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« J’ai vraiment frisé de très près le coup dur », dit Bob en montrant sa jambe. Comme son père, ses camarades avaient voulu voir l’endroit où il s’était blessé ; mais avec eux il s’était abstenu de parler de son bras. « Je n’ai, malheureusement, pas pu éviter le choc, ajouta-t-il. Et je suppose que c’est ce petit bout de bois qui est la cause de tout le mal. »

Hay examinait très attentivement le morceau de bois. Le soleil était déjà bas sur l’horizon et l’obscurité gagnait peu à peu. Mais il put malgré tout apercevoir les traces laissées par l’accident.

« Tu as dû le sentir, dit-il. Et il t’a fallu un certain temps pour l’enlever. Regarde, le sang est descendu à plus de vingt-cinq centimètres de l’extrémité. Comment se fait-il que ton pantalon n’ait pas été plein de sang lorsque je suis venu à ta recherche hier ?

— Je n’en sais rien », se hâta de répondre Bob en s’écartant. Les trois autres le suivirent et, un instant plus tard, Hay haussa les épaules et s’éloigna à son tour.

Il les retrouva rassemblés autour du squelette du chien et très occupés à confronter leurs idées. Bob, qui les avait amenés là dans un dessein bien défini, ne les quittait pas des yeux. En dépit des paroles du Chasseur au sujet des os, il était convaincu que Tip avait été tué par leur fugitif qui avait ensuite installé le piège dans lequel il était tombé. Il parvenait même à expliquer pourquoi le criminel n’avait pas cherché à entrer dans son corps. Celui-ci avait sans doute trouvé très rapidement un autre hôte qui se servait du ruisseau comme d’un chemin pour pénétrer dans la jungle à la manière de Bob et de ses amis. Une telle hypothèse impliquait précisément la présence d’un de ses camarades dans le voisinage, camarade qui, pour une raison ou pour une autre, avait dû rester assez longtemps immobile pour permettre au criminel de le prendre comme hôte. Bob n’avait pas entendu parler d’une aventure de cette sorte, mais espérait qu’une phrase ou une réflexion le mettrait sur la voie.

La nuit tombait rapidement à présent et les garçons en étaient arrivés à la conclusion que selon toutes apparences aucune bête plus grosse qu’un insecte n’avait approché le corps du chien. Aucun d’eux n’avait encore touché les os jusqu’à présent, mais comme on voyait de moins en moins sous les buissons, Malmstrom décida d’examiner les restes de plus près. Le crâne du chien était sous un buisson particulièrement épais et il s’efforça d’écarter les épines pour le ramasser.

Il n’eut pas beaucoup de peine à enfoncer sa main, mais s’aperçut que les épines, dirigées toutes dans le même sens, se refermaient sur son bras comme une sorte de piège. Malmstrom essaya de se dégager, mais s’égratigna largement l’avant-bras et la main en ramenant le crâne. Il le tendit à Colby et secoua sa main pour faire tomber les gouttes de sang qui y perlaient.

« Cela ferait des hameçons au poil, remarqua-t-il. Ces sacrées épines se couchent contre la branche quand on appuie dessus, mais elles se redressent après. Je parie que c’est ce qui est arrivé à Tip. Il devait courir après quelque chose et n’a pas pu se dégager. »

Chacun s’accorda à trouver cette théorie tout à fait vraisemblable et Bob lui-même en fut ébranlé. Il se rappela soudain qu’il avait oublié de dire quelque chose au docteur. Que penserait Seever de la deuxième question qui l’agitait : « Était-ce vraiment le Chasseur ou le fugitif qui était en lui ? » Le médecin aurait peut-être réussi à découvrir un moyen de le savoir et il finirait bien par trouver un prétexte pour le mettre à l’épreuve. Dans la nuit profonde à présent, il descendit rapidement la colline, le cerveau en ébullition.

XVI

LA LISTE DES SUSPECTS

La journée du mardi se déroula comme à l’ordinaire jusqu’à la fin de la classe et seul le Chasseur sentait croître son inquiétude au sujet de Charles Teroa. Celui-ci devait en effet quitter l’île le jeudi et, autant que le Chasseur pouvait s’en rendre compte, Bob n’avait rien fait pour le soumettre à un examen ni pour retarder son départ. Encore deux soirs, et il serait trop tard.

