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À une question au sujet des réservoirs existant à l’intérieur des terres dans la partie nord-est de l’île, Bob répondit que ces réservoirs contenaient des bactéries qui agissaient très rapidement à haute température, que par conséquent on les laissait en plein soleil, quitte à ce que leur activité cessât à la tombée du jour :

« On dirait qu’il y en a plus que d’habitude, ajouta Bob, mais ils sont toujours en train de construire. Ces réservoirs sont situés au pied du versant nord-est des collines, et on les voit mal d’ici. C’est d’ailleurs le seul endroit que l’on ne découvre pas du haut de cet arbre.

—… en plus de tout ce qui se trouve dans la jungle, ajouta malicieusement le Chasseur.

— Bien sûr, répliqua vivement Bob, je ne vous ai pas amené ici pour essayer de découvrir votre proie à distance. Si j’ai grimpé jusqu’à cette plate-forme, c’est dans l’unique dessein de vous montrer l’endroit où vont se dérouler nos recherches. Il va falloir profiter pleinement des trois prochains jours, car lundi je ne pourrai pas éviter l’école. Si le bateau était réparé, nous pourrions aller faire un tour sur les récifs, ajouta Bob en désignant de la tête la petite crique où ils étaient passés la veille.

— Il n’existe donc pas d’autre bateau dans toute l’île ?

— Si, et je réussirai peut-être à en emprunter un, quoiqu’il ne soit guère recommandé d’aller traîner tout seul ses rames, près des récifs. En général on y va toujours à plusieurs.

— Connaissez-vous des endroits que l’on peut atteindre à pied en partant de la plage ?

— Non. Dans la plupart des cas il faut y aller en nageant. Et je n’ai aucune envie de me baigner aujourd’hui, à moins que vous puissiez agir sur mes coups de soleil avec un peu plus de vigueur que vous ne l’avez fait jusqu’à présent », insista Bob.

Le Chasseur crut devoir ne pas répondre et Bob descendit de l’arbre. Il hésita un court instant et brusquement dévala rapidement la colline en se frayant un chemin entre les buissons et se rapprocha de plus en plus de la route. Il expliqua son agitation par ces mots :

« Ça ne vaut pas le coup de prendre mon vélo. »

Bob atteignit la route à deux cents mètres environ à l’est de l’école. En passant devant les maisons il y jeta un coup d’œil comme pour évaluer les chances de succès qu’aurait une demande d’emprunt de bateau. Il arriva bientôt au croisement de la route conduisant à l’appontement et hâta le pas vers la maison des Teroa.

Il fit le tour de la villa avec l’espoir de trouver Charles au jardin, mais ne vit que ses deux sœurs qui déclarèrent que leur frère était dans sa chambre. Au moment où Bob se dirigeait vers le perron, la porte d’entrée s’ouvrit et Charles sortit en trombe.

« Bob, ça y est, je l’ai. Toi qui étais toujours incrédule. »

Bob, un peu interloqué, jeta un coup d’œil vers les deux jeunes filles qui souriaient d’un air niais.

« Qu’est-ce que tu as ?

— Mais la place ! Nous en parlions hier justement. J’ai reçu un télégramme ce matin, et je ne savais même pas que tout était déjà décidé.

— J’étais au courant, répondit Bob en souriant vaguement. Ton père me l’avait dit.

— Et tu gardais tout cela pour toi ? »

Teroa essaya d’attraper Bob qui fit un pas rapide en arrière.

« Il m’avait affirmé que c’était préférable… que tu ne le saches pas.

— Ne parle à personne de ce qui m’arrive, insista Teroa. Tu m’entends, je ne veux pas. Je vais maintenant chez Ray reprendre deux ou trois choses qu’il m’a empruntées il y a déjà quelque temps. Tu viens avec moi ? »

Bob leva les yeux au ciel, mais le Chasseur n’exprima aucune opinion particulière et il dut se décider lui-même. Il refusa et regarda s’éloigner, parmi les hangars, la silhouette du futur marin, puis revint lentement sur la route.

