxueux jamais vu en bas de La Colline, au-delà de La Colline ou de l’autre côté de L’Eau, et ils y demeurèrent jusqu’à la fin de leurs jours. Bilbo, leur fils unique, qui avait tout l’air d’une seconde mouture de son tranquille et inébranlable père, devait néanmoins avoir hérité d’une certaine bizarrerie du côté Touc, quelque chose dans son tempérament qui n’attendait que l’occasion de se manifester. Mais cette occasion ne se présenta jamais ; et Bilbo, devenu adulte, âgé d’une cinquantaine d’années, habitait désormais le magnifique trou de hobbit bâti par son père que je viens de vous décrire, et semblait s’y être installé pour de bon.

Par un curieux hasard, un matin, il y a bien longtemps dans la quiétude du monde, alors qu’il y avait moins de bruit et plus de verdure, et que les hobbits étaient encore nombreux et prospères, Bilbo Bessac se tenait debout à sa porte après le petit déjeuner, en train de fumer une longue pipe en bois dont l’énorme fourneau touchait presque ses orteils (soigneusement brossés) – quand Gandalf apparut. Gandalf ! Si vous aviez entendu ne serait-ce que le quart de ce que j’ai entendu dire à son sujet, et je n’ai entendu qu’une très petite partie de ce qu’il y a à entendre, vous vous diriez que quelque chose de remarquable était sur le point d’arriver. Les histoires et les aventures surgissaient partout où il allait, d’une manière tout à fait extraordinaire. Il n’était pas passé sous La Colline depuis des lustres, pas depuis la mort de son ami le Vieux Touc, en fait, et les hobbits avaient presque oublié à quoi il ressemblait. Ses affaires l’avaient retenu par-delà La Colline et de l’autre côté de L’Eau depuis qu’ils étaient de tout petits hobbits et de toutes petites hobbites.

Bilbo, qui ne se méfiait pas, ne vit ce matin-là qu’un vieillard avec un bâton. Il portait un grand chapeau bleu et pointu, une longue cape grise et une écharpe argent, surmontée d’une barbe blanche qui descendait jusque sous la ceinture, ainsi que d’énormes bottes noires.

« Bonne journée ! » dit Bilbo, et il le pensait. Le soleil brillait, et l’herbe était très verte. Mais Gandalf le regarda sous de longs sourcils broussailleux qui dépassaient en bordure de son large chapeau.

« Que voulez-vous dire ? répondit-il. Me souhaitez-vous une bonne journée, ou êtes-vous en train de dire que c’est une bonne journée que je le veuille ou non, que vous êtes en bonne forme aujourd’hui, ou que c’est une journée où l’on doit être bon ? »