Les garçons, à qui tous ces soucis étaient étrangers, se mirent en quête de matériaux nouveaux pour réparer leur bateau dès la sortie de la classe. Bob se joignit à eux, mais s’arrêta chez le docteur en déclarant qu’il souhaitait faire examiner sa jambe. Il raconta tout ce qui s’était passé la veille au soir et exposa son hypothèse. Le détective comprit alors pour la première fois que les pensées de son hôte avaient suivi une voie diamétralement opposée à la sienne. Il attira l’attention du jeune garçon et le mit au courant de ses propres conceptions en appuyant ses dires de toutes les preuves qu’il possédait.

«— Je suis navré de ne pas avoir compris plus tôt ce que vous pensiez. Je me rappelle pourtant vous avoir dit qu’à mon avis le chien n’avait pas été tué par le criminel que nous poursuivons, mais peut-être ai-je oublié de vous mentionner que le trou dans lequel vous êtes tombé était absolument naturel. J’aurais dû vous préciser que la branche qui vous est entrée dans la cheville se trouvait là depuis longtemps, sans doute depuis la chute de l’arbre. C’est pour cela que vous avez négligé les faits et gestes de Charles Teroa. »

— J’en ai l’impression, répliqua Bob qui fit un bref résumé au médecin de la déclaration du Chasseur.

— Le jeune Teroa ? demanda le docteur. Il doit venir me voir demain pour des piqûres. Avez-vous des raisons sérieuses de le suspecter ?

« — Au début, nous l’avions mis sur la liste des personnes suspectes pour la simple raison qu’il devait quitter l’île, répondit le Chasseur par la bouche de Bob. Nous voulions l’examiner avant son départ. Par la suite, nous avons appris qu’il avait dormi au moins une fois dans un bateau amarré aux récifs, ce qui aurait pu fournir une occasion exceptionnelle à notre fugitif de le choisir comme hôte. En outre, il était également là le jour où Bob est tombé dans le puits de l’appontement, mais cela ne le concerne pas directement. »

— Dans ce cas, répondit le docteur en souriant, nous nous trouvons en face d’une liste particulièrement longue des personnes suspectes au premier degré et tout de suite après nous pourrons ranger toute la population de l’île dans les possibles. Dites-moi, Bob, ne s’est-il rien passé hier soir qui pût donner une indication quelconque au sujet de l’un de vos amis ?

— Un simple fait, répondit le jeune garçon. Lorsque Malmstrom a retiré le crâne de Tip d’un buisson très épais, il s’est fait de sérieuses écorchures qui ont saigné abondamment : je pense donc que nous n’avons plus à nous inquiéter à son sujet. »

Seever fronça légèrement les sourcils, puis adressa une question directement au Chasseur :

« Pouvez-vous me dire si ce criminel que vous poursuivez possède une conscience lui permettant, par exemple, de laisser saigner une blessure dans l’unique intention de faire croire aux autres, comme Bob vient de le faire, qu’il n’est pas dans tel ou tel garçon ?

« — Son intelligence est très limitée, répliqua le Chasseur. De plus la cicatrisation des blessures légères est devenue une telle habitude chez nous, qu’il y a de fortes chances pour qu’il l’ait faite sans même y penser. Malgré tout, s’il possédait de sérieuses raisons de croire que l’on soupçonnait son hôte, il n’hésiterait pas à demeurer absolument passif, sans s’inquiéter de la gravité de la blessure. La conclusion de Bob ne repose sur aucune preuve sérieuse, néanmoins nous pourrons admettre qu’elle est valable en faveur de Malmstrom. »

— C’était exactement ce que je pensais après votre premier récit, répondit le docteur. Pour l’instant, nous nous trouvons dans la nécessité d’examiner immédiatement le jeune Teroa. Il serait particulièrement intéressant de savoir, Chasseur, quelles réactions peut donner le vaccin de la fièvre jaune sur des créatures de votre espèce.