« C’était la seule chance d’avoir un bateau, dit-il au Chasseur. Nous allons maintenant être obligés d’attendre que les copains sortent de l’école, et peut-être réussirons-nous à en emprunter un. De plus, en mettant les choses au pire, on ira plus vite s’il faut réparer le nôtre. Je n’ai d’ailleurs pas eu le temps de l’examiner de très près en portant la planche hier soir »

Le Chasseur, préoccupé, résuma la situation :

« Ce garçon à qui vous venez de parler va prendre un bateau. Il a déjà quitté l’île une fois depuis mon arrivée.

— Forcément. Vous avez entendu qu’il avait l’intention de se rendre chez Ray au réservoir n° 4 pour récupérer ses affaires. Le garçon dont il parle travaille sur l’une des plates qui servent à évacuer les résidus des réservoirs. Charlie veut rassembler tout ce qui lui appartient avant de quitter l’île. »

L’attention du Chasseur fut immédiatement alertée et il demanda : « Comment ? Quitter l’île ? Le type de la plate veut s’en aller ?

— Non ; Charlie, vous n’avez pas entendu ce qu’il disait ?

— Je l’ai entendu parler d’un nouveau job, c’est tout. Est-ce pour cela qu’il doit partir ?

— Bien sûr, Charlie est le fils du commandant de ce navire sur lequel il s’était caché dans l’espoir de trouver un emploi à bord. Vous ne vous souvenez donc de rien ? Son père nous a mis au courant le premier soir de notre installation à bord.

— Vous avez en effet parlé à un marin, répondit le Chasseur, mais je ne savais pas et ne sais pas encore ce que vous vous êtes dit alors, car vous parliez le pidgin des îles.

— C’est vrai, j’avais oublié », répondit Bob qui resta quelques instants à mettre de l’ordre dans ses pensées puis raconta l’histoire aussi brièvement et aussi clairement que possible. Le Chasseur réfléchit à son tour et dit : « Ce Charles Teroa a donc quitté l’île une fois depuis mon arrivée et il va s’en aller sous peu. Votre ami Norman Hay l’a quittée également. Je vous en prie, n’oubliez pas de me dire si, d’après vous, d’autres personnes sont parties entre temps.

— Il n’y en a pas d’autre. À moins que vous ne vouliez compter le père de Charlie, le commandant du bateau, mais il ne descend que très rarement à terre. Je ne vois d’ailleurs pas en quoi le voyage des deux garçons peut avoir de l’importance. Vous savez comme moi qu’ils n’ont pas mis les pieds à terre, et en admettant que votre criminel se soit trouvé avec eux il n’aurait pu se sauver qu’en pleine mer.

— Vous avez peut-être raison, mais en tout cas le garçon que vous venez de voir va s’en aller. Il faut l’examiner avant son départ ; essayons donc de trouver un moyen pour y parvenir. »

Pour la première fois depuis le début de la journée Bob oublia complètement ses coups de soleil en remontant chez lui.

X

EXAMEN MEDICAL

Au cours du déjeuner Bob s’efforça de dissimuler ses soucis. Le matin même sa mère avait cru trouver un moyen d’éclaircir une fois pour toutes le problème qui, d’après elle, devait le préoccuper. Depuis l’arrivée de son fils elle se demandait comment elle pourrait parvenir à le décider à aller voir le docteur de l’île. Elle venait de comprendre quel prétexte merveilleux allait être le coup de soleil. Elle n’eut pas l’occasion d’en parler à son mari, car Bob était rentré le premier à la maison mais elle était sûre que M. Kinnaird serait de son avis. Le repas touchait à sa fin lorsqu’elle mit le sujet sur le tapis.

Elle s’attendait à une discussion serrée et avait déjà préparé bon nombre d’arguments plus convaincants les uns que les autres. En effet Bob avait un peu honte d’avoir attrapé des coups de soleil si violents et souhaitait évidemment que cette petite aventure ne s’ébruitât pas. Mme Kinnaird fut donc profondément étonnée lorsque son fils accepta sans le moindre murmure de se rendre chez le médecin l’après-midi même comme elle venait de le lui proposer.