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Maman, tu ne trouves pas que c'est bizarre de vivre? commença-t-elle.

Sa mère fut si ahurie qu'elle ne trouva rien à répondre. D'habitude, quand elle rentrait, Sophie était en train de faire ses devoirs.

Euh..., commença-t-elle. Parfois, oui.

Parfois? Mais ce que je veux dire... tu ne trouves pas étrange qu'il existe un monde?

Mais enfin, Sophie, qu'est-ce qui te prend de parler comme ça?

Pourquoi pas ? Tu trouves peut-être que le monde est tout à fait normal, toi ?

Eh bien, oui ! Du moins dans les grandes lignes...

Sophie comprit que le philosophe avait raison. Les adultes

trouvaient que tout dans le monde allait de soi. Une bonne fois pour toutes, ils étaient plongés dans le doux assoupisse ment de leur routine quotidienne.

Peuh ! Tu t'es tellement habituée à ton petit confort que plus rien au monde ne t'étonne, ajouta-t-elle.

Mais qu'est-ce que tu racontes ?

Je dis que tu es beaucoup trop blasée. En d'autres termes, que tu es complètement foutue.

Je t'interdis de me parler sur ce ton !

Alors disons que tu t'es fait ta petite place bien au chaud dans la fourrure d'un lapin blanc qui vient de sortir du chapeau haut de forme de l'univers. Mais c'est vrai, j'oubliais, tu dois mettre les pommes de terre sur le feu, puis tu dois lire ton journal et après tes trente minutes de sieste, tu dois regarder les informations.

Une ombre passa sur le visage de sa mère. Elle alla comme prévu à la cuisine et mit les pommes de terre sur le feu. Puis elle revint dans le salon et c'est elle qui cette fois obligea Sophie à s'asseoir :

J'ai quelque chose à te dire, commença-t-elle.

Sophie comprit au ton de sa voix que c'était du sérieux.

Dis, mon trésor, tu n'as encore jamais touché à la drogue, j'espère?

Sophie eut envie de rire, mais elle comprenait pourquoi sa mère abordait justement ce sujet maintenant.

T'es folle ou quoi ? répliqua-t-elle. Pour devenir encore davantage une larve ?

Cet après-midi-là, il ne fut plus question ni de drogue ni de lapin blanc.

Les mythes

.un fragile équilibre entre les forces du bien

et du mal...

Il n'y eut aucune lettre pour Sophie le lendemain matin.

Elle s'ennuya toute la journée à l'école et s'appliqua à être spécialement gentille avec Jorunn pendant les récréa tions. Sur le chemin du retour, elles décidèrent de partir en randonnée avec une tente dès qu'il ferait plus sec en forêt.

Puis elle se retrouva devant la boîte aux lettres. Elle ouvrit d'abord une lettre de petit format avec un cachet de Mexico. C'était une carte de Papa. Il avait le mal du pays et pour la première fois avait battu son second aux échecs. Il ajoutait qu'il aurait bientôt épuisé les vingt kilos de livres qu'il avait emportés à son dernier passage.

Et elle trouva aussi une grande enveloppe jaune avec son nom dessus ! Sophie alla déposer son cartable et le courrier dans la maison, referma à clé et courut retrouver sa cabane. Elle sortit d'autres feuilles dactylographiées et se mit à lire :

La représentation mythique du monde

Salut, Sophie ! Il y a du pain sur la planche, alors commen çons sans plus tarder.

Le terme philosophie recouvre une façon de penser radicale ment nouvelle qui vit le jour en Grèce environ 600 ans avant Jésus-Christ. Auparavant, diverses religions s'étaient chargées de répondre à toutes les questions que se posaient les hommes. Ces explications d'ordre religieux se transmettaient de généra tion en génération sous forme de mythes. Un mythe, c'est un récit sur les dieux qui cherche à expliquer les phénomènes natu rels et humains.

Pendant des millénaires, il y a eu dans le monde entier une véritable floraison d'explications mythiques aux problèmes phi losophiques. Les philosophes grecs tentèrent de démontrer que les hommes ne devaient pas se fier à ces mythes.