Les auteurs m’ont demandé d’expliquer quelques termes incompréhensibles et certains noms peu familiers. Pour satisfaire cette demande j’ai rencontré un certain nombre de difficultés. Naturellement, je n’ai pas l’intention d’expliquer les mots inventés par les auteurs ( « aquavitomètre », « transmission temporelle », etc. ). Je ne pense pas non plus que l’explication de mots réellement existants, quand elle exige des connaissances très spéciales, soit utile. Il est impossible, par exemple, d’expliquer le terme d’« hyperchamp » à quelqu’un qui connaît mal la théorie du vide physique. La signification du mot « transgression » est très large, de plus, les acceptions du mot varient selon les écoles. Bref, je me suis borné à commenter quelques noms propres, certaines notions suffisamment répandues et spécifiques à la fois. En outre, j’ai commenté des mots qui n’ont pas de rapport direct avec la magie mais qui sont susceptibles, à mon sens, de n’être pas toujours compris.
Augures. — Dans la Rome ancienne, prêtres qui annonçaient l’avenir d’après le vol et le comportement des oiseaux. L’énorme majorité d’entre eux étaient des charlatans conscients et organisés. On peut en dire autant des augures de l’institut bien qu’ils utilisent d’autres méthodes.
Anacéphale. — Monstre dépourvu de matière cérébrale et de boîte crânienne. Habituellement, les anacéphales meurent à la naissance ou dans les heures qui suivent.
Bethsalel, Lev Ben. — Célèbre magicien du Moyen Age, alchimiste à la cour de l’empereur Rudolf II.
Basilic. — Dans les contes, monstre à corps de coq et queue de serpent dont le regard tuait. En réalité, genre de pangolin presque disparu de nos jours, couvert de plumes, ancêtre de l’archéoptéryx. Capable d’hypnotiser. Le vivarium de l’institut en abrite deux exemplaires.
Danaïdes. — Dans la mythologie grecque, filles criminelles du roi Danaë qui avaient tué leurs maris sur son ordre. Elles furent condamnées à remplir des tonneaux sans fond. Par la suite, lors d’une révision de leur procès, le juge prit en considération le fait qu’elles avaient été contraintes au mariage. Cette circonstance atténuante permit de les affecter à des travaux moins insensés : à l’institut, elles sont occupées à défoncer le bitume qu’elles ont elles-mêmes coulé à quelque temps de là.
Démon de Maxwell. — Élément important d’une expérience imaginaire du grand physicien anglais Maxwell, dirigée contre le deuxième principe de thermodynamique. Dans cette expérience, le démon se place à côté de l’ouverture de la paroi qui sépare en deux un récipient rempli de molécules en mouvement. La tâche du démon consiste à laisser passer les molécules rapides d’une partie du récipient dans l’autre et de fermer la porte au nez des lambines. Le démon idéal est ainsi capable, sans grande dépense de travail, de créer une très haute température dans une moitié du récipient et une très basse température dans l’autre, réalisant un moteur perpétuel. Notre institut est le seul à avoir trouvé ces démons et à avoir réussi à les faire travailler.
Djinn. — Mauvais génie des légendes arabes et persanes. Presque tous les djinns sont des doubles du roi Salomon et des mages de son époque. Ils ont été utilisés dans des buts militaires et politiques. Ils se distinguent par un caractère épouvantable, l’insolence et l’ingratitude. Leur ignorance et leur agressivité sont telles qu’ils se trouvent presque tous en détention. La magie moderne les utilise comme cobayes. En particulier, Edik Ampérian a pu définir à l’aide de treize djinns la quantité de mal que peut causer à la société un idiot inculte et méchant.
Djan Ben Djan. — Savant ou guerrier de l’Antiquité. Son nom est toujours associé à l’idée de bouclier et ne se rencontre pas isolément. ( Il est mentionné, par exemple, dans la Tentation de saint Antoine de Gustave Flaubert. )
Domovoï. — Dans l’esprit des personnes superstitieuses, être surnaturel vivant dans les maisons habitées. Les domovoï n’ont rien de surnaturel. Ce sont ou des mages déchus qu’on ne parvient pas à rééduquer, ou des hybrides de gnomes et d’animaux domestiques. A l’institut, ils sont sous les ordres de Modeste Matvéievitch et se voient confier des tâches auxiliaires qui ne demandent pas de qualification.
Dracula, comte. — Célèbre vampire hongrois ( XVIIe-XIXes. ) N’a jamais été comte. A commis d’innombrables crimes contre l’humanité. Il fut capturé par des hussards et solennellement transpercé d’un pieu de tremble devant un grand concours de peuple. Il se distinguait par une extraordinaire vitalité : son autopsie mit à jour un kilo et demi de balles d’argent.
Étoile de Salomon. — Signe magique en forme d’étoile à six branches. Actuellement, comme la plupart des figurations symboliques, il a perdu tout pouvoir et n’est bon qu’à effrayer les ignorants.
Fantôme. — Apparition, spectre. Pour la science moderne, condensé d’information nécrobiotique. Les fantômes provoquent un effroi superstitieux bien qu’ils soient complètement inoffensifs. A l’institut, nous nous en servons pour approfondir la vérité historique, mais juridiquement ils ne peuvent pas être considérés comme témoins.
Gnome. — Dans les légendes d’Europe occidentale, vilain petit nain qui gardait des trésors enfouis. J’ai bavardé avec plusieurs d’entre eux. Ils sont véritablement laids et véritablement nains, mais ils n’ont jamais entendu parler de trésors. La plupart des gnomes sont des doubles oubliés et désséchés.
Golem. — L’un des premiers robots, monstre d’argile sorti des mains de Lev Ben Bethsalel. ( cf, par exemple, le film tchèque, « Le Boulanger de V empereur ).
Harpies. — Dans la mythologie grecque, monstres qui personnifiaient les tempêtes. En réalité, sous-produit des expériences des premiers mages dans le domaine de la sélection. Elles ont l’aspect de grands oiseaux roux à tête de vieille femme, elles sont sales, gloutonnes et hargneuses.
Hydre. — Chez les Grecs anciens, animal fabuleux, serpent d’eau douce à sept têtes. Celui de l’institut est un reptile à plusieurs têtes, fils de Gorynytch le Dragon et d’une plésiosaure du lac Loch-Ness.
Homoncule. — Dans l’esprit des alchimistes du Moyen Age, être d’apparence humaine, créé artificiellement dans un matras. En réalité, il n’est pas possible d’obtenir en matras un être artificiel. Les homoncules sont synthétisés dans des incubateurs spéciaux et sont utilisés pour les simulations biomécaniques.